En métropole comme en outre-mer, la Marine poursuit aujourd’hui un double objectif : assurer ses missions avec la même exigence tout en appliquant les mesures sanitaires interministérielles pour lutter contre le Covid-19. Au cœur du système de combat de son unité, chaque marin, en mer ou à terre, dans toutes les forces, est donc tenu informé des gestes et des pratiques à adopter, que les unités, en complément, adaptent à leurs activités particulières.
Poursuivre les opérations
Le virus n’a pas fait disparaître les menaces qui pèsent sur la France et les Français. En témoignent les nombreuses actions qui se poursuivent avec la même détermination : opérations Agenor dans le détroit d’Ormuz, Chammal en Méditerranée orientale, secours aux navires en difficulté, mission de surveillance dans nos zones économiques exclusives partout sur le globe…
Mission permanente, assurée sans discontinuer depuis 1972, la dissuasion océanique, portée par les sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE), a ainsi été garantie. Dans cet environnement très confiné, les sous-mariniers respectent scrupuleusement les dispositifs mis en place pour préserver leur santé et réduire le risque de propagation du virus : questionnaire de santé, confinement et dépistage avant chaque départ en mission, présence dans l’équipage d’un personnel de santé sensibilisé à la gestion de ce genre de risque. « Nos sous-mariniers font preuve d’un grand sens du devoir et d’une grande rigueur dans toutes les mesures sanitaires qui sont prescrites », atteste le vice-amiral d’escadre Bernard-Antoine Morio de l’Isle, commandant les forces sous-marines et la force océanique stratégique. Autour des SNLE, c’est toute la base opérationnelle de l’île Longue qui s’est adaptée en prenant également des dispositions de prévention : réduction du nombre de passagers dans les transports nautiques et les bus, réorganisation des entrées sur le site avec, notamment, distribution de solution hydroalcoolique et adaptation des créneaux horaires de travail sur les chantiers d’entretien de SNLE. La protection de ses marins étant une des priorités de la Marine, cette dernière suit la situation de près pour être en mesure d’identifier rapidement les cas potentiels et les prendre en charge sans délai.
Protéger le territoire et surveiller les approches maritimes
Sur le territoire français, les missions continuent également, qu’elles relèvent notamment du soutien ou de la surveillance et la protection des approches maritimes. Là aussi, des mesures pour limiter la propagation du virus et protéger la santé des marins, civils comme militaires, ont été mises en place. Par exemple, les entités de la force d’action navale basées à terre ont, entre autres, adopté un fonctionnement de présence par bordées dont la durée peut s’élever à 15 jours. C’est aussi sur ce modèle que le groupement de fusiliers marins (GFM) de l’Atlantique s’est organisé pour continuer d’assurer la protection des emprises militaires. « Dès le 16 mars, l’équipage du GFM est passé par bordées, une moitié de l’unité déployée sur les points dont nous assurons la défense militaire, et l’autre restant protégée et confinée à domicile, en mesure de rallier rapidement, pour renforcer le dispositif ou pour répondre à toute mission qui nous serait confiée », témoigne le second maître Ugo, fusilier marin du GFM.
Maintenir le MCO naval
Sur le front du maintien en condition opérationnelle (MCO) naval, le service du soutien de la flotte (SSF), a lui aussi, adapté son organisation pour garantir la disponibilité des bâtiments malgré les contraintes inhérentes au confinement et l’adoption de mesures de protection de son personnel. Les plans de continuité de l’activité de ses directions ont été activés, pour maintenir les arrêts techniques en cours et préparer ceux à venir. Outre la réorganisation des postes de travail sur site, des moyens techniques et informatiques ont été rapidement déployés pour faciliter le télétravail, accroître la portabilité du réseau informatique et généraliser la procédure de signature électronique.
Responsable d’opération, ingénieur responsable de bâtiment, expert, acheteur, personnel des affaires générales et des ressources humaines… les 950 personnes du SSF – dont deux tiers de civils – se sont mobilisées, parfois hors de leur périmètre habituel. Par bordées dans les bases navales et sur les chantiers ou en télétravail, ils se sont investis pour approvisionner les bâtiments en pièces de rechange, mener à bien les arrêts techniques programmés, veiller à la bonne exécution par les industriels des prestations déjà commandées, passer les indispensables commandes additionnelles, rédiger de nouveaux actes contractuels et assurer le paiement rapide des prestations réalisées dans une période particulièrement tendue, notamment pour les PME.
Rester prêts
L’exigence opérationnelle ne faiblissant pas, la division entraînement (Divent) de la FAN a maintenu le cap des qualifications opérationnelles : « Nous avons pu conduire 75 % des stages prévus, le reste ayant été reprogrammé, précise le capitaine de vaisseau Jean-Marc, chef de la division entraînement de la FAN, aucun bâtiment n’a ainsi perdu sa qualification à cause du coronavirus. » Il a fallu toutefois adapter le déroulement des activités, que ce soit parce que certains collaborateurs externes n’ont pas pu assurer leur concours ou pour éviter que les entraîneurs, montant à bord de bâtiments sains, ne soient les propagateurs du virus. « Les exercices de tir sur cibles tractées par aéronefs ont été remplacés par des tirs sur cibles dérivantes ou sur fusées éclairantes », explique le capitaine de corvette Florent, membre de la Divent Fan et« officier chargé du bâtiment » pour la frégate multi-missions (FREMM) Languedoc. « L’état de santé de chacun des entraîneurs a été suivi au préalable et en conduite, notamment par des prises de température quotidiennes. Lors de l’exercice de visite, impliquant un bâtiment tiers, les marins de l’équipe de visite étaient équipés de masques et de gants et avaient pour consigne stricte de n’avoir aucun contact. » Si les simulateurs sont restés fermés quelque temps, ils ont rouvert partiellement leurs portes pour des besoins ponctuels avec des mesures sanitaires drastiques. À bord, les postes de propreté ont été multipliés et la présence aux briefings limitée aux seuls marins indispensables. Des précautions essentielles au regard des unités entraînées. « La priorité est évidemment donnée aux bâtiments qui ont un impératif opérationnel. Nous avons travaillé étroitement pour cela avec le CPCO* », indique le CV Jean-Marc. Première FREMM en double équipage à avoir obtenu sa qualification opérationnelle, la FREMM Languedoc a même pu conduire son stage « Tamouret » préparant ses marins au combat, avant de partir en mission Agenor dans le détroit d’Ormuz. « Aucun équipage n’est parti sous-entraîné, nous ne l’aurions pas accepté », conclut le CV Jean-Marc.
* Centre de planification et de conduite des opérations.
Extrait du Cols Bleus N°3087 - Juin 2020 - Sur le pont ! Fiers de nos marins
Sources : Marine nationale
Droits : Ministère des armées