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Tiger Meet, édition 2011

Mise à jour  : 26/04/2011 - Direction : Armée de l'Air et de l'Espace

Du 9 au 20 mai 2011, le Tiger Meet se déroulera sur la base aérienne de Cambrai. Cet exercice otanien, le plus important organisé sur le sol européen, rassemblera quinze nations, dont la France, et 70 aéronefs.

Une plongée dans l'univers Tiger, Tiger, Tiger!

Le Tiger Meet en trois points

L'historique

À l’initiative du capitaine « Mike» Dugan, officier de l’US Air Force stationné à Woodbridge au sein du 79th Squadron, une invitation fut lancée aux escadrons dont l’emblème était un tigre afin de se retrouver pour des échanges opérationnels et culturels. Le 19 juillet 1961, le 74th Squadron britannique ainsi que le 1/12 «Cambrésis» répondaient présent. Ce premier rendez-vous, qui ne dura qu’une journée, a marqué le début d’une aventure humaine qui fut construite au fil des ans. Chaque année, ces rencontres ont pris une tournure plus opérationnelle et se sont agrandies pour accueillir de nouveaux escadrons. Certains apparentèrent même leur félin à un tigre pour bénéficier de cette opportunité, déjà unique à cette époque, de participer à un exercice interallié.

Depuis 1961, à quelques exceptions près liées aux contraintes opérationnelles (comme en 1995 ou en 1999 avec le théâtre de l’ex-Yougoslavie), les "Tigres" se sont réunis et n’ont cessé de faire évoluer cette rencontre pour qu’elle devienne ce qu’elle est aujourd’hui, le plus grand exercice interallié et interarmées de l’Otan sur le sol européen.
Les F-100D, les Lightning F.1 et les Super Mystère B2 ont laissé la place aux avions de chasse et aux hélicoptères les plus modernes, mais l’esprit de cette rencontre ne s’est jamais dénaturé avec le temps. Ce club n’a jamais cessé de poursuivre ses objectifs initiaux :

 - promotion de la solidarité entre les membres de l’Otan
 - recherche et maintien de liens forts entre le personnel des pays concernés
 - développement d’une meilleure interopérabilité au sein de l’alliance.

L'opérationnel

Le Nato Tiger Meet est devenu, avec le temps, l’un des plus grands exercices sur le sol européen. Rassemblant régulièrement plus de 15 nations différentes, l’ensemble des escadrons représente la quasi-totalité du domaine d’action dans la troisième dimension (défense aérienne, bombardement, reconnaissance, appui aérien, opérations spéciales, détection aéroportée, ravitaillement en vol, transport).

La mixité des moyens aériens offre la possibilité de réaliser, pendant deux semaines, des missions aériennes complexes, interallié et interarmées, au travers de scénarios réalistes rencontrés sur les théâtres d’opérations actuels ou répondant à des engagements potentiels. Ainsi, des scénarios mettant en œuvre un emploi large de la force ou la récupération de personnel, combattant ou non, en zone hostile, font partie des missions réalisées.
Cette année, pour la première fois sur le sol français, un réseau complet mettant en œuvre la Liaison 16 sera déployé. Occasion rare de rendre interopérable autant de nations et d’aéronefs dans des missions complexes. La Liaison 16 devient désormais incontournable dans les opérations modernes. La mise en réseau des moyens offensifs ou défensifs améliore nettement l’efficacité opérationnelle dans des engagements de plus en plus complexes.
L’exercice militaire c’est aussi le soutien, de plus de 1 000 participants étrangers et français. L’hébergement se fait en camp de toile de type opération extérieure pour être encore plus près de la réalité du terrain. La préparation logistique qui permet d’héberger, de nourrir et de faire opérer ce millier de participants est une manœuvre complexe, mais elle contribue également à l’entraînement du personnel en charge du déploiement de ces capacités.

Cette dimension opérationnelle fait du Nato Tiger Meet de nos jours, l’équivalent d’un Maple Flag ou d’un Red Flag itinérant sur le sol européen ou otanien.
Le volume d’appareils mis en œuvre, l’activité quotidienne, la diversité, le niveau technologique, le niveau tactique donnent au Nato Tiger Meet un crédit qui ne demande plus à être démontré. C’est d’ailleurs cette crédibilité acquise au fil du temps, associée à une réelle plus-value opérationnelle, qui justifie que les nations continuent d’envoyer leurs unités "Tigres" à cet exercice unique.

