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À la sueur du front

Mise à jour  : 15/02/2019

Le sport sur le front émerge en 1915  pendant la guerre  de position. Encouragé par la hiérarchie, il est mis en sommeil avec l’intensification des combats. En 1916, la pratique est relancée par les soldats  britanniques, avant d’être popularisée  par les soldats  américains en 1918.

Le 3 août 1914, l’Allemagne déclare la guerre à la France. Les soldats se trouvent engagés dans une guerre de mouvement éreintante et meurtrière. Après la première victoire de la Marne, les Alliés poursuivent l’armée allemande qui opère un repli défensif. De ces affrontements va résulter un front long de 750 kilo-mètres, allant de la mer du Nord à la frontière suisse. Les tranchées se creusent de part et d’autre, la guerre de position se met en place. Pendant les durs combats de 1915 les soldats mobilisent toutes leurs énergies.Mais entre deux assauts, l’inaction est pesante. Les idées noires plombent le moral. Loin de leur famille, de leur travail, de leur village, les soldats s’ennuient. C’est là que tout commence et que l’activité s’organise. Sportifs avant la guerre, des soldats impulsent spontanément des matchs amicaux près du front. Devant l’engouement et l’adhésion des Poilus, des officiers encouragent cette initiative. Dès lors, de nombreux comptes rendus apparaissent dans les journaux de tranchées, montrant un foisonnement et une diversification de cette activité naissante.

« À l’arrivée au cantonnement, la troupe doit être laissée au repos absolu [...], pour qu’elle puisse se détendre moralement et physiquement ».

Général Nivelle, directive du 3 juin 1917.

Influence britannique

Au début de l’année 1916, on constate une régression de la pratique sportive en raison de l’intensification des combats. La bataille de Verdun fait rage. Le 1er  juillet, la bataille de la Somme est engagée avec les Alliés. La relance du sport découle de cette bataille. Élément inhérent et complémentaire de leur culture, le sport représente pour les soldats britanniques un bienfait moral et physique, un renforcement de l’esprit de groupe, une prépa-ration aux combats. Il est, pour les Français, une distraction, un moment d’oubli de la guerre et de ses atrocités. Au contact de leurs alliés, les Poilus découvrent cette nouvelle pratique consolidée pendant les premiers mois de l’année 1917.

Le 16 avril, l’offensive Nivelle, qui devait être décisive, est un désastre total et déclenche les premières mutineries. Nivelle est destitué et Pétain prend sa place à la tête du grand quartier général le 15 mai. Il va utiliser le sport pour gérer les mouvements d’insubordination. Sa directive du 3 juin 1917 précise qu’« à l’arrivée au cantonnement, la troupe doit être laissée au repos absolu pendant le temps voulu, pour qu’elle puisse se détendre moralement et physiquement ». Sans être explicitement cité, le sport occupe une place essentielle dans le règlement de la grave crise morale que traverse alors l’armée française. L’initiative spontanée prise par quelques Poilus au début du conflit est maintenant relayée par le ministère des Armées.

Étonnante progression

En 1918, les Sammies font découvrir aux Poilus le basket-ball, le volleyball, le base-ball grâce, en grande partie, aux foyers américains YMCA (Young Men’s Christian Association). L’idéologie et les énormes moyens financiers dont dispose cette organisation permettent de sceller solidement l’étonnante progression du sport sur la totalité du front. La généralisation de sa pratique permet de toucher un nombre considérable de soldats issus en grande majorité des couches populaires du pays. Si le 11 novembre 1918 marque l’arrêt des combats, les soldats constituant l’ensemble des forces alliées restent mobilisés. Ces millions d’hommes représentent un moyen de pression sur l’Allemagne avant la signature de la paix, le 28 juin 1919 à Versailles.L’ensemble des états-majors choisit alors d’utiliser le sport pour rendre cette période de démobilisation plus supportable aux soldats. Si le terme n’existe pas encore, il s’agit bien là d’un soutien psychologique. Dès lors, la présence et la disponibilité des troupes alliées sur le territoire français vont favoriser les échanges sportifs régionaux, nationaux et internationaux. Cette période reste à jamais la plus intense que la France ait connue en matière de rencontres sportives : la dynamique est lancée. Dès le retour de la paix, le sport s’enracine définitivement dans notre pays, héritage inattendu de la Grande Guerre.


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