Bruno Colson, (présentation et annotation) Napoléon. De la guerre, Paris, Perrin, 2011, 539 p.
par Thierry Widemann, chargé d’études à l’IRSEM
Napoléon n’a jamais rédigé d’essai théorique sur la guerre. Il en avait pourtant conçu le projet à Sainte-Hélène, avant d’y renoncer. Les réflexions de l’Empereur dans ce domaine se trouvent répartis dans des sources très diverses d’où l’on a extrait, aux XIXe et XXe siècles, plusieurs ouvrages de « maximes », mais non référencées, et pas toutes authentiques.
Dans son projet, Bruno Colson s’est d’abord attaché à recueillir, vérifier et référencer l’ensemble des propos tenus par Napoléon sur la guerre. C’est donc un corpus énorme de textes publiés ou inédits qu’il a systématiquement analysé (la correspondance, les mémoires de contemporains, les œuvres de Sainte-Hélène, les journaux de généraux comme Gourgaud et Bertrand qui ont accompagné l’Empereur dans son exil, etc.). L’auteur n’a bien évidemment pas tout retenu, privilégiant les textes de portée générale et se méfiant des discours d’autojustification de l’Empereur. Demeurait le problème du classement de ces multiples données. Pour mettre en cohérence les propos de Napoléon, Bruno Colson a utilisé le plan du De la Guerre de Clausewitz. C’est une véritable trouvaille. Et l’idée est parfaitement légitime, dans la mesure où c’est à partir de la mutation militaire réalisée par Napoléon que le théoricien prussien a fondé sa réflexion et rédigé son principal ouvrage. Dès lors, répartie selon un plan en huit livres (la nature de la guerre, la théorie de la guerre, de la stratégie en général, le combat, les forces militaires, la défense, l’attaque, le plan de guerre) la pensée napoléonienne de la guerre nous est pour la première fois donnée à lire dans un ensemble ordonné. Les citations sont replacées dans leur contexte, accompagnées d’un commentaire toujours éclairant, et les moments de proximité entre Napoléon et Clausewitz sont chaque fois relevés et étudiés. Ce livre marque une date dans l’étude de la pensée militaire napoléonienne, mais il dépasse son objet car il éclaire également la pensée de Clausewitz.
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