Agence de l’innovation de défense
La Brigade de sapeurs-pompiers de Paris (BSPP) a développé, en partenariat avec la société française ZELUP, le projet DELTAE, un système révolutionnaire de lance ayant pour objectif d’améliorer la protection du pompier tout en faisant un usage raisonné de l’eau dans la lutte contre l’incendie.
Image : Lance DELTAE, crédits : BSPP
L’idée du projet DELTAE est née en 2016 au sein de la BSPP. A l’origine financé par la Mission pour le développement de l’innovation participative du ministère des Armées, il avait pour but de réaliser une preuve de concept dont les résultats, en 2018, ont démontré une nette plus-value par rapport aux lances alors en usage.
La brumisation diphasique est un brouillard obtenu par un procédé de fragmentation hydropneumatique de l’eau. Les gouttes d’eau (phase liquide) sont très finement divisées grâce à la détente de l’air (phase gazeuse). Les fines gouttelettes sont ensuite propulsées dans une veine gazeuse à très haute vitesse permettant leur acheminement jusqu’au cœur du foyer. Dans ces conditions, l’eau reste très longtemps en suspension dans l’air et peut ainsi capter 8 fois plus d’énergie et donc diminuer significativement la contrainte énergétique.
La finesse et la densité de ce brouillard assurent un très haut niveau de protection contre le rayonnement ainsi qu’un refroidissement efficace de l’environnement. L’engagement du sapeur-pompier est facilité, même en situation extrême. De plus, le procédé de génération du brouillard permet un usage polyvalent, avec débits élevés, sans danger et ce dans tous les types d’environnement opérationnels. La très forte capacité d’absorption des flux radiatifs permet de lutter contre les effets dominos, autrement dit d’éviter une propagation rapide du foyer.
DELTAE répond à des enjeux économiques, sanitaires et environnementaux
Cette lance utilise des débits en eau 5 fois moins importants que les lances actuelles, tout en étant plus efficace. Or, la rationalisation de l’usage de l’eau est un enjeu essentiel pour de nombreux territoires ou acteurs, au regard notamment des coûts nécessaires à son acheminement et à son stockage, ou encore des coûts subséquents par les dégâts qu’elle occasionne. Contrairement aux lances classiques, ici, la quasi-totalité de l’eau utilisée est évaporée ; c’est donc une eau qui ne ruisselle pas. Cela permet de lutter contre les écoulements d’eau pollués et remplis de déchets toxiques pour l’Homme et pour la nature.
D’un point de vue sanitaire, le brouillard fixe les gaz toxiques qui se dégagent lors d’incendies tels que les COV1 et les HAP2 (composés cancérigènes, dont une vingtaine ont été mesurés), ou encore le monoxyde de carbone, par ailleurs explosif à de telles concentrations dans des environnements très chauds. Pour ces différents composés, on obtient une diminution de leur concentration dans l’air entre 5 et 50 fois supérieures à la situation actuelle. Cela permet donc de revenir en dessous des seuils d’exposition.
Image : Lance DELTAE, crédits : BSPP
La lutte contre les incendies est un marché dual civil/militaire
Cette lance constitue une véritable plus-value lorsque la quantité d’eau est limitée ou difficilement accessible, sur des bases opérationnelles, des théâtres d’opérations extérieures par exemple, ou dans des zones ne disposant pas d’un réseau d’eau pour la lutte contre l’incendie. Ce dispositif facilite aussi les interventions sur des feux dans des locaux confinés et difficiles à pénétrer. Au niveau militaire, il s’agit des bâtiments de surface ou sous-marins, des installations souterraines, des dépôts de munitions. L’absence d’eau de ruissellement possible grâce au dispositif de DELTAE présente des avantages également pour la protection d’installations à haute valeur ajoutée e et pour les établissements présentant un intérêt spécifique pour le patrimoine ou pour le matériel et les données qu’ils contiennent : musées, édifices classés, transformateurs, data-centers, dépôts militaires de munitions et de matériel…
Des études sont en cours pour quantifier la capacité de ce type de brouillard d’eau à atténuer les ondes de chocs. Cette capacité pourrait éventuellement être exploitée afin de protéger les pompiers contre les effets de souffle. La brigade de sapeurs-pompiers de Paris prévoit de mettre en place, dès 2022, un 1er engin disposant de cette technologie au sein d’une compagnie d’incendie afin d’élaborer le concept d’emploi ad hoc. L’objectif final est d’équiper l’ensemble du parc d’engins de cette technologie à compter de 2024.
Un projet présenté au Forum innovation défense 2021
Le projet DELTAE sera présenté au FID, les 25, 26 et 27 novembre 2021, dans l'espace B "ACCOMPAGNER - soutenir le combattant".
Pour en savoir plus, rendez-vous sur forum-innovation.defense.gouv.fr
1COV : Composé organique volatile
2HAP : hydrocarbures aromatiques polycycliques
Droits : AID
