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BOURGET : 3 questions au chef de l’aviation légère de l’armée de Terre

Mise à jour  : 20/06/2017

Le Salon international de l’aéronautique et de l’espace qui se tient actuellement au parc des Expositions du Bourget représente une occasion unique pour l’Aviation légère de l’armée de Terre de mettre en avant ses savoir-faire tactiques exceptionnels, fruit de plus de soixante années d’engagements opérationnels. À l’occasion de cette 52e édition, le commandant de l’ALAT, le général de division Michel Grintchenko, fait le point sur l’excellence de ses hommes, mais aussi des appareils et équipements dont l’ALAT bénéficie, grâce à la performance des nombreux industriels sollicités.

1/ 3 - Quels sont les enjeux du COM ALAT pour les prochaines années ?

Aujourd’hui, le Commandement de l’Aviation légère de l’armée de Terre (COMALAT) est en pleine mutation. Depuis la mise en place du nouveau modèle « Au contact », l’aviation légère est devenue un pilier de niveau divisionnaire. Dans les années à venir, l’ALAT aura à réussir sa mutation, car nous allons passer d’une flotte composée

essentiellement d’hélicoptères d’ancienne génération (Gazelle, Puma) à une flotte de matériels de nouvelle génération (Tigre HAP, Tigre HAD, NH 90) offrant des capacités tactiques supplémentaires. Aujourd’hui, uniquement 1/3 de nos hélicoptères appartiennent à la nouvelle génération ; nous en aurons la moitié en 2019 et 2/3 en 2022. Cette métamorphose est compliquée, car nous déployons dans le même temps une activité opérationnelle très dense. Or, un appareil en opération s’use, vieillit et nécessite une maintenance très importante. Chaque année, environ le tiers de la flotte est déployé en opérations ; c’est compliqué à organiser, tout comme à soutenir, tant la « dette de maintenance » contractée là-bas, exige pour être résorbée, un important travail dans les ateliers.

Pour réussir la transformation, j’ai défini quatre priorités :

1 : Maîtriser le format d’hélicoptères nécessaire à l’armée de Terre

Ce format se situe autour de 300 aéronefs, conformément à la Loi de programmation militaire et aux contrats opérationnels. Cela peut paraître important ; en fait c’est juste suffisant pour laisser notre armée de Terre dans la catégorie des armées modernes, qui comptent sur la scène internationale.

Du fait de la nature de l’hélicoptère qui nécessite une grande maintenance, une partie du parc est constamment indisponible pour diverses raisons. Idéalement, je devrais disposer de 180 appareils disponibles ; malheureusement, je n’ai en moyenne que 120 appareils, ce qui est à peine suffisant pour tenir les opérations, préparer l’avenir et assurer un minimum d’entraînement. Ce premier axe d’effort met donc en place une profonde réforme de nos structures pour augmenter le rendement de nos ateliers. Mais ne perdons pas de vue que la maintenance aéronautique est comme une chaîne, aussi solide que le plus faible de ses maillons et que mon effort ne porte que sur le maillon dont je suis responsable. Les autres relèvent d’autres responsabilités, partagées entre les secteurs étatiques et industriels.

2 : Maîtriser l’intégration de l’aérocombat dans l’armée de Terre

C’est un terme un peu technique, mais il s’agit d’être toujours au diapason de l’armée de Terre pour multiplier ses effets tactiques ou rétablir une situation compromise. Dans certains cas, nous occupons le rôle du Joker ; dans d’autres, nous sommes complètement leader des opérations prenant sous notre commandement les composantes venant de l’infanterie, de la cavalerie, du génie ou de l’artillerie.

L’ALAT est donc capable de fédérer toutes ces énergies et de les faire agir au rythme de nos appareils, en mesure d’attaquer ou de s’emparer d’un objectif à plusieurs centaines de kilomètres. Vous savez que l’armée de Terre est résolument engagée dans le programme Scorpion ; vous comprenez donc que l’ALAT y aura, et y a déjà, toute sa place.

3 : Préserver la liberté d’action de l’armée de Terre dans l’espace aéroterrestre

La gestion de l’espace aérien est très compliquée car il existe beaucoup d’usagers de l’air dont certains en opérations pourraient sembler inattendus ; je pense aux obus d’artillerie qui ont des trajectoires très hautes et occupent des espaces très importants. Ces besoins d’espace s’expriment souvent dans l’urgence et pas toujours selon la planification retenue, mais en fonction des circonstances qu’il faut savoir saisir. De plus, l’armée de Terre met en œuvre des drones et des hélicoptères, ce qui vous le comprenez crée un réel besoin d’espaces aériens. Le COMALAT possède donc cette expertise permettant de placer dans un monde plutôt régi par la planification, les besoins opérationnels immédiats de l’armée de Terre.

