Projet Arcane : un chien sous oxygène fait le grand saut

Cet exploit s’est tenu lors d’une campagne de sauts opérationnels à très grande hauteur (SOTGH), orchestrée par le CPA 10.

Aux prémices de ce système innovant : la volonté d’intégrer un chien à chacun des groupes action du CPA 10. « Membre de l’équipe à part entière, le chien s’avère indispensable pour pouvoir disposer d’une autonomie tactique, confie le lieutenant Vincent, initiateur du projet Arcane (Adaptateur respiratoire CANin évolutif). Plus qu’un simple renfort, on s’est aperçu que le chien apporte un atout opérationnel incontestable sur le terrain. C’est pourquoi nous avons souhaité développer notre capacité de combat en intégrant un maître-chien et son équipier à notre groupe, spécialisé dans le SOTGH. » Déterminé et passionné, le lieutenant Vincent s’est entouré en 2017 d’une équipe constituée d’un enseignant-chercheur au centre de recherche de l’École de l’air (CREA), Cyril, et d’un vétérinaire en chef du Service de santé des armées (SSA), Thierry.

Première étape : étudier la respiration du chien en haute altitude et analyser l’impact de l’inhalation d’oxygène sur ses capacités opérationnelles. « Concernant le chien, les recherches existantes sur ce type de saut se limitaient à l’étude de l’hypoxie des chiens placés dans des conditions extrêmes en haute montagne. Nous n’avions donc aucune connaissance sur le maintien des aptitudes olfactives, athlétiques ou acoustiques du chien pour ce type de saut. » S’en est donc suivie une batterie de tests pour lesquels les résultats se sont avérés concluants. Il n’en fallait pas plus à l’équipe pour poursuivre l’aventure : « Un impératif a guidé d’emblée nos réflexions, poursuit-il. L’équipement nécessaire pour assurer l’emport du chien devait être compatible avec les contraintes aéronautiques et ne pas impacter l’organisation générale de ce type de saut. Il fallait faire au plus simple, c’est pourquoi nous avons opté pour un masque à oxygène classique, sur lequel nous avons développé un adaptateur canin étanche. »

Tout en poursuivant leurs missions opérationnelles respectives, les membres de l’équipe modélisent, grâce à l’impression 3D, un prototype fonctionnel adapté à la morphologie de la tête de Laos afin d’assurer une parfaite étanchéité du dispositif. En parallèle, le suivi médical du chien est scrupuleusement réfléchi par un centre hospitalier vétérinaire spécialisé. Pour finaliser l’étude, la phase pratique débute en janvier 2020.

Un mannequin au gabarit d’un chien a permis de réaliser les premiers sauts-tests conduits par le Centre d’expertise aérienne militaire (CEAM). « Ce mannequin permet de préserver l’intégrité des animaux et leur bien-être lors de l’instruction et des sauts répétés nécessaires au maintien en condition opérationnelle des porteurs de chien », souligne l’équipe projet. Après validation des procédures de largage par le CEAM, les sauts suivants ont été réalisés par le sergent Franck, seul maître-chien qualifié pour les SOGTH, avec Laos. Concluante, cette campagne d’expérimentations a permis au groupe action du CPA 10 d’obtenir une autorisation d’emploi temporaire du système Arcane. Quelques semaines plus tard, associé à un nouveau harnais plus adapté, l’Arcane a pu être utilisé en opération lors de sauts à grande hauteur (SOGH).

De retour en métropole, la campagne SOGTH a démarré. En novembre 2020, accroché à son maître, Laos a effectué plusieurs sauts avec le masque Arcane, depuis un C160 Transall de l’escadron de transport 3/61 « Poitou ». « Après chaque saut, Laos a enchaîné les exercices de mordant ou de recherche d’explosif, le tout sous contrôle vétérinaire, précise le lieutenant Vincent. Ce travail, directement après avoir touché terre, nous a permis de tester son obéissance et ses capacités de combat, mais surtout de vérifier son état physiologique après le saut. » Laos a ainsi pu démontrer son savoir-faire, pour la plus grande satisfaction de l’équipe projet d’Arcane. Cette innovation made in CPA 10, soutenue par le ministère des Armées et par l’état-major de l’armée de l’Air et de l’Espace, offre une capacité supplémentaire au commandement des opérations spéciales.

Laos, 5 ans, a relevé ce défi haut la main grâce à des mois de recherche et de préparation. Nul doute que son exploit suscitera des vocations.