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Rendez-vous en terre glacée pour l’A400M Atlas

Mise à jour  : 12/12/2014 - Auteur : Lieutenant Christelle Hingant - Direction : Armée de l'Air et de l'Espace

Du 1er au 4 décembre 2014, le centre d’expériences aériennes militaires et son équipe de marque avions de transport tactique (EMATT) ont mené une mission d’expérimentation sur l’A400M Atlas. Le nouvel avion de transport de l’armée de l’air, ses équipages et ses mécaniciens avaient rendez-vous au Nord de la planète.

  • Une grande première
  • La maintenance à rude épreuve
  • Piloter au large de l’Arctique
  • En images

Une grande première

Canada, 1er décembre 2014, -15°C. La base aérienne enneigée de Goose Bay s’apprête à accueillir l’A400M Atlas. Après huit heures de vol et une traversée de l’Atlantique, les équipages de la base aérienne 123 d’Orléans-Bricy se posent à 13 heures (heure locale) sur le tarmac glacé. En soute, les mécaniciens revêtent gants, combinaisons, chaussures fourrées et s’apprêtent à affronter le froid. Un froid glacial auquel se frotte l’Atlas pour la première fois. « Évoluer en température négative est une occasion qui ne s’est pas présentée depuis la réception de l’avion par l’armée de l’air, concède le lieutenant-colonel Olivier L., adjoint au chef de l’EMATT. Notre objectif est d’expérimenter le comportement de l’aéronef en atmosphère froide et de valider les procédures associées, d’une part, à la partie technique et à la maintenance et, d’autre part, à la partie navigante et au pilotage. Nous en profitons pour agrémenter la documentation du constructeur d’ajouts spécifiques à l’utilisation de l’appareil par l’armée de l’air. » Cette mission est l’illustration parfaite du quotidien des experts de l’EMATT. « L’ensemble des procédures employées par les escadrons, en opérations ou en entraînement, sont préalablement expérimentées par l’équipe de marque », précise le capitaine Jean-Philippe R., copilote.

Deux destinations ont été identifiées par l’unité pour mener à bien cette mission. D’un côté, le Canada (Happy Valley-Goose Bay) et son climat sec aux températures négatives et, de l’autre, la Norvège (Tromso et Bardufoss) et son temps humide et neigeux. « Nous avons opté pour deux types de terrains différents afin de mixer au mieux les possibilités et d’élargir notre panel de connaissances », souligne le lieutenant-colonel L. Après une journée au nord du Canada, le détachement a donc pris la direction du nord de l’Europe en longeant les frontières de l’océan Arctique. Au fil de cette mission d’expérimentation, chacun des participants, toutes spécialités confondues, a mis à profit son expertise pour approfondir son domaine de compétences. « Cette mission a été très enrichissante, tant pour les techniciens que pour les pilotes, confie « à chaud » le second de l’EMATT. Maintenant, nous allons chercher des solutions pour pallier les difficultés rencontrées sur le terrain. » Un véritable travail d’équipe qui aboutira à l’élaboration d’un guide à l’usage des forces, dans lequel figureront les recommandations de l’EMATT et les points particuliers liés à l’emploi de l’Atlas en temps froid.

La maintenance à rude épreuve

Parmi les 17 aviateurs à bord, huit mécaniciens de l’escadron de soutien technique aéronautique « Loiret » répondent à l’appel. Spécialistes en avionique, vecteur ou servitude, ils assurent la maintenance de l’Atlas en employant des procédures spécifiques à ce climat extrême, avec, en ligne de mire, la protection de l’avion. À peine les hélices arrêtées, les mécanos parcourent l’appareil de long en large et de haut en bas. Pendant que certains purgent les liquides et vérifient les joints, d’autres installent une cinquantaine de caches de part et d’autres de la carlingue, allant même jusqu’à grimper sur ce géant des airs pour installer des protections à l’aide d’un harnais. L’avion est alors mis en condition « temps froid ». « Nous contrôlons également l’ensemble des systèmes électroniques de l’avion pouvant être sensibles aux températures négatives, ajoute l’adjudant-chef Laurent L. La mesure des pneumatiques ou encore le retrait des trois batteries s’ajoutent aussi à notre check-list. »