4 : Fournir aux Alliés un noyau dur d’aérocombat « à la française »

L’armée de Terre française est l’une des seules à utiliser ses hélicoptères d’une manière si imbriquée avec les unités au sol et de pratiquer l’aérocombat. Les autres nations les utilisent davantage pour des actions planifiées, dans des missions qui sont plus proches des missions d’appui ou de soutien. L’ALAT sait également le faire, mais le cœur de notre métier est bien souvent de trouver l’ennemi et de le détruire. L’ALAT française fascine et séduit. Nos entraînements et nos procédures d’emploi sont différentes de celles de nos Alliés et nous sommes prêts à coopérer avec eux pour leur faire partager nos tactiques et nos procédures.

2/3 - Le COMALAT conduit des opérations nécessitant des équipements modernes et adaptés. Quels sont les processus mis en place pour répondre de manière réactive à vos besoins ? 

Cette chaîne d’adaptation réactive est gérée par les acteurs traditionnels du domaine EMAT, CDEC, STAT et DGA qui sont là dans leur cœur de métier. Mon rôle consiste à évaluer les besoins, sans nous disperser ni céder aux effets de mode. Par exemple, dans un salon tel que le Bourget, nous aurions envie d’acheter beaucoup de choses ; le pouvons-nous ? Pourrait-on le soutenir dans la durée ? Nous devons donc nous concentrer sur ce qui nous est utile et essentiel.

Pour le COMALAT, la priorité est de maîtriser totalement nos équipements actuels, quitte à créer ou inventer « les petits riens » qui nous permettront de faire encore plus avec ce que nous avons. Je dois également m’assurer que nos mécaniciens seront formés pour faire ce que l’on attend d’eux.

Nous avons également la capacité d’inventer de nouveaux usages à certains équipements en les faisant évoluer ou en les agrégeant à d’autres capacités. Le simulateur tactique EDITH en fournit un bon exemple. Il permet de faire travailler simultanément six machines sur des scénarios tactiques. C’est extrêmement intéressant, mais quand on le couple avec la numérisation du champ de bataille, on arrive à créer un espace commun réel/simulé qui nous ouvre la porte de véritables laboratoires tactiques d’entraînement ou d’expérimentations tactiques.

La modélisation des zones d’intervention réelles nous permet alors de répéter nos opérations ; au-delà de l’exécution quasi réflexe de procédés techniques, nous sommes sûrs d’avoir choisi le meilleur mode d’action permettant de remplir la mission.

3/3 - Qu’attendez-vous du salon du Bourget ?

Le salon du Bourget constitue un espace de notoriété pour l’armée de Terre, car n’oublions pas qu’avec ses 300 aéronefs, elle possède plus de la moitié des hélicoptères de l’État, 2/3 des hélicoptères de la Défense et pratiquement la moitié du parc total des aéronefs de l’armée de l’Air. Donc, même si cela peut surprendre, l’armée de Terre est un acteur majeur de paysage aéronautique français ; elle a donc toute sa place dans ce salon.

Notre présence permet également de montrer l’estime et la confiance que nous avons dans notre industrie nationale et de lui en rendre hommage. Nos différents partenariats avec les industriels sont empreints de confiance et de complémentarité. L’ALAT, par la façon dont elle s’acquitte de ses missions, le courage de ses soldats et la qualité de ses matériels constitue un des fleurons de la nation.

De plus, le Bourget est également l’occasion pour toute la communauté aéronautique (hélicoptères, drones, avions, ballons) de se retrouver. Nous sommes tous passionnés, même si nous avons des capacités et des besoins très différents. Il est alors important que le COMALAT rencontre les industriels pour voir ce qu’ils ont sur le marché et où ils en sont en termes de maturité de leurs différents projets. Le Bourget me permet également d’appréhender l’environnement industriel de la 3e dimension et de me rendre compte de sa réalité et de sa modernité. C’est enfin l’occasion de rencontrer mes homologues étrangers et d’échanger avec eux.

Saisissant cette opportunité, l’ALAT a décidé d’organiser un colloque sur le thème de la « survivabilité » des hélicoptères. Vaste sujet dont nous débattrons librement entre hélicoptéristes des différentes armées et industriels ; c’est une préoccupation majeure qui est au cœur des engagements actuels et qui constitue un enjeu fondamental pour demain.

A noter : Colloque sur le thème de la « survivabilité » des hélicoptères le 22 juin 14h30 à l’Auditorium du centre de conférence du Salon du Bourget. Sur invitation uniquement.


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