Le 23 février 2018, après 38 ans de service, le général de division Serge Maurice a rendu le commandement des systèmes d’information et communication (COMSIC) et fait ses adieux aux armes. Il revient sur les temps forts de ses 18 mois passés à la tête du jeune commandement breton.
La création du COMSIC représente pour moi un élan très fort donné aux systèmes d’information et de communication de l’armée de Terre. Le 1er juillet 2016 a eu lieu, bien sûr, la cérémonie de création du commandement lui-même, ma prise de commandement de cette structure importante, mais également la création, le même jour, de la 807e compagnie de transmissions, première unité de cyberdéfense des armées. Tout cela est la marque d’un changement complet de physionomie, de périmètre et de responsabilités des SIC, et de l’importance que cette fonction revêt aujourd’hui dans l’organisation de nos armées.
En effet, cette date marque le début d’une évolution importante de la fonction SIC, et plus largement du corps des Transmissions, qui quitte son rôle originel de mise en œuvre de systèmes de télécommunications et informatiques, pour s’orienter pleinement vers la maîtrise de l’information et donc de la donnée, en appui des postes de commandement et des états-majors. On nous demande aujourd’hui non pas simplement de déployer des systèmes ou même de délivrer des services, mais bien de gérer l’information transportée, la distribuer, la sécuriser, et donc la maîtriser. Le COMSIC se positionne désormais dans le rôle d’opérateur de la maîtrise de l’information pour l’armée de Terre et particulièrement pour les forces terrestres.
Cette création constitue également la première étape d’une démarche vertueuse de concentration de l’expertise et des ressources sur un site unique, sous un commandement unique. A ce titre, la nouvelle organisation consacre le COMSIC dans un rôle fondamental de tête de chaîne fonctionnelle des SIC de l’armée de Terre, responsabilité ô combien importante et garante de la cohérence de l’action d’ensemble des organismes qui traitent de ce sujet, où qu'ils soient, y compris ceux ne se trouvant pas dans notre périmètre organique. Par ailleurs, ce rôle ne se limite pas simplement aux systèmes d’information et de communication en propre comme pourrait le faire croire l’appellation, mais inclut également des domaines émergents comme la cybersécurité ou le management de l’information.
Je ressens une grande fierté d’avoir été le premier « COMSIC », d’avoir réussi cette montée en puissance et cette transformation en peu de temps finalement, avec tout mon état-major et le personnel des unités très engagé dans cette mutation inédite, tout en poursuivant sans rupture l’appui des opérations en cours.
C’est véritablement une étape majeure de la montée en puissance du COMSIC. L’arrivée de la « DIVOPS », l’ex état-major de la BTAC, qui a quitté Douai pour rejoindre Cesson-Sévigné avec son centre opérationnel, le CORTECS, s’est inscrit pleinement dans la dynamique globale. En moins d’un an, nous sommes parvenus à mettre en place une organisation et des processus cohérents et résilients, renforcés par notre intégration réussie dans le tissu local, nos relations avec les universités à travers l’école des transmissions et le PEC (pôle d’excellence cyber), les liens tissés avec les industriels, le développement de la réserve cyber-citoyenne. A ce titre, le COMSIC a immédiatement trouvé sa place dans la technopole rennaise, centrée sur les technologies des télécommunications depuis des décennies, et aujourd’hui tournée vers les matières liées à la Cyberdéfense, et s’est même positionné instantanément comme un centre de référence sur le sujet.
Cette arrivée a donc profondément changé notre fonctionnement initial, mais aussi la vocation du quartier Leschi, conçu historiquement pour une « école » et devenu en quelques mois un site entièrement opérationnel, unique en son genre en France. Cela s’est traduit également par le doublement des effectifs permanents sur le quartier où travaillent aujourd’hui quotidiennement plus de 600 spécialistes des SIC, tous d’un très haut niveau d’expertise, sans compter les 3O00 stagiaires annuels de l’école des transmissions.
Tout ceci a nécessité de fait une communication et une pédagogie adaptées en local, auprès des municipalités et de tous les acteurs régionaux, non seulement pour l’accueil de ces nombreux militaires et de leur famille, mais également pour expliquer nos métiers, nos missions, et tout simplement les conséquences de cette montée en puissance sur le bassin rennais.
Je dois dire que tout cela s’est fait merveilleusement, à la fois grâce au soutien des municipalités, et en tout premier lieu celle de Cesson-Sévigné, mais également des instances départementales et régionales, militaires évidemment, des associations d’anciens militaires ou patriotiques, et tout simplement grâce au bon sens d’un jolie terre d’accueil.
Enfin, il a également fallu « brancher les tuyaux » avec l’ensemble des unités de transmissions de l’armée de Terre, où qu’elles soient, en métropole mais aussi outre-mer et en opérations, pour établir sans rupture la nouvelle gouvernance du domaine SIC. Cela passe aussi par un dialogue constant et d’excellente qualité avec nos états-majors de rattachement, mais aussi avec nos partenaires alliés, britanniques et allemands en tout premier lieu, et les organismes interarmées avec lesquels nous travaillons au quotidien.
