Mettre au point des moteurs d’aéronefs plus robustes et plus légers… Voilà sur quoi a planché la société Herakles, filiale du groupe Safran. Comment ? En mettant au point un matériau composite à base de céramique pour remplacer le traditionnel métal utilisé dans les moteurs. Le projet appelé "Prophete" permet désormais aux composites d'investir les environnements les plus hostiles pour leurs fibres.
Consommer moins de carburant pour emporter plus d’armement et embarquer plus de passagers… l’heure est à l’allégement des aéronefs. Pour répondre à ce besoin, Herakles, soutenu depuis le début par la DGA, a eu l’idée d’inventer un nouveau matériau composite à base de céramique. Plus léger, il remplacerait avantageusement le métal traditionnellement utilisé jusqu’à aujourd’hui dans les moteurs. Le projet, baptisé « Réalisation d’études pour la Protection, la Réparation et l’Optimisation de Pièces Hélicoptères Évoluant dans des gammes de Températures Élevées », est plus communément appelé "Prophete".
Né sous les bons augures
« Tout l’enjeu de notre innovation est d’arriver à intégrer de nouveaux matériaux dans les zones les plus chaudes des moteurs. Jusqu’à présent, la proportion de matériaux composites dans les avions modernes avoisine les 50 % . Une zone résistait cependant encore à toutes les études : le moteur. La faute à ses très hautes températures », explique Georges Caye, chef de programme PROPHETE chez Herakles. En effet, les matériaux composites classiques ne supportent pas de températures au-delà de 200°C. Or, dans un moteur, on peut atteindre les 1200°C.
Trouver un matériau qui supporte 1200°C…Opération réussie !« Grâce au composite à matrice céramique, nous avons accompli ce challenge ! », se félicite Georges Caye. De plus, il a des vertus auto-cicatrisantes. « Pendant son utilisation, les micro-fissures qui pourraient se former dans le matériau sont colmatées par un verre qui se forme par réaction chimique au sein même de la matrice du composite. D’où son nom de matrice autocicatrisante. Ce qui permet d’augmenter significativement sa durée de vie ! », précise-t-il.
Démonstration
Afin de démontrer l’intérêt du matériau composite à matrice céramique, la société Herakles a réalisé un prototype de tuyère pour la partie arrière du moteur de l’hélicoptère Tigre. Des essais en vol se sont déroulés de début 2012 à avril 2013. « Les résultats obtenus étaient largement concluants. Après 130 heures de vol, la tuyère est intacte ! », souligne Georges Caye. En l’occurrence, l’innovation a été testée sur le Tigre mais elle peut être appliquée à n’importe quelle tuyère d’autres hélicoptères, et même d’autres pièces de moteurs d’avions.
« Cela fait 10 ans que Herakles travaille sur la création de ce matériau. Avant de le tester en conditions réelles sur la tuyère du Tigre, il y a eu beaucoup de recherches en laboratoire. Pour des applications militaires, nous sommes techniquement prêt. Côté civil, nous nous préparons à mettre en service une pièce de même type sur un avion d’Air France . » Herakles envisage ensuite une introduction en série complète dans des moteurs d’avions civils aux alentours de 2018/2019.C'est-à-dire demain.
- 6000 heures, c’est la durée de vie attendue d’une tuyère en composite céramique métal qui n’est pas sujette aux criques qui affectent les pièces métalliques portées en température.
- Entre 800 et 1200°C , ce sont les températures que peut supporter la tuyère en céramique.
- 30%, c’est le pourcentage d’allègement que l’on pourrait atteindre avec la tuyère en céramique par rapport à sa version métal