Le N°2 de l’armée de Terre : « Je quitte le contact »

« L'armée de Terre 2017 peut être fière de sa nouvelle organisation, de son fonctionnement et de ses résultats».

Dans quelques jours, je quitterai le service actif, après presque 40 années sous l’uniforme. C'est une immense fierté d'avoir dirigé, sous les ordres et avec la confiance du général Jean-Pierre Bosser, tant de femmes et tant d'hommes dévoués au service de notre pays sans compter ni leur temps ni leur sang. Le bonheur d'être chef se mesure au regard des subordonnés qu'il commande, qu'il croise ou passe en revue. Aujourd'hui, nos soldats relèvent la tête, sont fiers de leur armée et de l'image qu'ils véhiculent auprès de leurs concitoyens. Ils savent que leur métier est exigeant et n'attendent que deux choses en retour : des moyens pour remplir leur mission ainsi que de la considération pour eux et leurs proches.

Les Français et nos alliés, parfois avec envie, se demandent comment nous réussissons à entretenir la flamme du service et de l'engagement. Cela tient en deux mots : la cohésion et le pragmatisme. La cohésion n'est pas un simple slogan, c'est une réalité vécue tous les jours, faite autant d'attention que d'exigence les uns envers les autres, en commençant par soi-même. Mais aussi pragmatisme en prenant en compte la menace pour sans cesse s’adapter.

Je quitte l’armée de Terre avec fierté. Fierté de l'avoir servie dans l’infanterie, les parachutistes, les écoles et les états-majors. J'ai tiré l'enseignement majeur, qu’appelés comme professionnels, ce qui fait la qualité d'une armée, c'est le dévouement de ses hommes à un idéal. Il les pousse à aller au-delà de ce qu'ils imaginaient eux-mêmes, grâce à l’unité que procure la chaîne de commandement au sein de laquelle chacun trouve sa place.

Le second enseignement que je tire de mes années consacrées aux finances et plus largement à la logistique, c'est que le soutien doit toujours être ordonné aux finalités et ne pas échapper au commandement au nom de la performance ou de l'optimisation. À mon sens, pour qu’un chef puisse pleinement endosser ses responsabilités, il faut lui accorder les moyens et les leviers qui lui permettront d’agir. L'organisation de l'armée de Terre en 12 commandements divisionnaires vise, entre autres, cet objectif.

Le troisième enseignement est tiré des transformations et restructurations que les armées traversent depuis si longtemps. À la baisse, comme à la hausse depuis 2015 pour l'armée de Terre, ce qui compte c'est de pouvoir compter sur des hommes et des femmes de caractère, comprenant l'objectif et capable d'initiatives pour entraîner leurs subordonnés sans attendre ni subir. Notre rôle de chef est de les détecter et de les promouvoir.

« La grandeur d'un métier est avant tout d'unir des hommes » disait Saint-Exupéry. L'armée de Terre m'aura permis de vivre pleinement cet idéal. Il est ainsi temps pour moi de passer le flambeau au général de division Bernard Barrera qui poursuivra et amplifiera cette œuvre au service des armes de la France. Je quitte le contact. »

Le général de corps d’armée Bertrand Houïtte de la Chesnais, major général de l’armée de Terre