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Libération de Paris : dans les souvenirs du colonel Moore

Mise à jour  : 06/09/2016

Il y a 72 ans, Paris était libéré. Parmi les hommes qui participent alors à cet événement, un certain Fred Moore. Ce Compagnon de la Libération, aujourd’hui Chancelier de l’Ordre, était aux avant-postes au niveau de l’école militaire. Ce 25 août 1944 aura marqué sa vie, notamment sur le plan personnel…

Vous aviez 20 ans quand vous vous êtes engagé en 1940. Quelles étaient vos motivations de l’époque ? 

Cette année-là, j’effectuais ma quatrième et dernière année à l’école d’optique à Morez dans le Jura. Un soir, alors que je sortais de cours avec mes camarades, nous avons entendu à la radio Paul Raynaud qui annonçait que les Allemands étaient arrivés la veille à Amiens, ville de mes parents. A cette déclaration, je me suis immédiatement rendu à la gendarmerie pour demander un laisser-passer pour Brest, ville où vivaient mes grands-parents. Je voulais m’engager mais je n’avais pas été appelé. C’est à ce moment-là que la France a demandé un armistice ; pour moi, pas d’autres solutions que de me rendre en Angleterre.

J’ai réussi à quitter la France à la voile avec mon frère. Arrivés à Plymouth, quelle fut notre déception : on nous autorise à accoster mais interdiction de débarquer car mon frère et moi étions mineurs. Je vais donc voir l’officier de port et lui fais part de notre souhait : m’engager dans la Royal Air Force et mon frère dans la Navy. Nous avons donc été reçus au bureau de recrutement. Plus tard, mon frère s’engage finalement dans la Marine française. De mon côté, je voulais devenir pilote de chasse ; on m’a donc dirigé au bureau de l’Air à Londres. 

Comment intégrez-vous finalement un régiment de Spahis? 

Il y avait une très forte demande pour rentrer dans les Forces aériennes françaises libres (FAFL) ; nous étions donc beaucoup de jeunes pour peu de places. De leur côté, les Anglais sentaient venir le Blitz et étaient plus réticents à fournir des contingents aux Français. Comme je possédais mon permis de conduire, j’ai été affecté au 1er escadron du train des Forces françaises libres, avant de partir à Dakar en septembre 1940.  Trois mois plus tard, j’ai été désigné d’office pour suivre les cours d’élève aspirant à l’école de Brazzaville.  Finalement, j’ai été muté au 1er régiment de marche de Spahis marocains de la 2e division blindée (2e DB). 

Quand j’ai rencontré mon escadron, mes soldats m’ont accueilli avec un méchoui d’honneur. Un dépaysement total pour un breton natal comme moi ! Je ne parlais pas un mot d’arabe à l’époque, ils m’ont appris petit à petit. Et, plus tard, ces Marocains m’ont sauvé la vie pendant la guerre. Une fois, c’était à Alençon. Nous venions de débarquer, j’étais fatigué. Tout d’un coup, lors d’une traversée de clairière, nous entendons des tirs d’obus ! Mon sous-officier marocain m’a couvert et ainsi protégé du sniper posté dans un arbre à 600 mètres de là. Ce jour-là, il m’a sauvé la vie. 

Après vous être illustré au combat avec votre régiment sur le continent africain (Egypte, Libye, Tunisie), vous rejoignez le territoire français seulement en août 1944. Comment s’est passé ce retour ?

Nous sommes arrivés le 1er août 1944 en Normandie. Le 8 août, nous étions à Louvigné du désert, ville libérée par les Américains. C’était un moment spécial pour moi de me retrouver sur cette terre, car c’est ici que vivaient mes parents. Ma maman, comme toutes les femmes et filles de France, a accouru sur la place principale fêter la victoire, comme c’était la tradition. Lorsqu’elle est arrivée, elle s’est adressée à un soldat et demanda en anglais s’il ne connaissait pas deux frères, Fred et René Moore. Et l’homme de lui répondre : « Le lieutenant Moore ? 5e escadron, 2e peloton, il n’est pas loin ! ». J’étais dans mon véhicule, je me suis retourné et, devant moi, papa et maman. C’était très émouvant pour moi… Je ressens d’ailleurs encore beaucoup d’émotions en y repensant… J’ai eu l’autorisation de la nuit, pour passer un peu de temps auprès d’eux. Quel bonheur…

A quel moment arrivez-vous à Paris ? Vous participez activement à l’attaque de l’école militaire ; parlez-nous de ces heures qui précèdent la libération? 

La 2e DB est arrivée à Paris dans la nuit du 24 au 25 août 1944. Avec mon peloton, j’ai remonté l’avenue de Suffren au matin et nous avons pris place autour de l’école militaire. Une patrouille à gauche, une à droite, les coups de feu ne cessaient pas ! Je n’avais aucune communication radio avec le reste du groupement. Les tirs ont duré jusqu’à 16 heures. On a alors compris que le combat était terminé, la foule s’est amassée autour de nous et on a remonté de nouveau l’avenue de Suffren dans nos blindés. 

Les gens accouraient pour féliciter les soldats et c’est comme ça que j’ai rencontré ma future épouse. Elle vivait à Paris et est venue à hauteur des véhicules pour s’adresser à l’un des soldats. Lorsque j’ai regagné mon automitrailleuse à la fin du combat, elle était juste devant moi. A ce moment-là, une Américaine sauta à mon cou pour m’embrasser. Ni une ni deux, celle qui deviendra ma femme l’a gifla violemment. Ce fut un coup de foudre mutuel : elle est devenue ma marraine de guerre et plus tard ma femme…

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