Fin février, voilà déjà près de deux mois que les sapeurs de la force Barkhane sont à pied d’œuvre pour bâtir la base avancée de Gossi dans le Gourma, à une centaine de kilomètres au sud-ouest de Gao, près de la frontière avec le Burkina Faso. Le défi est de taille et le temps est compté. C’est sur le site d’un ancien camp de la MINUSMa qu’une base d’une superficie de 6 hectares doit émerger de terre avant le début de la saison des pluies. Rencontre avec ces bâtisseurs du désert.
Planifié depuis plusieurs mois par le poste de commandement interarmées de théâtre (PCIAT) basé à N’Djamena, ce projet répond aux besoins de la force Barkhane qui étend désormais son action dans la région du Liptako-Gourma.
Après une phase d’étude et d’analyse de la région, le choix s’est porté sur un ancien camp de la MINUSMa, dont la situation géographique, l’état du terrain et les infrastructures répondaient au cahier des charges, et qui permettait par ailleurs une installation rapide des unités.
Dès le mois de septembre 2018, une équipe d’experts du PCIAT comprenant notamment le chef du génie militaire, le chef de la logistique opérationnelle et un vétérinaire ont donc réalisé un audit approfondi du site. Quelques semaines plus tard une étude hydrogéologique permettait d’évaluer l’état des nappes phréatiques.
Le 13 janvier dernier, des éléments du groupement tactique désert « Picardie », s’installaient officiellement sur le camp, précédant l’arrivée, dès le lendemain, des 71 véhicules transportant le matériel de chantier.
Un détachement de 34 sapeurs du 3e régiment de Génie spécialisé dans la réalisation de travaux sommaires était simultanément projeté sur zone pour initier les travaux. Il a rapidement été rejoint par un détachement de sapeurs du 19e régiment de Génie spécialisés dans l’aide au déploiement lourd, venus depuis Gao avec les 18 engins nécessaires au chantier (EGRAP, bulldozers, tracto-niveleuses, pelles hydrauliques, arroseuse…).
La construction de cette base est quasiment terminée, et Barkhane peut déjà l’utiliser comme base de départ pour lancer des opérations.
Au milieu du vacarme des engins, des nuages de poussière drainés par les pelleteuses, c’est sous une chaleur aride que les sapeurs œuvrent sans relâche à la réalisation de cette future base avancée.
A bord de la pelleteuse EGRAP, le soldat de première classe Mehdy remplit les bastions wall. Il explique : « Nous sommes arrivés le 10 janvier et pour le moment cela se passe très bien. C'est ma première OPEX, c’est une très belle expérience. Les conditions de vie sont assez rustiques mais on est militaire, on s'adapte ! »
La garde du camp et les patrouilles permettent d’assurer la sécurisation du chantier de jour comme de nuit. « On adapte quotidiennement notre dispositif à la mission en fonction de l'avancée des travaux. Durant trois mois nous avons été assez mobiles, on vivait dans les blindés. C'est une joie de pouvoir désormais poser ses valises au camp » témoigne le lieutenant Gabriel, chef de section au sein du groupement tactique « Picardie ».
La première zone vie est livrée. La prochaine étape sera d'installer l’électricité. La zone vie désigne un espace où les soldats vivent et dorment. En attendant, les soldats se sont confectionnés du mobilier de fortune à l’aide de matériaux récupérés sur le chantier. Le colonel Jérome, chef du Génie militaire au poste de commandement interarmées salue l’initiative : « Venez admirer ce fauteuil réalisé intégralement en grillage de bastion wall, cela s’apparente véritablement à de l’art de tranchées, comme durant la première guerre mondiale ! »
Lorsque les travaux ont débuté le 13 janvier dernier, les militaires de la force Barkhane ont commencé la mission dans des conditions très rustiques avec des moyens logistiques sommaires. Le sergent Baptiste chef de groupe au sein du groupement tactique « Picardie » témoigne : « Nous nous lavons avec des bouteilles d’eau le temps que les gros moyens arrivent. On s'est adaptés. Avec le soutien de Gao, nous avons reçu pas mal de vivres, d'eau, de lits picots, de chaises et les toilettes viennent tout juste d’être livrés ! »
Le 1er février dernier, le général de division Fréderic Blachon, commandant la force Barkhane est venu apprécier l’avancée du chantier. Il en a profité pour saluer ces bâtisseurs du désert : « Que vous soyez fantassins, artilleurs, sapeurs, tous les détachements ont l'honneur et la chance de bâtir, de créer quelque chose. A chaque fois que Gossi sera évoqué, vous vous souviendrez que vous êtes à l'origine de ce camp. Encore une fois bravo, c'est une vraie fierté.»
Conduite par les armées françaises, en partenariat avec les pays du G5 Sahel, l’opération Barkhane a été lancée le 1er août 2014. Elle repose sur une approche stratégique fondée sur une logique de partenariat avec les principaux pays de la bande sahélo-saharienne (BSS) : Burkina-Faso, Mali, Mauritanie, Niger, et Tchad. Elle regroupe environ 4 500 militaires dont la mission consiste à lutter contre les groupes armés terroristes et à soutenir les forces armées des pays partenaires afin qu’elles puissent prendre en compte cette menace.
Sources : État-major des armées
Droits : Ministère de la Défense