Enjeu et priorité stratégique, la cyberdéfense est garante de la souveraineté nationale. Avec de nombreux acteurs, le ministère des Armées participe activement à la protection et à la défense des systèmes d’information dans le cyberespace. Le général de division aérienne Didier Tisseyre, commandant de la cyberdéfense, répond à nos questions.
Mon général, qu’est-ce que la cyberdéfense ?
La cyberdéfense militaire regroupe l’ensemble des actions défensives et offensives, conduites dans le cyberespace pour garantir et soutenir la capacité des forces armées à assurer ses missions opérationnelles, avec ses systèmes d’information et de commandement et ses systèmes d’armes, aujourd’hui fortement numérisés. Elle est essentielle car le cyberespace est désormais un théâtre de conflictualité, au même titre que les autres milieux : terre, mer, air et spatial. Les menaces ne cessent de croître et nous constatons qu’il n’y a plus une journée sans cyberattaque. Nous devons donc protéger le ministère et les armées, en lien avec les autres acteurs cyber de l’Etat.
Une cyberdéfense efficace ne se limite pas à une réponse technique aux attaques. Il faut une approche résolument opérationnelle et intégrer les aspects juridiques, stratégiques et politiques liés aux cyberespace pour trouver la meilleure façon de répondre aux agressions. Il y a toujours une intention derrière une attaque (espionnage, sabotage, déstabilisation…). Il faut la comprendre et identifier le mode d’action de l’attaquant. La cyberdéfense se construit ensemble et chacun à un rôle à jouer, experts et utilisateurs du numérique.
« Il y a toujours une intention derrière une attaque »
En quoi consiste votre métier ?
J’aime dire, en forçant le trait, que mon métier est d’être paranoïaque. En tant que responsable, au nom du chef d’état-major des Armées (CEMA), de la conduite de la défense des systèmes d’information pour le ministère des Armées, je dois m’assurer de la cohérence globale de nos moyens et de l’efficacité des chaînes opérationnelles et techniques cyber. Je dois aussi anticiper l’évolution du domaine, le cyberespace se transformant continuellement et rapidement, c’est un défi qui impose agilité et innovation. Mais le commandement de la cyberdéfense (COMCYBER) n’est pas seul. Les armées, directions et services du ministère jouent un rôle majeur. Ce sont elles qui sont en 1re ligne de la protection et de la défense de leurs systèmes d’information et systèmes d’armes numérisés. Ensemble, nous définissons de quelle manière nous pouvons le faire en cas d’attaque.
J’assure également, au nom du CEMA et sous la coordination du sous-chef opérations de l’état-major des Armées, la conception, la planification et la conduite des opérations dans le cyberespace, en liaison étroite avec le Centre de planification et de conduite des opérations (CPCO). C’est une chance et une responsabilité majeure que de pouvoir participer à l’intégration des opérations cyber avec les autres types d’opérations, conventionnelles et spéciales.
Enfin, le COMCYBER contribue ou coordonne les autres volets associés à la cyber : la rédaction des doctrines, le développement des outils, les ressources humaines, l’animation des réservistes cyber, les relations interministérielles et internationales, l’innovation…
« Le COMCYBER n’est pas seul. Les armées, directions et services du ministère jouent un rôle majeur. »
Quels sont les acteurs de la cyberdéfense ?
L’acteur central, c’est avant tout l’Humain. Le ministère des Armées comporte aujourd’hui 3 400 cybercombattants, militaires comme civils, qui œuvrent chaque jour pour répondre à l’exigence imposée par la cyberdéfense militaire. Répartis dans l’ensemble des armées, directions et services, sur lesquels j’exerce une tutelle organique ou fonctionnelle, ils sont le cœur de la cyberdéfense du ministère, pour les volets défensif et offensif.
La cyberdéfense requiert également des capacités d’innovation et d’adaptation, comme l’intégration de l’intelligence artificielle ou le quantique. Cet effort sur l’agilité et l’innovation, nous l’optimisons avec la Direction générale de l’armement et l’Agence innovation défense grâce à nos échanges avec les industriels ou les start-ups. La Cyberdéfense factory en est un bon exemple : le travail de développement d’algorithmes qui y est fait contribue de manière importante à la résilience du ministère.
Enfin, les réservistes opérationnels et citoyens, par leurs expertises et leurs compétences singulières, viennent compléter ce tableau des acteurs de la cyberdéfense. Ils sont une partie importante de l’efficacité opérationnelle de la cyberdéfense militaire.
Retrouvez l'intervention du général Tisseyre lors du point presse du 18 mars 2021
Sources : Ministère des Armées