Armée de Terre
La distinction entre l’histoire militaire conçue comme une discipline scientifique exigeant une méthodologie rigoureuse et les commémorations, toujours marquées par les discours politiques et sociaux du moment, est bien connue.
L’armée de Terre, qui a dans le même temps des exigences de formations technique et tactique, mais aussi morale et intellectuelle, se trouve parfois en situation d’équilibre délicat entre, d’une part la prise en compte objective et pragmatique des enseignements des campagnes et des batailles passées et d’autre part, la mise à l’honneur de leur souvenir. Pour résumer, étudier le déroulement, les procédés tactiques et les savoir-faire mis en œuvre à l’occasion des batailles de Wagram, de Camerone, de Bazeilles, de Sidi Brahim ou de bien d’autres est une chose ; se souvenir de l’engagement de nos aînés, de leur sacrifice, et leur rendre hommage en est une autre. Or, les deux facettes de cette même médaille sont utiles dans des domaines différents mais complémentaires. Dans ce cadre, la bataille de Verdun est tout à fait emblématique.
Elle est profondément inscrite dans les mémoires familiales par sa durée, par l’ampleur des effectifs engagés et les volumes de pertes, par le caractère apocalyptique d’un bombardement d’artillerie dont les échos résonnent à plus de 100 kilomètres. Elle marque toute une génération et les longues listes de noms reportées sur les monuments aux morts jusque dans les plus petits villages témoignent de son caractère exceptionnel.
Il est normal que l’armée de Terre s’investisse fortement dans la durée à l’occasion des commémorations du centenaire de ces combats. Il est juste que les emblèmes des unités d’aujourd’hui qui portent toujours « Verdun » dans leurs plis soient présents dans la cité meusienne. Il est utile que le sacrifice des fantassins, des artilleurs, mais aussi celui des téléphonistes, des conducteurs de camions, des sapeurs, de tous ceux qui contribuèrent à faire du mot d’ordre « Courage, on les aura ! » une réalité, soit honoré. Mais, pour les militaires, le centenaire de Verdun ne se limite pas à ces manifestations : qu’est-ce que la bataille nous apprend des qualités morales du soldat ? Des compétences techniques nécessaires ? Des savoir-faire des états-majors ? De l’emploi des armes ? Ces leçons conservent-elles, et dans quelle mesure, une actualité ?
C’est bien dans ce double sens, à la fois de devoir de mémoire et de formation, que l’histoire militaire appliquée présente tout son intérêt.
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