Soucieuse d’identifier l’ensemble des opportunités qui s’offrent à elle, l’armée de Terre a lancé de nombreux projets innovants intégrant des technologies numériques à la pointe telle que la blockchain.
La blockchain (chaîne de blocs en français) fait partie de ces nouvelles technologies dont le potentiel ouvre de nombreuses perspectives aux acteurs privés et étatiques. Principalement associée aux cryptomonnaies (telles que le Bitcoin ou l’Ether), la blockchain dispose de caractéristiques et de fonctionnalités qui lui ouvrent un éventail de cas d’utilisation qui vont bien au-delà de cette fameuse application. Encore peu répandue en entreprise malgré de nombreux projets pilotes, cette technologie mérite d’être décrite très simplement pour mieux comprendre ce qu’elle apporte.
Pour reprendre la description faite par le ministère de l’Economie, des Finances et de la Relance, la blockchain peut être définie ainsi :
Par construction, la blockchain intègre des mécanismes de calcul d’empreinte numérique (appelée « hash ») des blocs ainsi que l’inscription automatique de l’empreinte numérique du bloc précédent en entête de chaque bloc, créant ainsi un lien fort entre les blocs de la chaîne (éléments décrits dans la partie 1 de la figure ci-dessous).
L’empreinte numérique d’un bloc est calculée à partir des éléments qui le composent (empreinte du bloc précédent, transactions, heure et date de création du bloc), elle est unique. Il est également impossible de reconstituer les caractéristiques d’origine du bloc à partir de cette empreinte et de la fonction mathématique qui a permis de la générer.
Toute tentative de modification des caractéristiques d’un bloc (pour, par exemple, ajouter ou soustraire une transaction) se traduit ainsi par la génération d’une empreinte numérique totalement différente qui se répercute sur l’ensemble des blocs suivants (cas représenté dans la partie 2 de la figure ci-dessous).
L’immuabilité des informations (toutes les opérations sont « gravées dans le marbre ») et la traçabilité des actions (chaque modification est validée par consensus puis obligatoirement enregistrée dans un bloc) font clairement partie des forces de la blockchain en termes de sécurité et de fiabilité.
Pour synthétiser, les caractéristiques majeures de la blockchain sont les suivantes :
Le schéma ci-dessous, issu du site Blockchain France, décrit simplement le processus d’ajout d’un nouveau bloc au sein de la blockchain. Ce fonctionnement est commun à l’ensemble des blockchains quel que soit le type de consensus qu’elles mettent en œuvre.
Selon Blockchain France, les smart contracts « constituent l’un des types d’usage les plus prometteurs de la blockchain. Concrètement, il s’agit de programmes autonomes qui, une fois démarrés, exécutent automatiquement des conditions définies au préalable et inscrites dans la blockchain. Ils fonctionnement comme toute instruction conditionnelle de type « if – then » (si telle condition est vérifiée, alors telle conséquence s’exécute). »
Parmi les applications des smart contracts, il est donc possible d’envisager l’automatisation de traitements en fonction de la survenue de certains événements prédéfinis. Par exemple, une compagnie aérienne peut mettre en place un smart contract qui dédommage automatiquement les passagers en cas de retard dépassant un seuil défini au préalable. De multiples cas d’usage peuvent ainsi être envisagés, tous allant dans le sens d’une automatisation accrue des processus inter-applicatifs et plus particulièrement de ceux à faible valeur ajoutée.
Au-delà de l’aspect technologique et des différentes implémentations développées par les acteurs du marché, il est possible de distinguer 3 types d’organisation de blockchain : publique, privée et consortium. Les caractéristiques de ces différents types de blockchain sont définies ci-dessous :
Type de Blockchain |
|||
Publique |
Privée |
Consortium |
|
Sans permission ? |
Oui |
Non |
Non |
Qui peut la consulter ? |
Tout le monde |
Seulement les utilisateurs invités |
Cela varie |
Qui peut y écrire ? |
Tout le monde |
Des participants approuvés |
Des participants approuvés |
Propriété |
Personne |
Entité unique |
Plusieurs entités |
Participants connus ? |
Non |
Oui |
Oui |
Vitesse de transaction |
Lente |
Rapide |
Rapide |
Remarques |
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|
Le pôle numérique et coordination de l’innovation (PNI) de l’armée de Terre accompagne une grande quantité de projets qui mettent en œuvre des technologies novatrices. Parmi ces initiatives qui visent à montrer des applications concrètes de ces outils au bénéfice des métiers de l’armée de Terre, la blockchain d’impression 3D FIBR²EO pilotée par la SIMMT figure en excellente position.
Ce projet vise à mettre à disposition de la chaîne Maintenance les capacités de l’impression 3D au profit de la production sur le territoire national ou sur un théâtre d’opération de pièces de rechange pour les matériels terrestres. Le suivi des impressions réalisées via ces imprimantes 3D est effectué via un système d’information basé sur une blockchain. Grâce à cette technologie, il est possible de mettre en œuvre :
Premier réseau d’impression 3D disponible en opérations, ce système est le fruit d’une collaboration avec la PME Vistory qui apporte son expertise dans le développement de blockchain et les industriels Nexter et Arquus qui fournissent les modèles 3D. Apportant une sécurité dans l’utilisation des modèles 3D de pièces de rechange ainsi qu’un modèle économique pour ce cas d’usage, ce projet est un excellent exemple de l’utilisation de l’ensemble des capacités d’une nouvelle technologie numérique, la blockchain en l’occurrence. Sous réserve d’accord entre les différentes parties, l’utilisation de la blockchain pourrait aller encore plus loin en permettant la mise en place d’un système de facturation automatisée via l’utilisation des smart contracts qui déclencheraient automatiquement des paiements en fonction du nombre d’utilisation des modèles 3D.
Le projet FIBR²EO montre à quel point les nouvelles technologies telles que la blockchain peuvent ouvrir de nouvelles perspectives métier aux armées. Eléments de base de la transformation numérique, elles nous permettront d’aller plus loin dans l’interprétation des données (data science), de sécuriser nos données (blockchain), d’anticiper des situations conflictuelles (IA), d’automatiser des actions cruciales (robots/drones), de disposer en tout temps et en tout lieu d’informations d’aide à la décision (cloud/5G) et tout cela dans un seul but : maintenir la supériorité opérationnelle.
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