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Militaires en poste à l’étranger : leur rôle auprès des ressortissants au début de la crise

Mise à jour  : 03/07/2020

Au moment où la crise sanitaire du Covid-19 commençait à s’étendre au-delà des frontières chinoises, le réseau du personnel de l’armée de Terre en poste à l’étranger s’est mobilisé. Entre le rapatriement de 130 000 ressortissants français et la continuité de la coopération militaire avec nos alliés, trois militaires basés à Pékin, Londres et New Dehli nous expliquent le rôle qu’ils ont tenu.

Colonel Philippe, attaché de défense à l’ambassade de France de Pékin

Quel est votre rôle dans la gestion de cette crise ?

Avec l’ensemble de la mission de Défense, j’ai œuvré au rapatriement en France de plus de 250 ressortissants français et d’une centaine d’autres Européens de Wuhan, épicentre de l’épidémie en Chine. Intégré à la cellule de crise de l’ambassade, j’ai conseillé sur le volet aérien de l’opération (délais, procédures) et négocié avec les organismes chinois en charge des autorisations de survol et de poser des aéronefs. J’ai informé l’ambassade et le centre de crise du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères sur les rapatriements organisés par la communauté internationale à Pékin. Cela nous permettait de connaître la priorité accordée à nos vols par les autorités chinoises.

Quelles adaptations cela a-t-il entraîné dans votre quotidien ?

En rotation pour assurer une continuité 24 heures sur 24 pendant les phases critiques des opérations, tout le monde a été sollicité et a dépassé le cadre habituel de ses attributions. Nous avons pu obtenir en 24 heures des autorisations de survol et de poser des aéronefs qui nécessitent d’ordinaire un délai de quinze jours. La situation d’urgence a conduit à nouer des contacts directs et nourris avec le ministère chinois des Affaires étrangères, l’administration chinoise de l’aviation civile et les opérateurs des vols pour les conseiller et obtenir en temps voulu les informations nécessaires, comme les plans de vols.

Quelles leçons en tirez-vous ?

En situation de crise, la cohésion et le travail d’équipe sont capitaux. L’expertise de mon adjoint de l’armée de l’Air a été précieuse et la polyvalence du sous-officier de l’armée de Terre de la mission de défense a permis de l’impliquer dans ces procédures. La bonne intégration de la mission de Défense au sein de l’ambassade est évidemment essentielle : la continuité des échanges avec notamment la chancellerie, le consulat et l’attaché de sécurité intérieure est primordiale pour fluidifier l’opération d’évacuation de ressortissants. L’intégration au réseau des attachés militaires en poste dans le pays est garante de l’efficacité du recueil d’informations, du partage d’expérience et du rayonnement.

Commandant Emmanuel, officier planification au Corps de réaction rapide allié britannique

Quel est votre rôle dans la gestion de cette crise ?

Dans le cadre de l’opération Rescript (équivalent britannique de l’opération Résilience), l’état-major de l’ARRC (Allied Rapid Reaction Corps, basé à Gloucester, Grande-Bretagne, équivalent britannique du CRR-FR de Lille) où je sers a dépêché des renforts au profit de l’état-major de crise établi à Londres, la France ayant accepté que ses officiers détachés  au sein de l’armée anglaise participent si besoin à l’opération nationale de lutte contre l’épidémie. J’ai été déployé comme officier planificateur au sein de l’état-major londonien de gestion de crise ( Joint Military Command-London, Commandement militaire interarmées de Londres, l’équivalent de notre EMIA-ZDS IDF). Je commande l’une des deux équipes de planification. Le poste de commandement secondaire, dont je fais partie, a pour mission principale de préparer différents scénarios d’évolution de la situation afin d’anticiper les besoins des autorités civiles britanniques. En fonction de chaque scénario, ce bureau réfléchit à la manière dont la force armée peut apporter son soutien. Cela va de l’aide à la construction d’un hôpital de circonstance au montage de centres de tests, en passant par le soutien logistique d’acheminement d’équipements.

Quelles adaptations cela a-t-il entraîné dans votre quotidien ?

Je sors de ma zone de confort. Officier planificateur n’est pas ma spécialité à l’origine. Bien que le processus de travail reste semblable à celui employé au sein de l’ARRC, l’environnement m’est inconnu ici. Étant le seul étranger au sein de ce PC britannique, cela nécessite un effort d’adaptation, en particulier linguistique.

Quelles leçons en tirez-vous ?

Cette situation nous confirme qu’il faut toujours se tenir prêt à agir et intervenir dans un environnement inconnu ou inédit. Travailler les langues étrangères est indispensable, de même qu’il est important d’étendre ses connaissances à des domaines qui ne sont, a priori, pas les siens.

Major Philippe, adjoint de l’attaché de défense de New Delhi, Inde

Quel est votre rôle dans la gestion de cette crise ?

J’ai d’abord renforcé le standard téléphonique de l’ambassade, afin de répondre aux nombreuses questions des ressortissants français. À la fermeture des frontières par le gouvernement indien, j’ai rejoint le pôle terrain auquel je suis affecté en cas de crise. Le 30 mars, j’ai été déployé dans un hôtel, point de rassemblement des ressortissants français, récupérés à travers tout le pays. Mon rôle consistait à rassembler ceux n’ayant pas la possibilité de rallier l’hôtel par leurs propres moyens et à permettre à ceux déjà présents d’entamer leur circuit de départ en les transférant vers le lycée français. Après avoir suivi ce circuit, tous ont pu rejoindre l’Hexagone par le vol du lendemain matin.

Quelles adaptations cela a-t-il entraîné dans votre quotidien ?

J’ai fait appel à mon expérience et au bons sens, à la formation militaire reçue par chacun d’entre nous, mais également à mes affectations successives. Cela nous donne les clefs d’une adaptation rapide et pragmatique.

Quelles leçons en tirez-vous ?

Malgré ma sensibilisation à la problématique de l’évacuation de ressortissants, je ne m’attendais pas à y participer dans un pays stable. On ne peut gérer seul un événement d’une telle ampleur, seul un travail en équipe permet d’y faire face.

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