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CPA 10 : l’adjudant-chef Gabin tire sa révérence

Mise à jour  : 16/07/2021 - Auteur : Lieutenant Jennifer Medeiros - Direction : DICOD

L’adjudant-chef Gabin est une figure emblématique et un pilier du commando parachutiste de l’air n°10 (CPA 10). Il fait partie des plus anciens de l’unité. C’est également l’un des sous-officiers les plus décorés de l’armée de l’Air et de l’Espace. Après avoir consacré 27 ans de sa vie au CPA 10, il a pris sa retraite début 2021. Rencontre passionnante avec ce sous-officier parmi ceux qui ont écrit l’histoire de cette unité de prestige.

Originaire de la Somme, l’adjudant-chef Gabin entre dans l’armée de l’Air et de l’Espace le 15 mars 1980 en qualité de militaire du rang, âgé seulement de 17 ans. Il comptabilise 40 ans et 10 mois de service au sein de l’institution dont 27 ans consécutifs au CPA 10, l’une des quatre unités des forces spéciales air. 

UN PIONNIER DU CPA 10

Son parcours débute, comme tous les fusiliers commandos de l’époque, sur la base aérienne 726 de Nîmes-Courbessac. Après l’obtention du certificat d’aptitude militaire et du brevet élémentaire, il est breveté parachutiste en septembre 1980. Il devient ainsi le troisième plus jeune breveté français. Il intègre alors l’escadron de protection et d’intervention (EPI) pour y parfaire sa formation. Cette unité, héritière du 602e groupement d’infanterie de l’air et déjà prestigieuse, intervient sur les théâtres où l’armée de l’Air se projette. L’adjudant-chef Gabin connaît sa première affectation sur la base aérienne 110 de Creil à l’escadron de protection. Il y sert cinq années durant lesquelles il connaît ses premières opérations extérieures à Djibouti puis au Tchad (opérations Manta et Épervier). Il enchaîne les formations, à Montlouis et à Fontainebleau, afin d’ajouter de nouvelles qualifications à ses nombreuses compétences. En 1985, Gabin est muté sur la base de Cambrai où il y brillera jusqu’en 1993. Il est notamment engagé, à deux reprises, dans l’opération Épervier en 1986 et 1988. « En 1992j’ai assisté à la création du Commandement des opérations spéciales (COS) », indique l’adjudant-chef. Il comprend que le CPA 10 va intégrer les forces spéciales au 1er janvier 1994. Des tests de sélection sont organisés. Il décide de tenter sa chance. Sur 40 volontaires, seulement quatre sont retenus. Gabin en fait partie. Parmi les trois autres, il y a également le major Goliath, un autre pionnier du CPA 10, qui deviendra son fameux binôme durant toute sa carrière au sein des forces spéciales.

En septembre 1993, le sous-officier est affecté au CPA 40 sur la base de Nîmes. À peine quinze jours plus tard, il part en mission à Sarajevo. « J’y ai connu mes premières scènes de guerre avec son lot de coups de feu. Je montais la garde dans un poste de combat que nous avions aménagé et dans lequel nous étions régulièrement pris pour cible », relate le sous-officier. À son retour en métropole, fin janvier 1994, il rejoint le CPA 10. Articulée en cellules, l’unité se réorganisera plus tard en groupes action. 

