Monsieur le Préfet,
Monsieur le Préfet maritime,
Mesdames et messieurs les élus,
Messieurs les officiers généraux
Officiers, sous-officiers, officiers mariniers, soldats, quartiers-maîtres et marins, personnels civils de la défense,
Mesdames et messieurs,
Quel bonheur d’être aujourd’hui à Toulon, avec vous. Avec la Méditerranée pour réconfort, avec la chaleur de nos échanges pour oublier les caprices du soleil et, jamais très loin, l’appel du large.
L’éternel appel du large, l’envie de liberté, le désir de puissance : ce sont trois obsessions qui ont animé les plus grandes civilisations de notre histoire. Trois obsessions qui s’assouvissent dans l’immensité des océans depuis des millénaires.
Le monde a beau changer, les passions humaines demeurent. Aujourd’hui, comme hier, la mer est le théâtre de l’affirmation des puissances et de comportements souvent contestataires, parfois même hostiles. Cet espace de liberté et d’échanges est de plus en plus contesté.
Au cœur des grands défis maritimes de notre siècle, il y a d’abord la liberté de navigation ; un principe cardinal du droit international que la France est attachée à promouvoir et à faire respecter, notamment en Méditerranée orientale, en mer de Chine ou dans le Golfe arabo-persique, avec les Européens. Assurer la liberté de navigation, c’est aussi assurer le fonctionnement de nos économies :
- 90% des marchandises sont transportées par voie maritime.
- 30% des approvisionnements énergétiques de l’Europe transitent par le détroit d’Ormuz. Dans le contexte actuel, je pense que je n’ai pas besoin d’insister davantage sur la nécessité d’assurer la sécurité des voies maritimes et la liberté, dans les faits, par les actes et pas seulement dans les traités internationaux.
Au cœur des grands défis maritimes de notre siècle, il y a aussi la protection de notre environnement, de nos ressources et de notre territoire. La France est la deuxième puissance maritime mondiale, avec 11 millions de km2 de zone économique exclusive, de la Méditerranée à l’océan Pacifique. Nous devons être vigilants face aux tensions qui émergent autour de l’exploitation des ressources maritimes.
Enfin, un des nouveaux terrains des rapports de forces du XXIe siècle se trouve sous les mers : dans les fonds marins, nous devons à ce titre nous préparer à agir, à nous défendre, le cas échéant à prendre l’initiative, ou du moins, à répliquer. C’est pourquoi j’ai doté le ministère des Armées d’une stratégie de maîtrise des fonds marins, pour répondre à trois impératifs de notre défense :
- Assurer la liberté d’action de nos forces,
- Assurer la protection des installations stratégiques sous-marines, notamment des câbles sous-marins par lesquels transitent 99% de nos communications et d’internet,
- Assurer la protection de nos intérêts militaires et industriels.
Il existe une phrase attribuée à Richelieu qui dit que : « Les larmes de nos souverains ont souvent le goût salé de la mer qu’ils ont ignorée. » En 2022, nous n’avons que trop conscience de l’importance de la maîtrise de l’espace maritime. Le Président de la République l’avait clairement dit aux Assises de l’économie de la mer en 2019, « le XXIe siècle sera maritime ».
La mer est, et continuera d’être un enjeu de puissance. Nous le savons. Nous en avons la triste confirmation avec les opérations navales opérées par les Russes en mer Noire et en mer d’Azov, l’un des piliers de leur stratégie de guerre en Ukraine.
Nous savons aussi que si nous voulons que la France compte dans le monde de demain, elle a besoin d’être dotée d’une Marine de combat. Et cela, vous le savez mieux que personne.
Vous êtes ici, à Toulon, aux portes des opérations. L’arsenal n’a peut-être jamais aussi bien porté son nom qu’aujourd’hui. Je tiens à avoir une pensée pour tous les militaires en mission, pour les marins de la mission Jeanne d’Arc qui ont appareillé en février, et aussi pour nos marins du groupe aéronaval, déployés en Méditerranée centrale. Depuis vendredi dernier, ils participent aux missions de réassurance de l’OTAN avec des patrouilles de Rafale Marine et de Hawkeye, au profit de la Roumanie, très inquiète et préoccupée par l’invasion de l’Ukraine.
Aujourd’hui, la guerre est aux portes de l’Europe. Il y a encore quelques semaines, c’était inimaginable pour beaucoup d’entre nous. Au ministère des Armées, cette hypothèse d’une guerre ouverte sur le sol européen avait déjà été envisagée il y a 5 ans, en 2017, alors que nous engagions les travaux préparatoires de la loi de programmation militaire.
A ce moment-là, nous avions fait un constat simple et sans appel : alors même que les engagements opérationnels de nos armées se multipliaient et s’intensifiaient, leurs moyens étaient usés et en diminution depuis de nombreuses années. Nous demandions à nos armées de faire plus avec moins. Le Président de la République a immédiatement pris la décision de mettre fin à cette situation insoutenable.
