Profondément renouvelée depuis le passage du porte-hélicoptères aux BPC, la mission Jeanne d’Arc ne s’inscrit pas moins dans un héritage qui a compté pour beaucoup au rayonnement de la France à l’étranger. Emblématique, elle illustre la fonction d'appui naval à l'action diplomatique qui échoit à tout bâtiment de la Marine nationale déployé à l’étranger. De Portsmouth à Port-Kelang, les officiers-élèves se sont ainsi initiés à une autre facette du métier, celle de représentant de leur pays.
«22 000 tonnes de diplomatie!»
Commissaire Pierre-Louis de Fenoÿl,
«L’appui naval à la diplomatie est incarné par le bâtiment de guerre à chaque interaction avec un pays étranger. Le champ d’action est naturellement plus large que celui de la seule escale. L'appui, le soutien naval à la diplomatie se concrétise par la seule présence de nos bâtiments «sur toutes les mers du monde». Au-delà des missions opérationnelles, elle se manifeste plus concrètement au travers des entraînements communs réalisés à la mer avec des marines étrangères, ce qui a été particulièrement le cas avec les nombreux entraînements conduits pendant cette mission.
Enfin, il est vrai que l'appui des navires de guerre est maximisé à l’occasion des escales, là où le bâtiment est le plus visible et… le plus accessible ! Ainsi, visites d’autorités, réceptions officielles, rencontres bilatérales ou multilatérales, formelles ou informelles, embarquements croisés, appui au rayonnement culturel ou diplomatique de l’ambassade ou encore activités de soutien aux exportations au profit de nos industries de défense sont autant d'activités auxquelles les marins sont rompus.
C’est en particulier cette polyvalence, manifeste dans le cas du BPC, qui fait qualifier le bâtiment de guerre de «meilleur des ambassadeurs*». Le rayonnement n’est pas une fonction accessoire, c’est un levier d’action majeur. Et pour qu’il joue à plein, il importe de restituer le sens, la finalité, les enjeux aux équipes qui y prennent part avant de leur distribuer des tâches. Commander c’est donner une direction; c’est aussi cela que nous inculquons aux officiers-élèves».
Comprendre les enjeux du soutien à l’industrie de défense.
À trois reprises au cours de la mission Jeanne d’Arc, le BPC Tonnerre facilite la promotion par les industriels français, de leurs matériels et savoir-faire aux décideurs d’Inde, de Singapour et de Malaisie.
Ces salons éphémères de soutien aux exportations se sont inscrits de manière cohérente dans le déroulé de la mission. Dans le cadre de la troisième phase de son déploiement, le groupe Jeanne d’Arc a assuré une présence en Asie du Sud-Est, zone stratégique, afin de participer au rayonnement de la France et de soutenir notre action diplomatique et l’industrie de sécurité et défense.
À Goa, Singapour et Port Kelang, le Tonnerre a ainsi permis à plusieurs industriels d’exposer et de proposer aux délégations invitées des visites du bord. Le BPC, véritable vitrine du savoir-faire français, a permis de faciliter les interactions entre les industriels et les décideurs politiques, économiques et/ou militaires des pays concernés. L’objectif de ces manifestations est de révéler aux décideurs étrangers la qualité, la fiabilité et la pérennité du matériel français qui équipe les bâtiments de la Marine nationale. Elles réunissent en un même lieu le matériel, le bâtiment qui en est équipé et les hommes qui le mettent en œuvre dans une partie géographiquement éloignée de l’hexagone.
La relâche opérationnelle : un moment-clé de l’apprentissage
Elève-commissaire Solène Neveu
«La relâche opérationnelle est le moment où l’on est probablement le plus sollicité, en amont et le jour même de l’escale. Il s’agit de s’assurer de l’approvisionnement du bâtiment en vivres, combustibles, matériels, et de régler les diverses procédures administratives parfois complexes (passeports, visas, autorisations d’accès, …). S’y ajoute un important travail de relations publiques sur les bâtiments ne disposant pas structure dédiée (accueil des autorités, conférence de presse, déplacements officiels, préparation de la réception…).
La fonction historiquement appelée "de cabinet" que nous expérimentons au cours des escales nous permet d'appréhender la conduite des activités liées à la bonne exécution des escales et des journées VIP à la mer. L'officier-élève en charge s’assure du bon déroulement de la journée, préalablement soigneusement séquencée. Il s’agit de planifier, organiser et orchestrer les mouvements d’autorités à bord, afin qu’elles ne se télescopent pas avec les autres activités du bâtiment (ravitaillement, formation, entrainement, etc.). Après l'appareillage, s'enchainent les différents comptes-rendus, lettres de remerciements, etc.
Comme toutes les mises en situation, c’est une expérience très responsabilisante, qui nous apprend à organiser, anticiper et mesurer l’importance d’une programmation détaillée. C’est aussi un bon exercice de résistance au stress et à la pression car il faut savoir aller vite et faire preuve d’adaptabilité et de réactivité quand cela est nécessaire.
Montrer le pavillon national est quelque chose porteur de sens, en particulier dans les pays où les bâtiments font rarement escale. C’est en particulier une belle occasion de montrer le savoir-faire français et de faire rayonner notre culture.
«Il y a eu un changement inévitable chez les officiers-élèves durant la mission. Il a fallu abandonner, dès le début, l’esprit «école» et se mettre dans un optique professionnelle. Cela a permis de gagner en confiance, en assurance, de commencer à acquérir une certaine technicité dans les domaines qui nous sont propres. La gestion d’un service et d’une compagnie sont indéniablement deux points forts qui nous ont été enseignés pendant cette mission ; nous avons été intégrés pleinement au service Commissariat (binômage avec un marin du service audit, commission de notation, , inspection de tranches, participation aux activités des différents bureaux, préparation et conduite des relâches…)».
Geneviève Iancu, Ambassadeur de France aux Seychelles. Quel est le meilleur conseil que vous pourriez donner aux officiers-élèves dans le domaine de la représentation et de la diplomatie? «Outre les connaissances spécifiques, il convient de maîtriser les enjeux géopolitiques et l’importance d’une présence navale régulière et visible dans les espaces de ‘’riveraineté’’. Connaître les prérogatives d’un État côtier et à l’occasion des escales, bien se coordonner avec les représentants locaux de la France, non seulement pour bénéficier d’un soutien logistique, mais également pour étudier en amont les meilleurs moyens de faire rayonner la France». |
Sources : © Marine nationale
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