UNE CARRIÈRE MARQUÉE PAR DE NOMBREUSES MISSIONS

Son premier déploiement en tant qu’opérateur du CPA 10 le conduit, en juin de la même année, au Rwanda dans le cadre de l’opération Turquoise. « Pour aller au Rwanda, nous avons eu seulement 24 heures pour nous préparer. Là-bas, nous avons sauvé des milliers de personnes. Dans notre vie de combattant, nous avons des jokers. J’ai utilisé mes premiers au Rwanda. Nous pouvons être le meilleur des combattants mais si nous n’avons pas avec nous le facteur chance, le mauvais coup on se le prend », affirme l’adjudant-chef. Durant les années qui suiventl’adjudant-chef ouvre la voie du contre-terrorisme et de la libération d’otages (CTLO) au CPA 10. « Je me suis spécialisé dans l’Invex (investigation extraction du personnel sous contrainte). C’était le premier terme avant le CTLO, il n’y avait pas de contre-terrorisme à l’époque. Je suis, avec mon camarade Goliath, le précurseur de cette capacité CTLO au CPA 10. Nous en avions besoin. C’est un savoir-faire qui nous a été inspiré par les équipes du GIGN (Groupe d’intervention de la Gendarmerie nationale) et du GIPN (Groupe d’intervention de la Police nationale), avec lesquelles les échanges ont été déterminants. Nous nous sommes approprié leurs techniques pour les adapter à nos missions », explique-t-il. Quelques années plus tard, il est de nouveau à Sarajevo puis au Kosovo. En 2004 et en 2006, il est déployé en Afghanistan. « Lors de cette opération, nous avons connu notre premier mort au combat, le caporal-chef Sébastien Planelles. À ce moment-là, l’histoire du CPA 10 a commencé à prendre une autre dimension », confie Gabin. 

Tout au long de sa carrière, il est déployé dans d’innombrables pays en proie aux crises et totalise pas moins de 28 opérations extérieures. Après huit ans à la tête de son groupe action, il devient sous-officier opérations et continue à écumer les théâtres d’opérations. À 56 ans, il est engagé au Levant. « C’était ma dernière mission, peut-être celle de trop. Un peu notre 14-18 à nous : une ligne de front, des tranchées, de la boue, des bombardements et du gaz issu des munitions chimiques artisanales de l’ennemi. Avec 27 ans passés au CPA 10, je n’ai pas souvent vu ma famille. J’ai une formidable épouse qui m’a soutenu tout au long de ma carrière. Elle a même gardé les lettres que je lui écrivais quand je partais en mission. Pendant toutes ces années, j’ai raté de bons moments avec ma famille et je n’ai pas vu grandir mes fistons. Pour autant, ils font ma fierté puisqu’ils ont choisi également le métier des armes », raconte-t-il avec émotion, et ajoute : « De trop nombreux camarades sont tombés au combat. J’ai moi-même failli y rester. Certains gardent en eux les traces de leurs blessures sur leur corps et dans leur âme. Sans être une obsession, j’y pense à chacune de nos retrouvailles. Dans le feu de l’action, je suis toujours passé à travers toute la ferraille. Je me suis blessé à l’entraînement, jamais en opération. Comme en 2012 où j’ai reçu un impact de mortier en plein visage qui a failli me coûter la vie. »

DE L’OPÉRATIONNEL À LA RÉSERVE

Multi décoré et cité à cinq reprises, l’adjudant-chef Gabin est un véritable exemple pour les jeunes recrues et surtout l’un des piliers de cette unité d’élite. Après avoir consacré une grande partie de sa vie au CPA 10 et contraint par la limite d’âge, il prend sa retraite début 2021. Malgré son départ, il n’a pas complètement quitté l’unité. Aujourd’hui, il y revient comme réserviste opérationnel. Un statut qui lui permet de garder ce lien si important à ses yeux et de poursuivre ses passions. Fort de ses nombreuses qualifications, il est instructeur dans différentes disciplines et continue à transmettre ses savoir-faire aux plus jeunes en encadrant le stage Bélouga (ultime formation permettant d’intégrer le CPA 10). « Je ne pouvais pas quitter l’institution comme cela, surtout le CPA 10. Quelque part, ma carrière n’est pas finie. Je suis toujours instructeur mais également sous-officier traditions. La mémoire, ce sont nous, les anciens, qui la possédons encore. Je la fais vivre au travers de la salle d’honneur. À chaque fin de Bélouga, je fais visiter cette salle aux futurs opérateurs du CPA 10. Je leur raconte toute l’histoire de l’unité, son héritage et ses traditions. Lorsque nous arrivons devant le mur honorant nos morts, que ce soit ceux d’Algérie ou ceux d’aujourd’hui, je leur dis cette phrase : le CPA 10 ne se choisit pas seul. Il faut en parler à ses proches. Vos familles doivent savoir, comprendre et accepter que vous serez souvent absents. »

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Sources : armée de l'Air et de l'Espace
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