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FOMEDEC : Un nouveau cursus de formation pour le personnel navigant

Mise à jour  : 08/12/2017 - Direction : Armée de l'Air et de l'Espace

Programme novateur, FOMEDEC (formation modernisée et entraînement différencié des équipages de chasse) est un des projets phares de l’Armée de l’air de ces dernières années. Explications.

  • Un nouveau cursus
  • Témoignage du colonel Vincent Coste, commandant la base aérienne 709 de Cognac-Châteaubernard
  • Témoignage du capitaine Pierre, un pilote formé à l'heure suisse
  • Le Pilatus PC-21

Un nouveau cursus

«La formation des pilotes et des navigateurs de chasse représente un enjeu majeur. Fruit d’une longue maturation opérationnelle, cette formation permet aujourd’hui à l’Armée de l’air d’être considérée comme l’une des meilleures au monde. Voilà pourquoi la modernisation de son outil devenait primordiale. (…) Lequel doit permettre de mettre en place une préparation opérationnelle adaptée à nos besoins actuels et futurs, tout en garantissant le respect des équilibres budgétaires », déclarait le général André Lanata, chef d’état-major de l’Armée de l’air (CEMAA), le 20 juin dernier lors du 52e Salon du Bourget. Programme vertueux et innovant, FOMEDEC ambitionne de rationaliser la formation des équipages de chasse, à partir d’un système d’armes plus proche des standards actuels. À cette fin, l’Armée de l’air prépare l’arrivée d’un nouveau vecteur, le Pilatus PC-21, dont la livrée a été dévoilée en juin. Ce nouvel aéronef, dont l’avionique et la capacité de simulation embarquée se rapprochent de celles des avions d’armes modernes, permettra en outre de faire des économies en heures de vol et de raccourcir la durée de la formation.

RATIONALISER LA FORMATION

Dans le cadre de l’acte II du plan stratégique Unis pour « Faire Face », l’Armée de l’air est aujourd’hui engagée dans une dynamique excluant les échecs en cours d’une formation aussi longue et coûteuse que celle du personnel navigant (PN). Cette formation doit donc évoluer afin, notamment, de réduire le temps passé dans les écoles de pilotage. L’enjeu est aussi d’éviter les redondances dans les programmes et de garantir, grâce à l’ingénierie de formation, la cohérence d’ensemble des formations en vol et au simulateur, délivrées l’une après l’autre. Par ailleurs, l’arrivée prochaine du nouvel appareil, facilitera l’acquisition des compétences nécessaires aux équipages de chasse et sera l’occasion d’adapter les progressions du personnel navigant en amont et en aval. « Cette transformation se fera de façon progressive. Il ne s’agit pas de remettre en question entièrement le système, mais de l’améliorer par des nouveaux moyens adaptés », précise le colonel Jean-Christophe, chef du bureau Plans de l’état-major de l’Armée de l’air.

UN CURSUS REVISITÉ

La formation des pilotes comporte aujourd’hui quatre étapes. La première, dite « phase initiale » a lieu à l’École de l’air ; elle est suivie du « tronc commun » sur Grob 120 à Cognac, où les élèves reçoivent une instruction initiale de pilotage, à l’issue duquel les élèves sont orientés soit en préspécialisation chasse sur TB30 Epsilon, soit en préspécialisation transport sur Grob 120 toujours à Cognac. Puis, vient la spécialisation sur Alphajet à l’école de l’aviation de chasse à Tours et pour finir à l’école de transition opérationnelle à Cazaux pour les élèves chasse. Pour les élèves transporteurs, la formation se poursuit sur Xingu à Avord, avant la transformation opérationnelle en escadron de transport. Quant aux navigateurs officiers systèmes d’armes (NOSA), ils débutent leur formation à Salon-de-Provence, à l’école de formation des navigateurs de combat, puis à Avord pour les navigateurs sur avions de transport, ou Tours pour les navigateurs sur avions de chasse. Le Pilatus PC-21 va permettre de rassembler en une seule phase celle sur avion TB30 Epsilon de Cognac et celle sur AlphaJet de Tours. Quelque 11 500 heures de vol seront nécessaires annuellement. Grâce à cette refonte, un élève pilote et un NOSA gagneront six mois de formation. Les élèves seront ainsi formés plus rapidement. Les structures actuelles de formation, comme l’école de pilotage de l’Armée de l’air de la base de Cognac, vont être redimensionnées par l’arrivée à Cognac de l’école de l’aviation de chasse en provenance de Tours. La base aérienne d’Avord, accueillera quant à elle les élèves en préspécialisation transport dès l’été 2017.

