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Colloque "Renforcer la Sécurité maritime en Afrique" le 27 juin 2016 à l'École militaire

Mise à jour  : 18/07/2016 - Direction : IRSEM

Compte-rendu et photos du colloque de l'IRSEM et du Centre d’Études Stratégiques de la Marine (CESM) sur le thème "Renforcer la Sécurité maritime en Afrique" du 27 juin 2016



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Compte-rendu du colloque "Renforcer la Sécurité maritime en Afrique" du 27 juin 2016


Fidèle à sa vocation qui est d’inscrire la réflexion stratégique au cœur des enjeux contemporains, l’Institut de Recherche Stratégique de l’Ecole Militaire, IRSEM, en partenariat avec le Centre d’Enseignement Stratégique de la Marine, CESM, a consacré son premier colloque sur la sécurité maritime à l’Afrique. Le sujet choisi « Renforcer la Sécurité maritime en Afrique » a été traité dans une optique pragmatique et opérationnelle en croisant les pratiques et les retours d’expériences des différents acteurs concernés, étatiques ou non étatiques, publics ou privés, du Togo, du Cameroun, de l’Union Européenne, de l’OTAN, de Think tanks, des Ministères de la Défense et des Affaires Etrangères français, des Armateurs de France et de l’agence Expertise France.

La maritimisation accélérée du monde a été porteuse d’insécurité et de nouveaux désordres en mer pour nombre d’Etats Africains. Or la maîtrise de leur domaine maritime est vitale pour les Etats Africains qui veulent préserver leur prospérité et les moyens d’un développement harmonieux.  Ce colloque a permis à des acteurs de premier plan de faire un état des lieux des différentes initiatives en cours pour aider ces Etats à relever les nombreux défis maritimes du temps présent. Il est clairement apparu que face à de nouvelles menaces non traditionnelles comme la pêche illégale, les migrations de masse, les dommages environnementaux qui viennent se superposer à la piraterie, au terrorisme et à d’autres activités criminelles telles le siphonage de pétrole brut en mer- le domaine maritime africain ne pouvait être durablement sécurisé que par un effort concerté de toutes les parties concernées.

La tension stratégique qui porte sur les principales voies de commerce maritime a fait de  l’Afrique de l’Est avec l’océan Indien et l’Afrique de l’Ouest avec le Golfe de Guinée un point de fixation pour la Communauté internationale comme l’indiquent les nombreuses résolutions du Conseil de Sécurité des Nations unies  qui y ont été consacrées  (pour l’océan Indien les Résolution 1814 : protection des bâtiments du Programme Alimentaire Mondiale, PAM, Résolution 1846 lançant Atalanta, Résolution 1851 étendant l’action internationale. Pour le Golfe de Guinée les Résolutions 2012 et 2039 appelant à la coopération et au renforcement des capacités de surveillance, d’intervention et de répression des Etats riverains du golfe de Guinée).

Des chiffres cités durant le colloque on retiendra que si la piraterie apparait sous contrôle dans l’océan Indien- après toutefois 8 années d’opérations militaires multinationales- 41 marins sont toujours aux mains des pirates tandis qu’en 2015, environ 23 personnes ont été tuées à l’occasion d’actes de piraterie dans le Golfe de Guinée pour l’essentiel dans les eaux territoriales nigérianes.

L’insécurité maritime sur deux des principales voies maritimes mondiales a un coût stratégique (vulnérabilité du commerce mondial), un coût économique (prolifération réseaux criminels, augmentation des assurances pour les armateurs) mais aussi un coût humain inacceptable (équipages menacés, population locales qui ne peuvent vivre du commerce de leur pêche).

