Le commando porte le nom du capitaine de corvette Kieffer en hommage à la persévérance de cet officier qui a permis la création des commandos marine français au cours de la seconde guerre mondiale.
Philippe Kieffer est né en 1899 à Port aux Princes (Haïti). Après avoir été diplômé de hautes études commerciales, il est conseiller dans une de banque londonienne quand la seconde guerre mondiale éclate. Dès septembre 1939 et malgré son âge (40 ans), il décide de rejoindre la France puis l’Angleterre après l’invasion allemande. Il arrive à Londres le 19 juin 1940 pour s’engager dans les Forces Navales Françaises Libres (FNFL), le jour même de leur création, le 1er juillet 1940. Second-maître secrétaire de réserve, sa connaissance de l’anglais lui permet d’être officier interprète et du chiffre.
Toutefois, il préfère l’action et se montre fortement impressionné par les actions « coup de poing » et les raids menés par les commandos britanniques sur les côtes tenues par l’ennemi. Il persuade l’amiral Muselier, commandant les FNFL, de l’autoriser à entrer en négociation avec les Anglais pour former un corps composé de français volontaires, bâti sur les modèles des désormais célèbres commandos britanniques. Après avoir essuyé plusieurs refus, Kieffer est finalement convoqué au QG des Opérations Combinées et à force de persuasion et d’arguments il obtient l’adhésion des britanniques.
Il lui faut ensuite recruter des volontaires, les trier et les former. L’enthousiasme de Kieffer et des premières recrues permettent de commencer dès janvier 1942 une formation élémentaire puis de se perfectionner aux côtés des Royal Marines. En avril 1942 ils sont 28 fusiliers marins français « affectés » à un commando britannique et placés, pour instruction et emploi, sous les ordres de l’autorité britannique au camp d’Achnacarry, dans le Nord de l’Ecosse afin d’y suivre le stage COMMANDO. Douze semaines plus tard ils sont 27 fusiliers marins français à arborer le légendaire béret vert, porté à l’anglaise, badge à gauche. Dès juillet, ils intègrent le N°10 Commando une unité interalliée.
Suit la période des raids de harcèlement sur les côtes françaises, belges et hollandaises. Ces raids sont l’occasion de mettre en pratique les enseignements acquis durant les derniers mois mais surtout ils permettent de saper le moral de l’ennemi, d’évaluer sa résistance, de semer le trouble et de rapporter des renseignements ou même des prisonniers. La préparation et l’accomplissement de ces actions de sabotage et de reconnaissance sont alors la principale activité des commandos marine.
Le 8 octobre 1943, le 1er bataillon de fusiliers marins commandos est créé et les commandos marine français continuent à prendre part à des raids jusqu’en mars 1944, où l’ordre est donné de cesser ces actions pour s’entraîner intensivement aux opérations de débarquement. Le 1er BFMC rejoint alors à Bexhill les anglais du N°4 COMMANDO.
La mission du N°4 COMMANDO, qui s’inscrit dans l’opération OVERLORD, est fondamentale : débarquer en premier sur les côtes françaises, sur les plages de Sword, précisément au lieu-dit « La Brèche » (Colleville), à deux encablures à l’Ouest de Riva-Bella, pour ensuite prendre d’assaut Ouistreham, assurer la tête de pont puis faire la jonction avec les autres troupes débarquées ou parachutées. Le 4 juin, le général écossais Lord Lovat, commandant la 1ère Special Service Brigade, leur annonce qu’ils seront les premiers à débarquer sur le sol français, un honneur pour les 177 commandos marine français du 1er BFMC de Philippe Kieffer. Le 5 juin, répartis en deux troops, ils embarquement sur des péniches de débarquement. Débarqués à 7h55 le 6 juin, ils progressent dans Ouistreham dont ils prennent le contrôle dès 11H30. La colonie de vacances, le central téléphonique, le casino : tous les ouvrages fortifiés ou stratégiques sont neutralisés. Blessés deux fois le 6, Kieffer ne sera évacué que deux jours plus tard pour rejoindre rapidement ses commandos par la suite. Dans la journée du 6 juin, il a perdu 21 camarades et 93 sont blessés. Jusqu’à mi-août, les commandos de Kieffer se battent pour tenir la tête de pont à l’Est de l’Orne, à côté de leurs camarades commandos anglais ou parachutistes de la 6ème Airborne Division.
Suivent ensuite d’autres opérations comme l’attaque de Flessingue et la libération de Walcheren (décembre 1944). Le l8 juin 1945, le 1er BFMC défile avenue des Champs Elysées.
Le commando « Kieffer » a été créé officiellement le 08 mai 2008 en présence du président de la république M Nicolas Sarkozy, sur la plage de Ouistreham. Ce commando qui porte aujourd’hui le nom du « père » des commandos marine français est le plus récent des six commandos de la marine nationale. Le retour d’expérience des opérations et exercices menés par les commandos marine ces dernières années ainsi que l’émergence de nouvelles menaces ont fait naître le besoin de développer des capacités différentes. Ces capacités concernent des domaines particulièrement novateurs et complémentaires des savoir-faire déjà maîtrisés par les autres commandos. Désigné comme une unité de « de commandement et d’appui opérationnel », le commando Kieffer a pour objectif d’apporter une forte plus-value capacitaire à la FORFUSCO, à la marine et au COS. Son recrutement est étendu à toutes les spécialités de la marine et ponctuellement aux autres armées.
Tous ces éléments qui ont présidé à la création du commando Kieffer ont forgé très tôt un esprit propre à cette unité, à l’image du capitaine de corvette Kieffer et des qualités dont il a fait preuve en créant les commandos marine : un esprit pionnier par la création d’une nouvelle unité, une démarche innovante dans l’emploi des hommes et des moyens mais également le sens de l’initiative et le goût du défi face à une tâche imposante. Ainsi, les marins d’autres spécialités qui sont passés par le stage commando après avoir rejoint les rangs du commando « Kieffer » représentent un bel exemple de défi et de pugnacité. Cet esprit « Kieffer » des premiers temps règne encore au sein du commando et chacun de ses membres est animé par le souvenir brillant de leur illustre ancien dont ils sont fiers de porter le nom.
Depuis sa création le commando Kieffer a déjà participé aux opérations suivantes dans lesquelles il s’est illustré : au Tchad (2008), en océan Indien (lutte contre la piraterie, libération des otages du Tanit), en Afghanistan.
Sources : © Marine nationale
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