Après l’offensive allemande du 27 mai 1918, le général Mangin est nommé à la tête de la Xe armée. Il lance l’attaque de Méry-Courcelles le 11 juin, qui sera couronnée de succès. Mais le véritable tournant de la guerre aura lieu le 18 juillet, grâce à une offensive lourde.
Tout en maintenant la menace que fait peser sur l’aile nord des Alliés le groupe d’armées du Kronprinz de Bavière, Ludendorff attaque le 27 mai 1918 entre Reims et Soissons sur un front de 50 km tenu par la VIe armée Duchesne. Cette offensive résonna « en France comme un coup de foudre » note le général Mangin, commandant du 9e corps d’armée. « C’était la première fois depuis août 1914 que les troupes françaises cédaient. » Le 2 juin, Clemenceau demande à Pétain qu’une armée soit rendue à Mangin. Ce dernier est donc nommé à la tête de la Xe armée.
11 juin 1918. « C’en est fini cette fois de la guerre de tranchées, nous allons surprendre le ″boche″ en nous abstenant de tirs d’artillerie avant l’heure H, et nous combattrons en terrain libre… comme en 14, comme à la Marne. », explique le général Mangin à ses troupes avant l’offensive. La guerre de mouvement a succédé à la guerre de position. Mangin donne ses ordres : trois divisions en première ligne, chacune avec un groupe de chars, sur le flanc ouest de la poche allemande ; une en appui : préparation d’artillerie, 10 h 30 : débouché, 11 h : l’aviation appuiera par ses mitrailleuses et ses bombes. Rapidité et effet de surprise forcèrent, les Allemands à reculer. Malgré les contre-attaques allemandes violentes, de nouveaux progrès furent accomplis le 12 juin, stoppant l’offensive des Allemands. Pour le général Pétain : « C’est un des plus beaux faits d’armes de cette guerre que seul peut-être un homme de la trempe de Mangin était capable d’accomplir. »
Le général Mangin a pris une part essentielle dans la préparation et l’exécution de l’offensive du 18 juillet, aussi appelée « aurore de la victoire décisive » qui a marqué véritablement le tournant de la guerre. Le nouveau style qu’il voulait imprimer à la bataille en terrain découvert se marque aussi dans le déplacement de son quartier général à 20 km du front. Il a poussé vers l’avant-poste de commandement, ambulances et hôpitaux. Il fait le choix pour lui-même d’un PC d’où il se trouverait en meilleure situation pour « sentir la bataille » : il s’agit d’un observatoire établi par les services des ″Eaux et Forêts″ pour la surveillance des incendies, duquel on peut voir le relief des plateaux à conquérir. Mangin s’emploie à communiquer « sa foi absolue dans le succès ». « La Xe armée était bien devenue l’armée Mangin », comme le souligne le général Weygand.
La mise en place du dispositif a lieu pendant les nuits des 14 et 18 juillet. L’effet de surprise, facilité par les couverts de la forêt de Villers-Cotterêts, doit être soigneusement préservé. « Concentration difficile, écrira Pétain, la plus hâtive et la plus compliquée qu’on ait encore tentée » : 16 divisions en première ou deuxième ligne, 491 batteries, 41 escadrilles et 375 chars de combat interviennent pour la première fois de façon aussi massive sur le champ de bataille. Au centre du dispositif de l’attaque qui s’ébranle, Mangin a placé le 20e corps d’armée, composé de la division marocaine flanquée de la 2e division américaine. Chacune des divisions adjacentes reçoit une trentaine de chars lourds. Les chars Renault, les plus modernes, les plus légers, donc les plus aptes à l’exploitation d’une rupture, sont en réserve d’emploi.
À 4 h 35, le 18 juillet, entre l’Aisne et l’Ourcq, l’artillerie lourde dont une partie a été placée en première ligne, écrase de ses projectiles les batteries adverses. L’artillerie de tranchée détruit les positions avancées et l’artillerie légère déclenche un barrage roulant, tandis que débouche l’infanterie à laquelle sont mêlés les chars d’assaut, à l’abri d’un brouillard qui ne se dissipera qu’en fin de matinée. La surprise est complète chez les Allemands. À 10 h, l’avance de l’infanterie est de 7 à 8 km, le front allemand, en face du centre français, a disparu sur une largeur de 15 km. Au sud, les combats continuent et se prolongent jusqu’à la tombée de la nuit. Mais le lendemain midi, l’artillerie n’a pu suivre et la moitié des chars et le quart de leurs équipages sont hors de combat. Les Allemands sont repoussés en deux jours sur la Vesle, puis sur l’Aisne. Jusqu’à la fin de la guerre, le général Mangin, toujours prêt à attaquer, refoule les troupes allemandes jusqu’à la frontière belge.
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