L’action des flottes internationales dont l’UE et l’OTAN, mais aussi de flottes sous commandement national – l’action de l’Inde et de la Chine a été citée mais on peut aussi mentionner le Japon comme la Russie- ont permis de juguler la menace de la piraterie dans l’océan Indien. Toutefois, le mandat de l’OTAN se termine fin 2016 et celui de l’opération de l’UE, Atalanta, est en cours d’examen. Les capacités maritimes régionales ont été renforcées par le biais de la mission de l’UE, EUCAPNESTOR, d’actions ciblées en direction de la Somalie (notamment la formation de garde-côtes) et de la création d’une dynamique de partage de l’information maritime grâce au Centres du Kenya, de Tanzanie et du Yémen. Le renforcement des capacités juridictionnelles, car il fallait se donner les moyens d’arrêter et de juger les pirates, a également constitué un élément important du processus global de lutte contre la piraterie dans cette région.

Des réponses opérationnelles pratiques ont également pu être mises en place par les Etats d’Afrique de l’ouest et les communautés régionales CEDEAO, CEEAC et CGG  dans le cadre du processus de Yaoundé pour le golfe de Guinée  avec la mise en place de centres d’opérations maritimes par zone et surtout la création du Centre Interrégional de Coordination, CIC, à Yaoundé en 2014. Organe de niveau stratégique, ce centre  agit comme un facilitateur en ayant la tâche difficile de fluidifier les relations entre Etats. Néanmoins, l’architecture se révèle complexe et l’opérationnalisation du dispositif est lente à se mettre en place avec de nombreux centres manquant de personnels et de matériels. La France, présente dans la zone, met à profit ses capacités politico-militaires notamment à travers les activités de la Direction de la Coopération de Sécurité et de Défense du Ministère des Affaires Etrangères, du réseau de ses attachés de défense et du programme FSP ASECMAR pour favoriser cette coopération et le dialogue entre Etats.  De son côté et en appui au processus de Yaoundé, l’UE a élaboré un plan d’action (2015-2020) construit sur le principe de l’approche globale, en faveur du Golfe de Guinée. Dans cette optique, l’UE finance différents projets appartenant au programme des Routes Maritime Critiques, dont les Routes de la Cocaïne et CRIMGO.

 Pour leur part, les armateurs français ont souhaité réduire les risques d’attaques et d’enlèvements de leurs bâtiments et de leurs  équipages en prenant des mesures de protection adaptées notamment par le biais des « Best management practises » impliquant la mise en place de dispositifs spécifiques à bord (citadelle, lances à eau, grillages) ou de mesures telles que l’augmentation de la vitesse des navires. Le recours à des gardes armés embarqués a été généralisé sur des trajets à risques en Afrique de l’Est. Par ailleurs la coopération a été renforcée dans le Golfe de Guinée avec la Marine Nationale  présente dans le cadre de la mission Corymbe.

Toutefois les risques restent réels d’une résurgence de la piraterie car les réseaux financiers criminels qui la soutiennent sont toujours actifs et ce d’autant qu’elle se fait plus violente dans le Golfe de Guinée (approches du Nigéria) tandis que le développement de la pêche illégale continue de priver les communautés locales de leur subsistance.

Les participants au colloque se sont accordés sur l’intérêt d’assurer une coopération et une coordination plus efficaces au niveau étatique entre les partenaires locaux et les nombreux intervenants français, européens et internationaux (qu’il s’agisse des Etats-Unis via AFRICOM ou des multiples agences spécialisées des Nations unies). Cette coordination et sa rationalisation est tout aussi nécessaire au niveau interrégional entre les différents acteurs présents et les organisations régionales et sous régionales. Enfin, elle apparaît impérative sur le terrain entre les différents ministères et agences maritimes locales chargés de la protection du domaine maritime africain afin de mutualiser les moyens disponibles (échanges d’informations maritimes, patrouilles et entrainement conjoints, écoles de formation régionale) C’est ce que préconise notamment l’UA dans le cadre de la réalisation de la Stratégie Africaine Intégrée pour les Mers et les Océans (AIMS 2050) qui souhaite promouvoir la sécurité et la sureté maritime afin de favoriser le développement d’une économie bleue  « florissante, durable et sécurisée ».   Le Sommet extraordinaire de l’UA prévu à Lomé le 15 octobre 2016 devrait ainsi aboutir à la signature d’une Charte africaine sur la sécurité, la sureté maritime et le développement.


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