UNE FORMATION PAR LE SUCCÈS 

« L’enjeu pour l’Armée de l’air est de former au plus vite, aux meilleurs coûts et au meilleur niveau possible nos équipages pour respecter nos engagements internationaux », précise le colonel Jérôme Lacroix-Leclair, commandant les écoles de formation du personnel navigant. Avec cette rénovation du cursus d’apprentissage, l’Armée de l’air se propose d’admettre en formation un nombre d’élèves correspondant précisément au besoin des forces. Cela suppose la mise en place en amont d’un pronostic robuste quant aux chances de réussite des candidats comme pilote ou NOSA. La formation par le succès et par l’individualisation, nom donné à ce nouveau concept mis en place depuis deux ans, s’appuiera sur ce pronostic initial. Dans un premier temps, de nouveaux tests psychotechniques réalisés par le centre d’étude et de recherche psychologique du personnel air (CERPAir) prennent ainsi en compte les spécificités des nouvelles générations d’élèves. Dans un second temps, l’évaluation porte sur la formation au vol à voile. À l’École de l’air, pendant leurs trois années de scolarité (pour les officiers de carrière), les élèves effectuent des périodes bloquées dans les escadrons d’instruction au vol à voile (Salon, Romorantin et Saintes) afin d’obtenir le brevet de pilote de planeur. Un suivi comportemental pendant le cursus académique est mis en place, auquel succède un stage de pré-orientation à l’école de pilotage de l’Armée de l’air (EPAA) à Cognac. Axé sur la performance en vol mais aussi sur le comportement au sol (profilage), ce stage comprend cinq vols sur Grob 120 et quatre missions au simulateur. À l’issue du stage, un pronostic de réussite dans la filière PN (pilote ou NOSA) peut être prononcé.

L’INSTRUCTEUR : LA CLÉ DE LA RÉUSSITE 

L’instructeur est le premier membre du personnel navigant que l’élève rencontre, celui qu’il va prendre pour modèle et écouter tout au long de sa formation. Outre un savoir-faire, l’instructeur transmet un savoir-être aux élèves. Une responsabilité essentielle lui incombe, une mauvaise transmission pouvant laisser des traces durables sur un individu. « Nous souhaitons créer une vraie relation entre l’élève et l’instructeur, sur un projet de réussite commun », détaille le colonel Jérôme Lacroix-Leclair. Des évolutions importantes vont voir le jour à l’été 2017 concernant le contenu et les modalités de passage des qualifications des instructeurs. L’objectif est de recentrer le rôle de ces derniers sur leur cœur de métier pédagogique tout en valorisant leur fonction.

