Contrairement à une légende dorée, l’armée française du premier semestre de l’année 1914 n’est pas une institution au sein de laquelle règnent le calme et la sérénité. Depuis plusieurs années, crises et difficultés se multiplient et le statut social des militaires ne cesse de décroître, accentuant de graves difficultés de recrutement. Dans le même temps, depuis juillet 1911, le général Joffre a été nommé chef d’état-major général et vice-président du conseil supérieur de la Guerre, avec pour mission de préparer une guerre que la crise d’Agadir rend envisageable. Il cumule ainsi les responsabilités du temps de paix et du temps de guerre pour l’armée de campagne, mais l’autorité sur les directions d’arme du ministère et sur les places fortes lui échappent. Or, les premières assurent en pratique la gestion du personnel et, pour les armes savantes en particulier, disposent d’ateliers, d’arsenaux, de budgets en propre ; tandis que les secondes restent, même en temps de guerre, sous les ordres du ministre alors qu’elles totalisent le quart environ des effectifs et des milliers de pièces d’artillerie.Face à cette situation, qui ne commence à s’améliorer que dans les mois qui précèdent le conflit, les années 1911-1914 sont marquées par l’un des efforts d’adaptation et de modernisation les plus importants de notre histoire militaire récente, mais il faudra l’épreuve de la mobilisation puis de la guerre pour restaurer les liens, aussi bien internes qu’externes, qui assurent la cohésion de l’ensemble.
Droits : armée de Terre/DELPAT