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Témoignage d’un officier contrôleur des opérations aériennes

Mise à jour  : 04/02/2021 - Auteur : armee de l Air et de l Espace - Direction : Armée de l'Air et de l'Espace

Le lieutenant Mathilde est officier contrôleur des opérations aériennes (COA). Elle intègre le Centre de détection et de contrôle en tant qu’officier sur la base aérienne 942 de Lyon-Mont Verdun en 2019. Elle livre aujourd’hui un témoignage sur ces deux années écoulées « à une vitesse grand V qui ne [lui] font pas oublier son passé de sous-officier ».

S’intégrer dans la mission quotidienne : entraînement et défense du territoire

« Après avoir retrouvé mes premières qualifications de surveillance et de contrôle aérien en quelques semaines, j’ai pu intégrer l’une des deux équipes opérationnelles qui œuvrent nuit et jour pour garantir la souveraineté de notre espace aérien national. Et c’est là que tout commence : la mission pour laquelle on s’engage, la vie en équipe … et au départ, il n’est pas chose facile que de s’intégrer dans cette fourmilière.

Comme chaque matin, une fois l’équipe montante briefée sur l’activité aérienne du jour, la météo, les maintenances, les exercices et opérations de défense aérienne, chacun rejoint son poste en salle d’opérations, enterrée à 100 mètres sous terre, pour relever l’équipe descendante, les yeux cernés et étourdis après une nuit éveillée à surveiller le ciel du sud de la France. C’est à ce moment-là que la salle se réchauffe et que tous s’activent : des téléphones qui résonnent simultanément pour briefer des missions ou transmettre des informations, des écrans d’ordinateurs qui s’animent et des voix qui s’échangent des consignes avec l’équipe de la veille. Certains prennent place à la travée surveillance où plusieurs opérateurs surveillent scrupuleusement les quelque 10 000 à 15 000 aéronefs qui survolent notre ciel français chaque jour, quand d’autres prennent le casque pour contrôler la première mission tactique de la journée.

Chaque jour, nous guidons des avions de chasse lors de phases de combat d’entraînement, de ravitaillement en vol ou, plus mouvementé, dans le cadre d’une mission de sûreté aérienne avec la permanence opérationnelle, communément appelée la police du ciel.

Une fois les entraînements terminés, en fin de journée, voir tard le soir, on entre alors dans une phase de veille opérationnelle. Quelques membres de l’équipe sont désignés pour rester sur place en fonction des qualifications qu’ils détiennent en salle, car la mission opérationnelle, elle, n’est pas terminée. Ces derniers vont se relayer toute la nuit pour continuer à veiller sur le ciel, à surveiller les fréquences de détresse et suivre l’état de nos moyens techniques (radio, radar, etc.). Parfois, simplement pour reprendre en compte le contrôle d’un chasseur ou d’un hélicoptère de police du ciel que nous devons guider jusqu’à un avion “contrevenant à la sûreté du territoire français”.

Pendant ces 24 heures, mon équipe représente donc un maillon essentiel de ce qu’on appelle la posture permanence de sûreté Air. Il est de notre devoir d’être préparés, de s’entraîner pour se tenir prêts, car nous gardons tous quelque part en tête le scénario catastrophe du 11 septembre 2001. En 24 heures de présence au travail, nous dormons environ quatre heures, avant d’être relevés par l’équipe montante. La garde prend alors fin, jusqu’au lendemain !

En tant qu’officier, la progression dans les postes de responsabilités en salle se veut rapide. Nous débutons en tant que chef de travée (surveillance puis contrôle) le jour et chef de quart la nuit. Nous sommes donc amenés à moins contrôler des aéronefs par rapport à un sous-officier, le but étant davantage de superviser et d’encadrer nos sous-officiers contrôleurs eux-aussi.

Au fil des prises d’alerte, des missions de contrôle aérien et de mon rôle de chef de travée, je suis parfois en prise au doute et au stress. C’est là que l’esprit d’équipe est fondamental. On observe, on apprend et on se nourrit du savoir-faire des anciens. Je comprends alors très vite que la remise en question est constante dans ce métier, car nos actes ou non-actes peuvent coûter cher. Paradoxalement, c’est aussi la raison pour laquelle ce métier est si excitant au quotidien. Chaque jour est différent et on sent que la tâche ne se limite pas à soutenir l’entraînement des équipages des aéronefs.

        

Être projetée

Huit mois seulement après mon arrivée en équipe, alors que je m’intègre doucement à ma vie au CDC, je sors de l’ouvrage enterré pour rejoindre le JFACC AFCO (Joint Force Air Component Command – Afrique Centrale et de l’Ouest). Cette unité, également implantée sur la base aérienne de Lyon, centralise le commandement, la planification et la conduite des opérations aériennes en Afrique Centrale et de l’Ouest.

Cette première mission est l’occasion pour moi de découvrir un autre volet des opérations aériennes, celui d’un théâtre d’opérations. Durant deux mois, je prends place au sein de ce dispositif dans lequel je découvre une tout autre atmosphère. L’expérience acquise me permet, neuf mois plus tard, d’effectuer ma première opération extérieure. Je m’envole alors pour le Tchad dans le cerveau même de l’opération Barkhane, au PCIAT (poste de conduite interarmées de théâtre). C’est à partir de ma position de spécialiste Air que je coordonne avec le JFACC AFCO la mise en œuvre de nos moyens aériens au profit des forces terrestres dans la bande sahélo-saharienne. J’entre dans une autre dimension : nous sommes loin de la France, il y a très peu de femmes et je me rends bien compte que les enjeux sont énormes là aussi.

Ces deux détachements sont à nouveau l’occasion d’apprendre, de rencontrer d’autres milieux, de m’intégrer aussi, mais ce qui me semblait être un cercle sans fin au départ me rappelle, avec le recul, à quel point ce métier de militaire n’est pas monotone. L’expérience professionnelle sur le “terrain”, les rencontres, sortir de “sa zone de confort”, cela peut paraître désagréable et déroutant, pourtant, c’est aussi ce qui nous fait grandir et nous anime au quotidien.  

J’entame à présent ma troisième année au CDC où il me reste encore de nombreuses qualifications à obtenir et autant de défis à relever ! Pourtant, je mesure à quel point nous avons tous un rôle à jouer au sein de l’armée de l’Air et de l’Espace, parfois bien au-delà de ce que j’imaginais avant de me lancer dans l’aventure !


Sources : armee de l Air et de l Espace
Droits : armee de l Air et de l Espace