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Innovation technologique au combat - des robots sur mesure

Mise à jour  : 26/05/2021

Aux côtés du Centre de recherche des écoles de Saint-Cyr Coëtquidan et d’industriels, les sous-lieutenants de l’école militaire interarmes ont testé les fonctionnalités de combat de robots du 29 au 31 mars. Spot, Barakuda, Optio 20, Ultro ou encore Nerva LG ou XX. Ces machines ont été mises à l’épreuve dans des scénarios offensif et défensif. Une étape-clef au cœur d’un projet de recherche sur la robotisation du champ de bataille.

Sous le soleil breton, les sous-lieutenants de l’école militaire interarmes (EMIA) investissent le village de combat “Ville Bizard” et ses alentours. Entre la rue du Drakkar et le carrefour de la Rangers, il est aussi possible de croiser Spot, un engin mécanique à quatre pattes. Aux côtés des élèves-officiers, des chercheurs du Centre de recherche des écoles de Coëtquidan (CREC) et des industriels de Nexter et Shark Robotics.

Du 29 au 31 mars, tous vont récolter des données sur l’emploi de robots engagés dans des scénarios de combat en zone urbaine. Le but : évaluer l’apport opérationnel de ces innovations technologiques dans divers domaines tels que l’observation, la surveillance, l’appui-feu. Pour cela, le temps de détection et de réaction d’un ennemi par les machines sera mesuré. « Cette étude s’inscrit dans le projet pédagogique des écoles dont l’objectif principal est de former les jeunes chefs militaires et de les préparer aux engagements à venir. Il s’agit ici de les sensibiliser à l’usage de la robotique auquel ils seront très certainement confrontés », explique le lieutenant-colonel Laurent Luisetti, commandant l’EMIA.

Mesurer les différences

« Je répartis les robots de surveillance dans deux groupes », tonne le sous-lieutenant Kévin, chef de section désigné à l’occasion du scénario défensif en zone urbaine. Toutes les parties prenantes - officiers-élèves, industriels et représentants de la DGA - suivent cette phase préliminaire avec attention. Si toute la 1re brigade de l’EMIA est concernée par la série des expérimentations, quatre sous-lieutenants sont plus particulièrement investis dans cette étude depuis octobre  : le sous-lieutenant Raphaël est chef de projet robotique et les sous-lieutenants Julien, Quentin et Tsiengandray sont auteurs des trois scénarios de combat. « Les élèves de l’EMIA apportent leur expérience opérationnelle à ce projet », précise Gérard de Boisboissel, ingénieur de recherche au CREC et directeur de l’observatoire “Enjeux des nouvelles technologies pour les Forces”. Orientés par le CREC, les élèves sont aussi suivis dans ce travail de recherche par les cadres de l’EMIA, garants de la cohérence tactique des scénarios devant être exécutés à l’identique, deux fois : d’abord sans robot, puis avec, afin de mesurer la plus-value, ou non, de l’emploi de ces engins robotisés.

Apprivoiser les robots

Le lendemain, alors que le soleil commence à poindre derrière les façades de parpaings bruts de Ville Bizard, une quarantaine de sous-lieutenants s’affaire déjà. Par groupes, les combattants, chefs de groupe et chefs de section tournent sur les ateliers de prise en main des robots. Le sous-lieutenant Thibaut se familiarise avec le robot Nerva XX, petite machine chenillée, conçue pour des actions de déminage.

« L’interface est intuitive et ergonomique, analyse-t-il. Je vois déjà certains atouts tactiques, comme l’envoyer à l’avant recueillir du renseignement sonore ou visuel. » Pilotés par les officiers-élèves durant les actions de combat, les robots sont apprivoisés par ces derniers. Ils sont guidés et accompagnés par les industriels qui ont hâte d’assister à la mise en œuvre de leurs engins sur le terrain. Il leur tarde de connaître l’avis des utilisateurs. Pour les sous-lieutenants, il s’agit d’allier réflexion académique et doctrine militaire.

Intégrer une utilisation cohérente des machines

Un groupe est posté en couverture pendant qu’une base d’assaut s’empare d’un carrefour. Les blessés sont regroupés à l’arrière. Ce scénario offensif, signé par Quentin en lien avec le CREC, se joue une seconde fois avec trois robots.

« Les scénarios ont été pensés pour jouer un maximum de cas de figure dans un laps temps le plus court possible tout en intégrant une utilisation cohérente des machines », explique l’officier-élève Raphaë­l, responsable de l’organisation de ces journées. Le sous-lieutenant Louis-Marie, avec cinq autres camarades, relève le temps d’exécution de la manœuvre effectuée avec et sans robot, le temps de détection, de réaction et de neutralisation de l’ennemi. Il comptabilise même le nombre de tirs. Toutes ces données sont soigneusement collectées pour comparaison et étude ultérieures. S’y ajoutent des questionnaires sur le ressenti au combat des chefs de section et de groupe. Les résultats seront formalisés avec l’aide du CREC.

Évaluer les gains

Après le scénario défensif en zone urbaine mené de jour et de nuit, l’action offensive clôt la prise de mesures, le 31 mars. « 21 ,21. Personnel ennemi détecté sur le toit d’Oscar unité. Suis en mesure de placer mon appui à l’aide du Spot et du Barakuda » crache la radio du sous-lieutenant Julien, auteur de ce troisième scénario.

Outre les deux robots de reconnaissance utilisés pour investir les bâtiments, le robot-mule est augmenté d’un bouclier pour que les soldats puissent progresser en sécurité. « Grâce aux robots, nous avons investi chaque pièce en confiance. Nous ne déplorons aucun blessé ni décédé », note Julien. À chaud, les sous-lieutenants consignent les performances des machines : elles ont permis une détection longue distance meilleure qu’à l’œil nu, la possibilité d’économiser des moyens humains destinés ordinairement à l’appui et donc de concentrer davantage d’hommes sur l’action principale de la section  de plus, elles ont renforcé la discrétion du dispositif global en limitant le nombre de combattants qui ont dû se dévoiler pendant l’action.

Les industriels constatent par ailleurs une utilisation détournée des capacités de certains engins. Des usages remarqués par les participants qui aideront peut-être à nourrir la réflexion sur le combat du futur.

Le saviez-vous ?

Des robots, comme le Minirogen et le Drogen, sont déjà employés dans les unités du génie, et le robot-mule est testé à Barkhane.

Le centre de recherche des écoles de saint-cyr coëtquidan

Il existe depuis 1995. Ses 42 enseignants-chercheurs et ses 17 chercheurs-associés conduisent des projets de recherche appliquée avec les élèves-officiers au cours de leur formation académique. Le centre se structure autour de quatre pôles de recherche : éthique et environnement juridique, Défense et sécurité européenne, Mutation des conflits, sciences et technologies de la défense.


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