L'esprit "Tigre"

Chaque année, l’organisation du Nato Tiger Meet revient à l’un des escadrons appartenant à la Nato Tiger Association. C’est ce côté «itinérant» qui fait de lui un exercice unique en son genre puisqu’il parcourt l’Europe d’année en année.

Le Nato Tiger Meet est, de par ses origines, une communauté à part entière et surtout, un état d’esprit. On appelle cela le «Tiger Spirit». Sous cette expression quelque peu abstraite se cachent de grandes valeurs chères aux «Tigres» telles que fraternité, cohésion et traditions. En cela également, le Nato Tiger Meet est unique: il s’agit du plus gros exercice aérien interallié en Europe qui rassemble et fédère des centaines de personnes venant de pays différents, ayant des cultures différentes mais qui, malgré tout, travaillent dans le même état d’esprit.

Le Nato Tiger Meet, c’est aussi l’occasion pour les différents escadrons de se mesurer les uns aux autres et ce, toujours dans un esprit de franche camaraderie. En effet, les participants concourent dans plusieurs catégories aussi diverses que variées telles que la meilleure performance en vol bien sûr, mais également le plus bel avion peint, le meilleur sketch que présente chaque escadron lors d’une soirée appelée «Skit Night», les «Tiger Games» qui sont des jeux sportifs et originaux organisés en dehors de l’activité opérationnelle et enfin, la meilleure tenue confectionnée spécialement pour l’occasion. À la fin de l’exercice, chaque unité vote pour désigner les escadrons vainqueurs dans chaque catégorie et c’est pendant la dernière soirée que les trophées sont décernés aux heureux élus.

 Le Nato Tiger Meet, ce sont également deux sculptures uniques représentées par un tigre sur pied. Le «Bronze Tiger» qui est remis à l’escadron organisateur au début de l’exercice par l’unité l’ayant organisé l’année précédente. L’organisateur le conserve jusqu’à l’édition suivante. Et enfin, le «Silver Tiger», récompense suprême, qui est décerné à la fin de l’exercice en même temps que les autres trophées. Celui-ci rend hommage à l’escadron ayant démontré le meilleur état d’esprit, le fameux «Tiger Spirit», sur l’ensemble de la période.

Les coulisses du Tiger Meet 2011

Bâtir une véritable ville en quelques mois

Pour que le Tiger Meet 2011 se déroule sans anicroche le jour J, la base aérienne de Cambrai a fourni, plusieurs mois en amont, une prestation digne des plus grands leaders de l’événementiel. Bâtisseurs, restaurateurs, transporteurs  ou encore, informaticiens se sont investis pour monter une véritable ville capable d’abriter un millier d’hôtes étrangers.