Cet ensemble de mesures sera réitéré à l’inverse avant chaque vol, d’autant plus que l’aéronef aura été exposé au froid pendant plusieurs heures. Au Canada par exemple, les températures relevées à l’aube (-18°C dans la soute et -15°C dans le cockpit) en disent long sur la nuit qu’a passée l’Atlas, recouvert de givre. Pour éviter tout choc thermique, l’avion et ses multiples systèmes électroniques sont donc peu à peu mis sous tension avant de prendre la direction de l’aire de dégivrage. « C’est la première fois que nous allons dégivrer l’Atlas, confie le lieutenant-colonel L. Nous souhaitons obtenir un retour d’expériences pour conseiller au mieux les escadrons et les utilisateurs. » Et un mécanicien de préciser : « Nous commençons par appliquer une couche de dégivrage pour nettoyer l’avion. Ensuite, nous projetons un fluide antigivrage pour protéger l’aéronef pendant le décollage. En vol, c’est son propre système qui prend le relais. Cette mission d’expérimentation est un cas concret pour s’exercer à cette procédure. » Dans ce climat glacial, l’équipe de l’EMATT a dû instaurer un rituel approprié avant chaque vol, impliquant, par exemple, la nécessité de remettre en route rapidement les moteurs, immédiatement après cette phase de dégivrage, afin d’éviter que l’appareil givre de nouveau.

Piloter au large de l’Arctique

« L’expérimentation a commencé ce matin, et, dès le premier atterrissage au Canada, nous allons apprendre beaucoup de choses », s’enthousiasme le lieutenant-colonel Olivier L., adjoint au chef de l’équipe de marque avion de transport tactique. À ses côtés, cinq autres pilotes ont pris part à la mission : trois de l’EMATT, un de l’escadron de transport 1/61 « Touraine » et un autre du centre d’instruction des équipages de transport. Un équipage mixte prêt à parcourir plus de 12 000 kilomètres autour du cercle polaire.

Si les mécaniciens effectuent leurs actions de maintenance dans un environnement totalement nouveau, il en est de même pour les pilotes de l’Atlas. Se poser sur une piste gelée, utiliser des aires aéronautiques « contaminées » (NDLR : terme aéronautique qualifiant une piste dont plus de 25% de la surface est couvert de neige, de glace ou de plus de 3 mm d’eau) ou encore mettre en route l’aéronef dans un climat glacé sont autant de manœuvres impliquant des procédures spécifiques et des précautions particulières. « Atterrir sur un terrain glissant nécessite par exemple de se poser d’une manière assez ferme, poursuit l’officier. Rouler sur des taxiways et des parkings enneigés va nous permettre de compléter notre documentation ». Par ailleurs, le calcul des performances de l’Atlas doit également être approfondi. En effet, il dépend en partie de la qualité de la piste d’accueil. « Le tarmac peut être mouillé, glacé ou, comme nous avons pu le constater, une combinaison des deux. Il est indispensable de définir des performances théoriques au plus proche de la réalité ».  

Au-delà des expérimentations liées au temps froid, les pilotes ont profité de cette mission pour valider des procédures déjà élaborées et pour ajouter une corde à leur arc en consolidant leur formation. « En Norvège, les pistes d’atterrissage sont situées dans des cuvettes, précise le lieutenant-colonel L. Les pentes d’approche équivalent à 4° environ, ce qui diffère des 3° habituels. C’était l’occasion pour l’équipage de s’entraîner aux commandes de l’Atlas. » Par ailleurs, lors des traversées de l’Atlantique, l’équipage a observé comment le mastodonte de l’armée de l’air s’intégrait dans les routes transatlantiques, empruntées également par les vols commerciaux. « Les contrôleurs nous ont maintenu à un niveau bas, laissant les avions de ligne évoluer à une altitude supérieure, explique le pilote. Cette information est à prendre en compte par les escadrons pour qu’ils adaptent leurs besoins en pétrole (NDLR : plus un aéronef vole bas, plus il consomme de pétrole)»

Le bénéfice tiré de cette expérimentation « temps froid » fait l’unanimité chez les pilotes. Prochainement, ils se pencheront sur les vols basse altitude et l’utilisation des jumelles à vision nocturne aux commandes de l’Atlas.

Les températures en soute sous étroite surveillance

Pendant le premier vol, alors que les températures extérieures avoisinent les -55°C, les loadmasters (mécaniciens d’équipage soute) relèvent les températures à l’intérieur de l’Atlas. Répartis le long des 17 mètres de la soute, les thermomètres sont observés toutes les heures, de la tranche arrière à la loadmaster work station. « Lors de vols précédents, nous nous sommes aperçus qu’au fond, près du rideau, le niveau de température peut baisser considérablement par rapport aux autres endroits de la soute, confie le lieutenant-colonel L. Nous devons nous assurer que les passagers voyagent dans des conditions correctes et acceptables. »

En images


Source : Armée de l'Air et de l'Espace
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