Cette année, le site de l'école des Fourriers de Querqueville a été choisi par la Commission pour son voyage d'étude.
Ce déplacement a également été l'occasion de visiter plusieurs sites du débarquement sur les plages normandes le 6 juin 1944 lors de l'opération Overlord.
Le premier site visité fut le cimetière militaire allemand de La Cambe. Comment imaginer que ce décor champêtre ait été le siège d'une si rude bataille ? La plupart des croix portent des dates de naissance des années 1920. Ce sont de tout jeunes soldats qui ont trouvé la mort en 1944, les dernières réserves du Reich finissant.
Cimetière allemand de La Cambe
Le voyage s'est ensuite poursuivi avec la visite du musée Airborn à Sainte-Mère l'Eglise, village symbole de la libération de la Normandie par les parachutistes alliés et les soldats arrivés en planeurs. C'est d'ailleurs un planeur entier qu'abrite un premier bâtiment en forme de parachute. Un second bâtiment abrite un avion Douglas, avion dédié au largage des parachutistes et au remorquage des planeurs. De nombreux mannequins en tenue d'époque sont exposés, ainsi que des armes, munitions et matériels. De nombreux liens se sont tissés entre Sainte-Mère l'Eglise et les soldats alliés. Des vétérans reviennent chaque année sur le site et entretiennent la mémoire de ces combats de la libération.
Musée Airborn, Sainte-Mère l'Eglise
La Commission se rapproche des plages du débarquement en visitant la Pointe du Hoc, petite avancée de la côte normande qui surplombe une falaise de 30 mètres de haut avec une plage de galets d'une dizaine de mètres de large à ses pieds. Fortifiée par les Allemands, elle fut prise d'assaut par le 2ème bataillon de Rangers américain et conquise au prix de lourdes pertes.
Nous poursuivons par la plage d'Utah-Beach, une des cinq plages du débarquement, qui vit arriver les 32 000 hommes de la 4ème division d'infanterie américaine.
Nous arrivons enfin à Querqueville en passant par Cherbourg, dont le site mérite quelques mots. Situé à la pointe de la presqu'île du Cotentin, Cherbourg accueille les visiteurs au sein de la plus grande rade artificielle d'Europe, œuvre architecturale monumentale du XVIIIème siècle.
L'Ecole des Fourriers de Querqueville est commandée par le Commissaire en chef de 1ère classe Monier. Le site eu plusieurs affectations au fil du temps. Pendant la 1ère guerre mondiale, il reçut des réfugiés lorrain. Il fut une base aéronautique navale, puis un centre d'incorporation des engagés de la Marine. En 1990, il accueille l'Ecole des Fourriers, sa vocation actuelle. C'est une école à vocation interarmées. Tout à la fois l'héritière de l'Ecole des Fourriers de Rochefort et de l'Ecole Nationale des Sous-officiers de l'Armée de Terre de Auch.
Le terme "fourrier" provient des comptables que la marine formait sur les bateaux. Ils géraient d'abord le fourrage des chevaux sous Napoléon puis les vivres à bord; ils étaient souvent les seuls à savoir lire et compter à bord avec les officiers.
L'Ecole compte 317 permanents officiers et sous-officiers et accueille chaque année 5 200 élèves pour des périodes allant de cinq jours à six mois de formation. C'est l'école militaire de formation professionnelle pour les métiers de l'administration, des ressources humaines et de la restauration. Les élèves viennent des trois armées, du service de santé et de la gendarmerie. La mutualisation des formations permet des économies d'échelle.
L'Ecole a également des missions annexes, mais non négligeables, que sont les JAPD, le soutien à la formation NAVFCO, le soutien des stages gendarmerie (OPJ, PSIG, réservistes). L'Ecole développe également une activité de centre de séminaire des armées.
La formation initiale du marin s'étale sur cinq semaines avec un camp d'infanterie de quarante huit heures au début et une cérémonie de fin de formation. Il s'agit de volontaires recrutés pour une durée de un à quatre ans. Neuf sessions de cinq semaines par an, forment de 60 à 80 marins par session. 20 à 30 % des jeunes recrues sont des femmes.
Après cette présentation faite par le commandant de l'école, notre délégation a pu se rendre sur les ateliers cuisine de campagne et boulangerie de campagne pour un bref exposé des capacités de ces installations utilisées en opération extérieure ou en exercice. Puis, nous avons rencontré les cadres et les stagiaires de l'école autour de deux tables rondes.
Table ronde animée par le général Lagrange avec les cadres de l'école
Les tables rondes ont été l'occasion de présenter les travaux de la CAJ mais aussi d'écouter les réflexions des cadres et des élèves relatives aux sujets étudiés cette année, soit la condition des militaires et le rôle social de armées.
Plusieurs points ont été soulevés avec les cadres instructeurs s'agissant des contraintes du statut de militaire et notamment sur la différence des contraintes de mobilité d'une armée à l'autre.
Concernant l'emploi du conjoint de militaire les avis sont partagés : des solutions existent maintenant avec les cellules CAEC bien qu'elles demeurent peu connues dans les armées. L'emploi du conjoint reste la première préoccupation du militaire, avant le dépaysement, et est plus difficile à gérer lorsque le conjoint est civil.
Selon les cadres présents à la table ronde les opérations extérieures font partie du métier de militaire même si un départ reste tout de même un traumatisme, surtout pour celui qui reste et qui se retrouve souvent seul face à la gestion de la vie courante.
La séparation des ménages a également été évoquée. Son taux a en effet doublé depuis 2001 dans les armées. C'est un phénomène de société mais qui est également dû aux opex à répétition. C'est également un phénomène nouveau pour l'armée de terre. L'armée de l'air et la Marine ont une expérience plus ancienne des départs mais ont l'avantage des grands ports et des bases donc d'une assise familiale et professionnelle qui stabilise la famille. D'autant que le risque de la mutation géographique est écarté.
La deuxième table ronde réunissait autour des membres de la CAJ différents niveaux de stagiaires : en formation initiale, en formation de spécialité après formation initiale, en formation de spécialité après plusieurs années de service.
Pour leurs cadres, la population des stagiaires est très diverse, chaque cas est un cas particulier. Généralement ils sont assez impliqués dans leur formation et ont une bonne mentalité mais leur niveau physique et intellectuel est préoccupant. En effet, les jeunes stagiaires en formation initiale ont insisté sur les qualités qu'ils avaient trouvé en s'engageant dans la Marine : la rigueur dans le travail, plus de responsabilités, l'esprit d'équipe et apprendre un métier.
Cette première prise de contact avec le personnel et les stagiaires de l'école s'est ensuite prolongée dans le cade plus convivial d'un déjeuner préparé par les élèves cuisiniers.
Marc Gateau Leblanc
Représentant l'état-major de la Marine nationale