La période du 9 au 20 mai est à marquer d’une croix sur le calendrier 2011 de la base aérienne de Cambrai. Celle-ci pulse au rythme du Tiger Meet, le plus gros exercice otanien organisé sur le sol européen. Il bat son plein grâce à la présence des escadrons de la communauté « tigre » venus de tous les coins du monde et rassemblant des aviateurs de 15 nations. Pas moins d’un millier de personnes en plus des effectifs habituels foulent le sol de ce site arboré dédié à la mission de défense aérienne. Mais pour que les rouages de cet événement opérationnel s’imbriquent, un gigantesque puzzle logistique s’est mis en place de nombreux mois avant la date fatidique. Pour les acteurs de cette préparation minutieuse, le compte-à-rebours a été enclenché dès octobre 2010. Le défi ? « Installer en quelques mois une deuxième base aérienne pour accueillir un gros volume de personnes à nourrir et à loger », annonce le lieutenant-colonel Paul Pépy, commandant en second de la base. En d’autres mots, ériger une véritable mini-ville.
Maître d’ouvrage, le lieutenant-colonel Jean-Sébastien Dorne, adjoint au chef du soutien technique, a esquissé en étroite collaboration avec l’escadron de chasse 1/12 «Cambrésis » les plans du chantier Tiger Meet. Son crédo ? Organisation et anticipation. Il a commencé par identifier les acteurs impliqués dans ce plan d’urbanisation pour déterminer quels seraient ses interlocuteurs. Puis, il leur a demandé de monter un cahier des charges afin de cloisonner les responsabilités et de déterminer les besoins. « Rien ne peut se passer sans que chacun des acteurs ne soit au courant », affirme-t-il. Pour favoriser cet échange, il a mis en place une réunion technico-logistique hebdomadaire. L’objectif ? « Acculturer » le personnel aux enjeux et lui offrir une tribune pour se concerter. « Le diable est dans les détails, aime-t-il à répéter. Il faut donc tous les explorer pour éviter la dégradation d’une situation au dernier moment. » Et d’ajouter, « progressivement, nous avançons, un peu comme pour la construction des pyramides ».
À la place des ouvriers égyptiens en pagne, des militaires de la compagnie d’infrastructure en opérations (CIO) venus en renfort de Bordeaux. En plusieurs points du site, ils s’activent, le casque sur la tête, le marteau à la main et la blouse jaune fluo par-dessus la tenue réglementaire. Ici, le camp de toile surnommé Tent City, véritable ville-champignon. Outre l’insuffisance des infrastructures existantes, sa création résulte de la volonté des organisateurs de reproduire les conditions de vie en opération extérieure. Élément clef du dispositif, cet espace de vie a été construit de toutes pièces : 142 tentes alignées pourvues d’éclairage et de climatisation sur l’ancienne piste allemande habituellement à l’abandon, que se partageront environ 900 des participants. Deux bandes de béton armé se croisent à angle droit, formant une surface de 70 000 m2 que les membres de la CIO ont percé de 5 580 trous, soit 40 trous par tente. Suivant les besoins exprimés par le plan d’aménagement, ils ont également délimité une zone « hygiène », comprenant 80 douches et lavabos, et six laveries de campagne, ainsi qu’un espace « détente » de huit bungalows. Du côté du « Cambrésis », c’est le Tiger Village, qui se monte. Les bâtisseurs de la CIO y élèvent le pare-soleil, une structure de 270 m2 comprenant trois armatures métalliques recouvertes de 12x15 m2 de textile étanche pour protéger les équipements de réfrigération du mess temporaire. Mais la liste du plan d’occupation des sols ne s’arrête pas là. Reste encore le volet « voirie ». Pour alimenter le tout en énergie, les techniciens ont également installé deux centrales électriques (haute et basse tension) et deux stations de traitement et de potabilisation des eaux pour fournir de l’eau propre à la consommation humaine.
Autre enjeu : nourrir un millier de personnes en plus, trois fois par jour . Un challenge que les spécialistes des métiers de bouche de la base et la lieutenant Émilie Villenet, chef de la division « soutien de l’homme », ont relevé. Dès 2010, le niveau de prestation attendu était précisé, déterminant besoins et coûts. « Pour les professionnels de la restauration, les repas correspondent à un certain type de protocole, explique la jeune femme. Le besoin diffère s’il s’agit d’un repas de gala ou non par exemple. » Elle a ainsi dû faire des choix en fonction des prestations : simplifier les menus, effort de présentation des assiettes pour la partie VIP, etc. La création d’un mess temporaire au sein du Tiger Village s’est, en outre, imposée comme la solution la plus pratique et économique, avec l’utilisation d’une cuisine de campagne, de camions de livraison pour les transports de denrées et de capacités de stockage. Elle a également multiplié ses effectifs par deux. Chargés de la composition des menus et de la préparation des repas, les techniciens des saveurs ont la tâche délicate de satisfaire les papilles gustatives de centaines de militaires. « En tant que Français, nous avons une réputation à soutenir, prévient le lieutenant. Le Tiger Meet permet de mettre en avant les compétences qui sommeillent. » La gastronomie française impose de ne pas privilégier la quantité au détriment de la qualité. Il s’agit donc de proposer des produits locaux (bêtises, quiches au maroilles…), mais aussi, de savoir respecter les spécificités des hôtes étrangers en aliments à proscrire. De plus, le lieutenant Villenet veille à appliquer les règles d’hygiène alimentaire inhérentes à la restauration collective : respecter la chaîne du froid et du propre, procéder aux contrôles habituels (échantillonnage, prise de températures).