La loi de programmation militaire 2019-2025 a donc engagé avec force la remontée en puissance de nos armées. Elle a permis à nos armées de se projeter avec confiance dans l’avenir. Et je voudrais remercier le soutien sans faille que les parlementaires lui ont apporté. Et c’est tout particulièrement vrai ici, à Toulon, le premier port militaire d’Europe, une de nos plus grandes bases de défense. Un des symboles de la puissance française.
Depuis 5 ans, nous avons lancé le renouvellement de l’ensemble de la flotte et des équipements de la Marine nationale. Ainsi, les frégates multi-missions montrent leur haut niveau de performance en opérations, les avions de patrouille maritime Atlantique 2 rénovés atteignent les meilleurs standards et la génération de sous-marins nucléaires d’attaque de type Suffren arrive dans nos forces avec de nouvelles capacités. L’accueil de ces nouveaux SNA sur la base de Toulon est d’ailleurs un défi majeur que vous devrez relever.
Nous avons aussi lancé des programmes structurants pour l’avenir, je pense en particulier au successeur du Charles de Gaulle et au sous-marin lanceur d’engins de troisième génération. Autant de programmes ambitieux qui donnent à la Marine un horizon. Vous continuerez à transmettre votre savoir-faire aux jeunes marins avides d’engagement loin, longtemps et en équipage.
Nous devrons aussi continuer à recruter dans les filières compétitives qui exigent des compétences de pointe. Je pense à toutes les micro-filières qui caractérisent la Marine qui opère dans toutes les dimensions et notamment au cyber et à l’intelligence artificielle, qui sont deux domaines essentiels au centre de service de la donnée marine et au centre support cyberdéfense basés à Toulon.
Au total, sur la durée de la loi de programmation militaire, 2,5 milliards d’euros d’équipements avec leurs infrastructures sont investis dans la région de Toulon. C’est un effort remarquable.
C’est un renouveau que j’ai aussi souhaité pour vos conditions de vie, pour celles de vos familles. Car il n’y a pas de Marine de combat sans des marins « bien dans leurs vareuses. » Et je suis fière que nos efforts aient déjà permis la livraison de 300 logements neufs et 337 rénovés depuis 5 ans. Ce sont des efforts qu’il faudra poursuivre.
Si je suis ici cet après-midi, c’est aussi pour inaugurer la nouvelle grande jetée, cet amer si emblématique que les marins passent au départ et au retour de mission. C’est un projet qui a été co-financé à hauteur de 21 millions d’euros par le ministère, par la métropole Toulon-Provence-Méditerranée ainsi que par le département du Var. Au-delà de ce projet qui est une vraie réussite, je tiens à saluer l’action de la ville, de la métropole, du département, de la région, avec qui nous travaillons pour améliorer le quotidien des marins et de leurs familles qui s’installent ici.
Mesdames et messieurs,
Le jour où le Premier ministre m’a proposé de devenir ministre des Armées, j’ai immédiatement été plongée dans ce qui était à l’époque, un de mes souvenirs les plus forts. J’ai pensé à l’équipage du sous-marin nucléaire d’attaque Perle, que j’avais eu la chance de rencontrer il y a bien des années, lors d’une plongée de quelques heures au large de Toulon.
J’ai pensé à cet environnement d’exigence et de rigueur, de passion et d’engagement, à ce second qui répétait toutes les instructions du pacha, lors de la manœuvre d’immersion. Je n’ai eu aucun doute. Si être ministre des Armées, cela signifiait être au service de militaires passionnés prêts à tout pour la France, comme ceux que j’avais rencontrés durant ces quelques heures sous les mers, alors, oui c’était ce que j’allais être.
Ensemble, nous avons vécu des moments de vie uniques, extrêmement émouvants, qui resteront à jamais gravés dans nos mémoires.
Je pense à cette après-midi de juin, où la Perle dévorée par les flammes, a été sauvée par les marins-pompiers. En octobre 2020, j’ai pris la décision de la réparer, afin de préserver notre capacité opérationnelle de sous-marins nucléaire d’attaques. Et je pense que par les temps qui courent, c’était une décision nécessaire pour répondre aux enjeux actuels.
Je pense à ce soir de juillet, où nous avons appris que la Minerve avait été retrouvée au large des côtes toulonnaises, 50 ans après sa disparition.
Je pense à cette nuit de mai, où la France a pleuré le premier-maître Cédric de Pierrepont et le premier-maître Alain Bertoncello, dans le respect et l’admiration infinie de l’acte de bravoure pour lequel ils ont sacrifié leur vie.
Je pense enfin à tous ces instants passés auprès de vous, auprès des marins, des militaires, des personnels civils qui ont à cœur d’accomplir leur mission et qui font la grandeur de notre Marine.
Toulon est la figure de proue de la Marine nationale. Elle est le berceau d’une maison exigeante, belle, et grande, pour porter haut les valeurs, pour défendre notre liberté.
Chaque jour, vous vous consacrez corps et âme à servir votre pays. La France est honorée de votre engagement.
Vive la République ! Vive la France !
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