Pour résumer, cela représentait un défi d’envergure à relever et, pour moi le catalyseur de notre réussite, fut l’arrivée de la division opérations.
Ferrié 2017 est un tournant symbolique dans l’entrainement des unités SIC de l’armée de Terre. Il illustre le changement dans notre mode d’entrainement, mais également l’évolution du site que j’évoquais précédemment. Il a démontré en effet que le bassin rennais est devenu le « barycentre SIC » de l’armée de Terre, à partir duquel les prochains exercices d’entrainement seront commandés, et où s’effectueront certains d’entre eux.
C’est en effet depuis Cesson qu’a été conçu, planifié, organisé et commandé cet exercice majeur qui a impliqué plus de 500 transmetteurs de l’ensemble de l’armée de Terre, déployés ici sur le site Leschi, où ailleurs en France, en terrain libre, ou dans leur garnison. Et ceci n’est que le début.
Les travaux en cours attestent de cette transformation en profondeur : depuis le mois de juin dernier, le bâtiment de la division opérations sort de terre et devrait être livré fin 2018. Par la suite, d’autres constructions opérationnelles suivront pour donner toute son ampleur au COMSIC.
Concrètement, qu’avons-nous fait lors de FERRIE 2017 ? Nous avons d’une part regroupé dans le même créneau de temps et interconnecté différents exercices techniques planifiés, et d’autre part utilisé les plateformes techniques existantes sur le quartier Leschi.
Dans ce cadre, trois types d’organisation ont été jouées : des exercices sur le site de Cesson même, un exercice en terrain libre entre Rennes et Suresnes, ou encore des plateformes d’entrainement technique en garnison – le tout, comme je l’indiquais, commandé et contrôlé depuis Cesson-Sévigné.
En quoi est-ce si différent de ce qui se faisait auparavant ? Depuis quelques années, les ressources disponibles pour la préparation opérationnelle métier sont comptées, les opérations et les missions d’appui à l’entraînement des états-majors hypothéquant une grande partie des équipements existants. Il a donc fallu modifier totalement l’approche de notre propre entraînement. On ne peut plus se permettre de dédier des équipements à l’instruction, d’autres à la formation, d’autres encore à l’entraînement, ou aux OPEX… Nous devons aller vers une révision totale de nos méthodes, de nos procédés de préparation opérationnelle, afin de mutualiser et rationaliser les ressources et l’expertise, mais aussi en intégrant les technologies les plus modernes comme la réalité augmentée ou virtualisation. Chemin faisant, le concept permet des gains notables en termes de coût et de temps.
La structure physique nécessaire à un tel projet structurant porte un nom : MAGISTER, outil du continuum des SIC, qui amène les experts là où sont les équipements, interconnecte des exercices ou espaces d’entrainement les plus divers, y compris avec nos alliés, et permet un contrôle opérationnel centralisé.
L’exercice FERRIE a ainsi été le démonstrateur de ce concept révolutionnaire pour notre fonction opérationnelle.
J’ai tenu depuis le début à ce que les célébrations des 150 ans soient un facteur de cohésion, un support de tradition, pour tout le corps des transmissions militaires, un évènement fédérateur. Afin que les hommes s’intègrent dans un nouveau dispositif, il faut susciter l’adhésion, par la promotion de symboles forts, vecteurs de cohésion.
Le COMSIC se construit sur un socle solide, d’hommes et de femmes remarquables qui jouent un rôle déterminant dans la conduite des opérations, résolument tournés vers l’avenir et la modernité, toujours en phase avec les évolutions technologiques de leur époque. J’ai souhaité valoriser notre Histoire, nos traditions, mettre en lumière nos valeurs, notre éthique de Transmetteur, le don de soi au service des autres, et donc promouvoir un état d’esprit COMSIC.
Tout au long de l’année 2017, nous avons su bâtir autour de ce fil directeur un projet fort et collectif, comprenant tout un ensemble d’activités pour lesquelles nos unités, où qu’elles soient, quelles qu’elles soient, ont œuvré avec beaucoup de volontarisme et d’imagination et fait preuve d’un esprit de corps remarquable. Plusieurs évènements ont été particulièrement marquants : le concert Unisson donné par la musique des transmissions et organisé grâce au soutien indéfectible de la mairie de Cesson-Sévigné ; le Transméthon qui a mobilisé nos unités en France comme en OPEX et qui a permis à lui seul de récolter, dans un grand élan de solidarité, plus de 18 000€ pour les blessés de l’armée de Terre ; ou encore une Saint-Gabriel grandiose qui a vu se réunir au sein de la maison-mère l’ensemble des unités de transmissions de l’armée de Terre. Au total, la mobilisation exceptionnelle des transmetteurs, malgré toutes les activités opérationnelles et la restructuration majeure de notre fonction, aura permis de récolter plus de 36 000 euros. Les transmetteurs ont fait preuve d’un état d’esprit remarquable, dont ils peuvent être légitimement fiers.
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