Condition sine qua non pour qu’une cité fonctionne, l’existence d’équipements de service. La responsabilité de la création d’un réseau de transport en commun quotidien incombe au capitaine Gérard Piffet, commandant de l’escadron de soutien technique commun. Les rotations doivent pouvoir s’appliquer à des journées standard comme à des événements particuliers, sur le site de la base comme à l’extérieur. Dans le premier cas, « le calcul des rotations est directement lié à la capacité d’absorption du mess temporaire et aux horaires établis par les organisateurs ». Dans le deuxième, « le système de navette est impossible à l’extérieur, il faut organiser un bouquet de bus en convoi tout en prenant la contrainte des délais en compte, précise-t-il. Le début d’un événement doit correspondre à l’arrivée du dernier bus par exemple. » Pour parer à cette extraordinaire demande, le capitaine Piffet a réquisitionné 20 bus supplémentaires, d’autres bases, et leurs chauffeurs respectifs. Des recrues qu’il a fallu former. « Je dois assurer le meilleur service tout en gardant un œil sur la sécurité », souligne-t-il. Pour maximiser cette sécurité et renforcer le respect du code de la route, il a travaillé avec le capitaine Francis Dolet-Fayet, chef du bureau « coordination logistique ». Ensemble, ils ont conçu un plan de circulation. Réservations d’axes routiers pour les véhicules d’urgence, panneaux de signalisation adaptés, zones de parking dédiées ou sans circulation ou dispositif d’enlèvement de voitures sont autant d’items visant à éviter embouteillages, contentieux et accidents.
Avec près d’une centaine d’avions dans les starting-blocks chaque jour, un autre maillon de la chaîne est sollicité : le dépôt des essences des armées (DEA). Pour la préparation du Tiger Meet, le lieutenant Renaud Vigouroux et son équipe ont tout d’abord dû procéder à l’estimation du carburant à fournir, en fonction des aéronefs et de leur consommation. Premier impératif, appliquer une table de conversion. Les pilotes parlent de kilos, le SEA de litres. Par ailleurs, les Français utilisent les tonnes alors que pour les étrangers ce sont des pounds. En fonction du planning des vols hebdomadaires, le calcul a abouti à un débit quotidien de 7 000 m3. L’étape suivante a consisté à répartir les rotations des camions-citernes, incluant la dizaine demandée en renfort. « Le créneau entre le dernier poser du matin et le premier décollage de l’après-midi est très court, rapporte le lieutenant Vigouroux. En outre, le remplissage des réservoirs est chronométré : 20 minutes de chargement des cuves aux camions, 20 pour la décantation, 10 consacrées aux tests et 15 pour le trajet entre le DEA et la piste ainsi que pour le transfert de kérosène. L’ajout du liquide anti-glace et le plan de gestion des bacs corsent encore l’affaire. »
La réussite du Tiger Meet repose également sur des systèmes d’information et de communication fiables. L’antenne du centre interarmées des réseaux d’infrastructure et des systèmes d’information se trouve donc au cœur de l’action avec la responsabilité d’une installation délicate. Peu nombreux, les aviateurs de l’antenne ont débuté, en janvier, les raccordements téléphoniques entre les participants, les bases, la métropole et l’extérieur. Surtout, ils se sont attelés à la colossale tâche de connecter 180 ordinateurs et d’en assurer l’intégrité. Le besoin est avant tout opérationnel. La préparation des scénarios, les briefings, le contact des nations étrangères avec leur pays et surtout, cette année, le test de la liaison 16, sont autant de raisons de mettre en place un maillage national et international. Il a donc fallu connecter les ordinateurs en réseau sur Internet, Intradef, ainsi que sur un troisième spécifique aux pilotes et aux mécaniciens. Ils ont aussi augmenté le débit Internet et câblé les 80 abris modulaires de poste de commandement installés à Tiger Ops’. L’intégrité de ces réseaux a été garantie par une politique de sécurité élevée (interdiction d’utiliser des clefs USB ou du matériel personnel, installation de stations blanches, activation d’un contrôle de consultation des sites Internet, filtrage par pays avec système de login, mot de passe et comptes nominatifs …).
Dans une opération de cette envergure, les moindres obstacles doivent être surmontés. Les forces expriment un besoin auquel les services doivent s’adapter. Grâce à leur savoir-faire et à leur professionnalisme, ces besoins ont tous été concrétisés.

Texte : ltt Virginie Gradella
Photos : BA 103 - Cambrai

Interviews

Interview du lieutenant-colonel Dorne (format pdf, 56.67 KB).

Interview du commandant Pettavino (format pdf, 47.74 KB).

Dossier coordonné par le ltt Virginie Gradella et le ltt Justine Menon-Bertheux


Sources : Armée de l'Air et de l'Espace
Droits : Armée de l'Air et de l'Espace