Témoignage du colonel Vincent Coste, commandant la base aérienne 709 de Cognac-Châteaubernard

«Avec l’arrivée du programme FOMEDEC, la base aérienne se transforme. Ce projet va nécessiter une refonte profonde des programmes de formation des élèves pilotes, à laquelle l’école de pilotage de l’Armée de l’air va être associée, sur le terrain. Notre objectif principal est d’assurer la continuité du flux de formation des pilotes de combat de l’Armée de l’air pendant cette transition. La société qui a emporté le contrat, Babcock, va implanter dans la zone opérationnelle un nouveau bâtiment, dont les premières pierres seront posées à la rentrée. Ce bâtiment est essentiel, puisqu’il accueillera dès 2018 les nouveaux simulateurs de vol. L’arrivée du PC-21 à Cognac va nécessiter une réorganisation des hangars actuels. Babcock va devoir en aménager certains, ceux utilisés aujourd’hui par la société CATS pour la mise en œuvre des GROB 120 et TB30. Le bâtiment destiné à accueillir la future structure de formation sortira de terre à l’horizon 2020. Nous devons là encore adapter les structures existantes, les bâtiments des deux escadrons d’instruction en vol et celui de l’escadron d’instruction et de formation des instructeurs pilotes. Cette adaptation est nécessitée par la transition numérique, notamment pour la mise en place des moyens de préparation et de restitution de mission du PC-21, identiques à ceux existant actuellement sur Rafale et Mirage 2000. Enfin, nous rénovons progressivement notre infrastructure aéronautique. La piste secondaire a été complètement rénovée en octobre 2016, la principale le sera sur son tiers le plus fragile en 2018. Aujourd’hui, la base aérienne de Cognac est celle qui connaît le plus de mouvements : son activité est comparable en volume à celle de l’aéroport de Bordeaux. Avec l’arrivée du tronc chasse, son activité aérienne va augmenter. Nous sommes en mesure d’absorber le trafic sans difficulté, la base aérienne de Cognac ayant connu par le passé des périodes d’activité comparable à nos prévisions. Les performances du PC-21 étant bien supérieures à celles du TB30 et du GROB 120, il va nous falloir réorganiser les secteurs de travail dans l’espace aérien de près de 13 000 km² de la base. En attendant, nous réalisons cet été le départ de la préspécialisation transport des élèves pilotes, transférée sur la base aérienne d’Avord. Puis en septembre 2017, auront lieu les premiers travaux du bâtiment devant accueillir les nouveaux simulateurs et le début de la phase de transition de l’EPAA.»

Témoignage du capitaine Pierre, un pilote formé à l'heure suisse

Le capitaine Pierre est pilote instructeur au sein des forces aériennes suisses. Depuis près de deux ans, l’officier français forme de futurs pilotes de combat suisses.

Mon capitaine, pouvez-vous nous expliquer votre parcours et comment vous êtes arrivé sur Pilatus PC-21 ?

Je suis entré dans l’Armée de l’air en 2000 en tant qu’officier sous contrat. Après avoir suivi le cursus de pilote de chasse classique, j’ai été breveté en 2003. J’ai commencé ma carrière sur Mirage F1 CR et suis devenu sous-chef de patrouille à l’ancien escadron de reconnaissance 2/33 « Savoie ». Puis, après quatre années en tant qu’instructeur à l’école d’aviation de chasse sur Alphajet à Tours, j’ai rejoint le 2/3 « Champagne » sur la base aérienne de Nancy pendant trois ans sur Mirage 2000 D. Depuis septembre 2015, je suis instructeur sur PC-21 à l’école de pilote suisse, sur la base d’Emmen, et ce jusqu’à l’été 2018.

Pouvez-nous nous en dire plus sur ce poste d’instructeur ?

Je suis intégré à l’armée suisse comme un instructeur à part entière. Le profil de l’instructeur est exigeant. Tous les instructeurs suisses sont issus des escadrons de combat. Les équipements et possibilités offertes par le PC-21 requièrent, en effet, si l’on veut en tirer pleinement parti, de la part de l’instructeur un minimum d’expérience opérationnelle. Quant aux besoins suisses, ils ne sont pas du tout comparables à ceux de la France. Nous sommes cinq instructeurs à temps plein et nous avons quatre élèves à former cette année. La formation est relativement différente de celle dispensée jusqu’à présent en France. Il n’y a pas de sélection en jeu, car celle-ci est effectuée en amont. De plus, les élèves ne seront amenés à évoluer que sur un seul type d’avion et ne réaliseront que des missions de défense aérienne, ce qui facilite la standardisation du cursus. Nous formons les élèves pendant dix mois environ, comme en France des formations dans les écoles de Tours et de Cazaux. À la suite de cette phase, deux mois de cours théoriques leur sont dispensés et ils partent ensuite pour la transformation sur F/A-18 Hornet. Depuis cette année, j’ai un élève français qui suit le cursus suisse.

