Année des Outre-mer : changer de regard. Entretien avec Vincent Campredon.

SGA/COM : Le 12 janvier dernier, Brice Hortefeux, ministre de l'intérieur et de l'Outre-mer, présentait à la presse « 2011 Année des Outre-mer. Pouvez-vous nous donner les enjeux de cette valorisation de la France Outre-mer ?

Il s’agit de mettre en lumière les atouts incontestables de ces territoires pour notre pays, en présentant les sociétés et les cultures d’Outre-mer dans la dynamique de leur modernité et de leurs traditions.

Le fil conducteur de cette année des Outre-Mer est de mieux faire connaître, de faire partager et de « faire rencontrer » la France des Outre-mer à tous les Français. Une rencontre non seulement entre métropolitains et ultramarins mais également entre ultramarins. D'ailleurs, nous ne parlons plus de l'Outre-mer mais des Outre-mer afin de souligner à nos compatriotes la diversité et la spécificité de ces territoires.

Cette année d'échanges et de découverte entre Français est une occasion et une opportunité pour favoriser le changement de regard sur les Outre-mer.

Les métropolitains connaissent mal les Outre-mer. Ils ont un certain nombre de clichés et de préjugés sur ces territoires. Nous les invitons à changer de regard. Pour nombre de nos concitoyens, l'Outre-Mer coûte cher et se résume aux plages bordées de cocotiers, aux catastrophes naturelles ou aux problèmes sociaux. Alors que les Outre-mer représentent avant tout une richesse extraordinaire. Que ce soit en termes stratégique, géopolitique, économique, culturel, historique et environnemental etc.

SGA/COM : La Guadeloupe a connu en 2009 une situation sociale tendue durant de longues semaines. Ces événements ont-ils un lien avec cette « 2011 année des Outre-mer » ?

A la suite de cette crise sociale, des états-généraux, exercice inédit de réflexion et de proposition, et un conseil interministériel de l’Outre-mer présidé par le Chef de l’Etat ont vu le jour. 137 mesures ont été décidées dont celle de faire de 2011 l’année des Outre-mer. Leur ambition : bâtir une nouvelle relation entre la métropole et l’Outre-mer. Le Président de la République a déclaré à cette occasion son « engagement constant et régulier pour l’Outre-mer, fondé sur un rapport d’égal à égal, un rapport de maturité, de confiance mutuelle ».

SGA/COM : Marie-Luce Penchard, ministre chargé de l'Outre-mer parle de «mieux faire connaître la contribution de ces territoire à la grandeur de la France. Quels sont ces apports ?

L’Outre-mer montre une France plus grande, plus diverse, plus belle, plus riche, et participe à notre rayonnement au-delà des mers.

La répartition des Outre-mer sur l'ensemble du globe confère à la France un rôle géopolitique et stratégique majeur. A l’heure de la mondialisation et des échanges économiques globalisés, les territoires ultramarins peuvent faciliter les échanges avec de nombreux pays voisins. Je pense à la Réunion avec l’Ile Maurice, à la Nouvelle-Calédonie avec la Nouvelle-Zélande ou encore à la Guyane avec le Brésil.

La France possède le second espace maritime le plus vaste derrière les Etats-Unis. C’est la France des trois océans ! Là encore, ces espaces nous permettent de jouer un rôle de premier plan avec une richesse immense en matière de biodiversité et des ressources halieutiques exceptionnelles. Qui sait que la deuxième pêcherie française en valeur est la pêche à la légine dans l'Océan Indien grâce aux îles Kerguelen ?

De nombreuses innovations sont menées Outre-mer pour développer les énergies renouvelables. Notamment l’énergie des mers. Objectif : atteindre l’indépendance énergétique de nos territoires ultramarins dans 20 ans.

Historiquement, les Outre-mer ont étroitement participé à l’Histoire de France en contribuant aux combats pour la citoyenneté et l’émancipation, puis plus tard à la Résistance. Leur Histoire est liée à celle de la France. La colonisation et la décolonisation sont de parfaits exemples. La lutte contre la traite négrière et contre l’esclavage – aboli en 1848 – également. Nous célébrons cette année le 10^ème anniversaire de la loi du 21 mai 2001 qui reconnaît la traite négrière et l’esclavage comme crime contre l’humanité. Loi qui a permis à la France d’engager un travail de mémoire décisif.

Pendant la seconde guerre mondiale, les Outre-mer ont très tôt rallié le Général de Gaulle. Dès le 18 juin 1940, Félix Eboué, gouverneur du Tchad, se déclare partisan et rallie le Général. A l'image des Antilles, très tôt entrées dans la Résistance avec ses « dissidents ». Rappelez-vous également l'amiral Muselier qui rallia le 24 décembre 1941 Saint-Pierre-et-Miquelon à la France libre. L'histoire du bataillon du Pacifique. Tout l'Outre-mer a participé au deuxième conflit mondial.

Enfin, souvenons-nous de ces grands hommes d’Outre-mer qui ont fait la France et sa grandeur. Je pense en particulier à Aimé Césaire, dont un hommage solennel vient d’être rendu au Panthéon par le Président de la République, à Gaston Monnerville qui fut président du Sénat de 1959 à 1968, à Louis Delgrès, abolitionniste qui a combattu Napoléon jusqu’à la mort, respectant ainsi sa devise « vivre libre ou mourir ».

SGA/COM : Nombre de manifestations vont célébrer cette année des Outre-mer. Pouvez-vous nous en dire plus sur vos actions ?

Plus de 500 événements sont programmés dans le cadre de cette année des Outre-mer.

Je participe avec le ministère de la Défense à la préparation de 4 manifestations majeures en tant que conseiller Défense : la commémoration du ralliement des Outre-mer à l’appel du Général de Gaulle le 18 juin, le cinquantenaire du Service militaire adapté (SMA) le 13 juillet, le défilé militaire du 14 juillet sur le thème de l’Outre-mer et, avec la Marine nationale, une exposition des peintres officiels de la Marine. Envoyés dans les 12 territoires peindre « les couleurs des Outre-mer », leurs oeuvres seront exposées du 2 décembre 2011 au 8 janvier 2012, au musée de la Marine à Paris.

SGA/COM : Quelle est la symbolique du sigle de cette année des Outre-mer ?

Le logo représente les 12 lumières des 12 Outre-mer français. Symboliquement, elles éclairent les Français sur l'apport de ces territoires à la France et mettent « en lumière » leurs atouts incontestables pour notre pays.

SGA/COM : Quelques mots pour conclure.

La conviction que les Outre-mer représentent une véritable richesse pour notre pays, qu’ils méritent d’être mieux connus et appréciés de tous les Français. Et, comme marin, la conviction que les Outre-mer sont une véritable chance pour la politique et l’ambition maritimes de la France.