Le saviez-vous ? Mazagran : une bataille au bon goût de café

C’est une sorte de madeleine de Proust : le mazagran. Ce gobelet en porcelaine, monté sur pied, qui nous rappelle l’heure du café les dimanches après-midi chez nos grands-parents. Mais saviez-vous que cette tasse trouve son origine dans notre passé militaire ?

1840. La France est en pleine conquête de l’Algérie. Du 3 au 6 février se joue alors un fait d’armes héroïque : le siège de Mazagran, à l’est d’Oran.

Cent vingt-trois sous-officiers et soldats du 1^er bataillon d’infanterie légère d’Afrique, sous les ordres du capitaine Lelièvre, sont assiégés par douze mille combattants algériens, commandés par un lieutenant de l’émir Abd el-Kader. Après quatre jours et quatre nuits de combat, tel David contre Goliath, les Français sortent victorieux de cet affrontement inégal. Une victoire remportée grâce à leur bravoure et leur courage, mais aussi, si l’on en croit la légende, à « une potion magique » : du café très noir allongé, avec de l’eau légèrement sucrée additionnée d’eau-de-vie. L’ensemble étant consommé dans un verre à pied.

De retour en France, les vaillants soldats continuèrent à boire leur café « comme à Mazagran ». A la fin du XIX^e siècle, cette expression passe rapidement dans le langage courant. « Dans les cafés parisiens », raconte l’historien Eugène Muller, « on désigne surtout par le nom de mazagran le café servi dans un verre, pour le distinguer de celui qui est versé dans une tasse qui serait trop petite pour qu’on pût y ajouter de l’eau. »

L’un des vétérans de Mazagran parle également de leur breuvage servit dans de hautes timbales coniques à Charles Pillivuyt, patron d’une manufacture de porcelaine dans le Berry. Séduit par cette forme inhabituelle, ce dernier a alors l’idée d’en fabriquer en porcelaine pour boire le café. Et tout naturellement, ce verre profond pris le nom de « Mazagran » pour rendre hommage à cette bataille, au bon goût de café !

_[Sources]

• _{Edmond Pellissier de Reynaud, Annales algériennes, édition de 1854, Alger, tome 2, pp. 428-429}
• _{Eugène Muller, Curiosités historiques et littéraires, Delagrave, 1897}