BARKHANE : Entretien avec le commandant Pierre, pilote de chasse sur Mirage 2000

De quelle façon est utilisée la composante chasse de la force Barkhane ? 

Les Mirage 2000D qui composent le détachement de chasse opèrent, depuis la BAP de Niamey, dans toute la bande sahélo-saharienne. Afin d’atténuer la contrainte liée à la superficie très importante du théâtre d’opération, les ravitailleurs C-135 basés à Niamey, ainsi que les A330 MRTT Phénix, opérant directement depuis la France, permettent aux Mirage 2000D de gagner en allonge et d’intervenir en tous lieux avec réactivité. 

Les missions de la chasse sont multiples. Tout d’abord, nous assurons les missions d’appui et de protection des troupes terrestres de la force Barkhane et des forces armées partenaires. Par ailleurs, nous sommes à même d’intervenir directement contre les GAT lorsque nos patrouilles les décèlent. Enfin, les Mirage 2000D contribuent, aux côtés des drones REAPER, à recueillir du renseignement, notamment dans la zone des trois frontières. La prise en compte de ce renseignement peut entraîner le déclenchement d’une intervention des chasseurs, grâce à leur grande réversibilité, dès lors que le renseignement porte sur un objectif ennemi confirmé. 

Les drones REAPER sont donc tout autant déployés que les Mirage 2000D. Comment vous répartissez-vous les rôles ? 

La coordination entre les REAPER et les Mirage 2000D est primordiale car ces deux vecteurs aériens se complètent parfaitement. Le REAPER se caractérise essentiellement par la permanence et la persistance de l’observation qu’il est capable de réaliser au-dessus d’une zone pour détecter un objectif ou enrichir un renseignement. Il dispose également d’un armement à usage ponctuel. La chasse, quant à elle, se distingue par sa réactivité. En effet, ses patrouilles se trouvent soit en alerte au sol, prêtes à intervenir rapidement sur une zone, soit déjà en vol, en mesure de basculer vers une nouvelle mission sur très court préavis. Les Mirage 2000D apportent ainsi une capacité de surveillance d’opportunité et un armement à fort impact, couplé à un effet de surprise. 

En tant que pilote de Mirage 2000D vous avez la lourde responsabilité de délivrer des feux sur l’ennemi. Comment s’exerce-t-elle ? 

Lorsque qu’un équipage de mirage 2000D est engagé en opération, il faut d’abord confirmer la présence terroriste. A partir du moment où cette dernière est clairement identifiée, les renseignements sont transmis au commandement qui, au regard des informations réunies et du contexte opérationnel, donnera l’ordre ou non d’engager le feu. Grâce à la mise en place d’une boucle d’alerte permettant une coordination accélérée, la chasse est désormais capable d’intervenir encore plus efficacement, dans des délais très courts. Ces règles d’engagement sont essentielles dans l’appui que la chasse fournit aux unités amies, en neutralisant les terroristes au contact desquels elles sont engagées. Dans ce cas de figure, les pilotes doivent analyser la 

situation rapidement et posément afin d’apporter l’appui le plus approprié et le plus efficace. Les règles d’engagement sont conçues pour nous aider à réaliser cette analyse. 

La composante aérienne de la force Barkhane joue un rôle essentiel dans la pression constante et soutenue que cette dernière fait peser sur les GAT, notamment dans la zone des trois frontières. Ainsi, l’action de la chasse et des REAPER, combinée aux opérations des troupes au sol, permet à Barkhane d’imposer un rythme opérationnel soutenu dans la lutte contre les GAT. 

Conduite par les armées françaises, en partenariat avec les pays du G5 Sahel, l’opération Barkhane a été lancée le 1er août 2014. Elle repose sur une approche stratégique fondée sur une logique de partenariat avec les principaux pays de la bande sahélo-saharienne (BSS) : Burkina-Faso, Mali, Mauritanie, Niger, et Tchad. Elle regroupe environ 5 100 militaires dont la mission consiste à lutter contre les groupes armés terroristes et à soutenir les forces armées des pays partenaires afin qu’elles puissent prendre en compte cette menace.