Quelles sont les spécificités de cet aéronef ?

Le PC-21 dispose d’un cockpit très moderne. En termes de dimensions, c’est un avion comparable à l’Alphajet. Néanmoins, le cockpit possède différentes aides à la navigation, comme l’utilisation du système HOTAS (Hands On Throttle And Stick) qui permet un contrôle des instruments de vol directement depuis le manche et des différents équipements spécifiques aux chasseurs, comme le VTH (Visualisation tête haute). Enfin, sur le plan technique, le plus impressionnant, c’est la simulation embarquée de l’avion. Grâce à celle-ci, nous avons la possibilité de mettre les avions en réseau, capacité que nos élèves retrouveront sur Mirage 2000 D, Mirage 2000-5 ou Rafale. Nous pouvons simuler l’apparition d’avions fantômes et faire réagir les élèves en conséquence. Le système de radar simulé permet également de réaliser des interceptions et des tirs de missiles. En somme, le PC-21 permet d’aller beaucoup plus loin sans forcément rentrer dans des considérations tactiques. Nous faisons découvrir aux élèves pilotes certaines notions de base qu’ils approfondiront ensuite en escadron de combat, comme le fait d’atteindre les +8g en combat aérien.

Que vous apporte cette expérience à l’étranger ?

C’est très positif. Cette expérience me permet de me remettre en question. Toute l’instruction est en allemand, même si la documentation reste en anglais. C’est donc un réel défi. Pour un instructeur, c’est une transition intéressante car dans les forces françaises, j’avais pour missions la reconnaissance et l’attaque au sol. Or, ici j’enseigne à mes élèves la mission de police du ciel. Sur le plan personnel, c’est aussi très enrichissant. Je suis venu en Suisse en famille. C’est également une belle expérience culturelle pour eux.

Le Pilatus PC-21

Au cœur du programme FOMEDEC, le PC-21, dont les premiers exemplaires destinés à l’Armée de l’air seront livrés fin 2018. Les premiers équipages devraient être formés au second semestre 2018 chez Pilatus en amont de l’arrivée des avions. L’Armée de l’air devient de fait le second opérateur européen de PC-21 après la Suisse et le 8e client militaire au niveau mondial. L’aéronef propulsé par un turbopropulseur PT6A-68B est en service dans de nombreux pays, dont la Suisse, la Jordanie, les Émirats arabes unis, le Qatar, l’Arabie Saoudite, Singapour, l’Australie. Son atout majeur réside dans son habitacle moderne. Son cockpit affiche trois écrans à cristaux liquides et dispose d’un visualisation tête haute (VTH). « Aujourd’hui, avec le PC-21, nous remplaçons un aéronef biréacteur, l’Alphajet, et une partie de l’Epsilon, qui a un moteur à piston, par une turbine. Certes, nous perdons en terme de vitesse, en comparaison à l’Alphajet ; en terme d’avionique, en revanche, il s’agit d’une révolution », précise le commandant Sofiane, chef des projets avions école à l’état-major de l’Armée de l’air. L’avion a été conçu spécifiquement pour la formation. «Auparavant, les fonctionnalités des places avant et arrière n’étaient pas exactement les mêmes, ce qui pouvait pénaliser l’entraînement, notamment pour les navigateurs ; demain l’instructeur pourra indifféremment se trouver à l’avant ou à l’arrière.»


Source : Armée de l'Air et de l'Espace
Droits : Armée de l'Air et de l'Espace