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Discours de Florence Parly, prononcé au Centre d'instruction naval de Brest - 11 janvier 2018

Mise à jour  : 11/01/2018

Madame Florence Parly,

Ministre des Armées

Allocution au Centre d’instruction naval

Brest, le 11 janvier 2018

– Seul le prononcé fait foi –

Mesdames et messieurs les élus,

Monsieur le chef d’état-major de la marine,

Mesdames et messieurs les officiers généraux,

Commandant,

Officiers, officiers mariniers, quartiers maîtres et matelots,

On vous dit souvent, je pense, que vous avez de la chance d’être ici. C’est vrai. Le centre d’instruction naval est une chance immense. C’est un chemin vers votre émancipation, un chemin vers un engagement extraordinaire, fait d’embruns, de solidarité, d’aventures et de don de soi.

Mais je vais vous faire une confidence : la chance n’arrive jamais seule. Vous avez peut-être eu de la chance, mais vous avez surtout su la saisir.

Vous avez su briser les carcans, défier la fatalité et faire mentir les Cassandre.

Vous voir, voir votre volonté d’apprendre, d’agir. Voir votre soif de prendre le large et d’y servir la France. Voir votre vitalité et votre enthousiasme, c’est l’essence même de l’engagement du marin. C’est l’essence même de l’engagement de celui qui ne se résigne pas face au destin et décide de l’affronter, de le façonner, soi-même, à son image.

Le rôle de chacun d’entre vous ici, élèves, formateurs, permanents, est essentiel.

D’abord, parce que c’est ici, sur ces bancs ou dans ces flots, que se crée la marine de demain.

Une marine plus forte, plus puissante, plus nombreuse. La remontée en puissance de notre marine a commencé et vous en êtes les artisans. Vous travaillez à pleine capacité, et même parfois au-delà, pour former les équipages dont notre pays a besoin pour se défendre. Par le mécénat, par les partenariats BTS, par vos illustres parrains, vous faites montre de cet esprit d’initiative, de créativité et de détermination qui est l’apanage du marin.

A l’heure où certaines marines laissent des bâtiments à quai faute d’équipages. A l’heure où même l’US Navy revoit la formation de ses équipages, vous pouvez être fiers de vous. C’est parce que nous maîtrisons toutes les capacités, que nous sommes à l’aise sur tous les milieux et que nous réussissons dans toutes nos missions.

Si aujourd’hui la marine française est la première d’Europe, je crois que ce n’est pas pour rien. C’est parce qu’elle a les meilleurs équipages, c’est-à-dire les meilleurs marins et c’est-à-dire les meilleures écoles.

Et pourtant la tâche est immense. Former un marin, c’est un équilibre minutieux, une équation complexe. Les marins doivent maîtriser des techniques précises, être aussi sereins et aguerris devant des technologies nucléaires autant que devant des avions de chasse ou des missiles de croisière.

Surtout, le marin doit connaître le large. Ce n’est qu’en mer qu’on apprend la mer. Tabarly disait qu’on ne pouvait pas mentir devant la mer, car devant elle, on sait ou on ne sait pas. Il faut donc savoir et donc apprendre. Apprendre en faisant avant de faire, vraiment, dans toutes les opérations et les combats où notre marine est sollicitée.

Chers élèves, profitez de ces années de formation. Car ici, pour la première fois peut-être, se forme cet esprit d’équipage qui ne vous quittera pas.

Dans un navire, chaque marin compte, chaque geste compte. Chaque mission, chaque fonction, chaque ordre donné et exécuté aura des conséquences sur le destin de tous. Un équipage est un tout, profondément varié dans ses métiers, dans ses tâches, dans ses habitudes mais profondément uni par la solidarité, par l’humilité et par le sens du service.

Ici, au centre d’instruction naval de Brest, vous apprenez cet esprit d’équipage, dans toutes ces facettes. Dans vos chambrées, sur les terrains de sport comme sur la mer, vous apprenez l’humilité, l’entraide, la camaraderie.

Ici, vous rencontrez des personnes venues de tous les horizons, de tous les parcours, de tous les destins. Certains se sont engagés très tôt, d’autres ont poursuivi des études longues. Certains connaissaient la mer, d’autres la découvrent. Certains ont parcouru quelques kilomètres, d’autres des milliers. Et pourtant, face à l’adversité, comme dans les bons moments : rien ne vous différencie.

Du mousse à l’officier, tout le monde fait ici ses classes, use ses premiers uniformes, connaît ses premiers exploits. Surtout, chacun ici, regarde dans un même sens, dans une direction commune. Du mousse à l’étudiant de classe préparatoire, il n’y a qu’un regard, rivé sur la rade de Brest, qui vous rappelle à chaque instant au sens de votre engagement, qui vous rappelle à la mer.

Vous formez ici les équipages qui font la gloire de notre marine. C’est essentiel, mais ce n’est pas tout. Car ici, sur les rives de la rade de Brest, les armées tordent le cou aux déterminismes et donnent qualifications, emplois et avenir à des centaines de jeunes.

Venir visiter le centre d’instruction naval de Brest n’est pas anodin. Tous vos parcours n’ont pas été aisés. Parmi vous, certains ont dû entendre des mots durs. Certains ont peut-être souffert de remarques cinglantes, ont cru leurs avenirs scellés et leurs destins entravés. Peut-être n’a-t-on pas cru en vous et sans doute avez-vous été tenté de vous résigner.

La jeunesse aujourd’hui est en proie au pire des paradoxes : elle crie son envie d’engagement, de travail, d’insertion mais elle guette, en vain, l’écho de la société. Le chômage touche encore la jeunesse dans des proportions qui ne peuvent plus être tolérées. Certains pensent encore et se laissent encore dire que parce qu’ils ne sont pas nés à tel endroit, qu’ils n’ont pas obtenu tel diplôme ou qu’ils ne portent pas tel nom : ils sont condamnés à des ambitions médiocres et des situations précaires.

Cette situation, chers élèves, lycéens, mousses, maistranciers, chers enseignants : vous la connaissez peut-être, vous l’avez peut-être vécue, constatée ou subie.

Aujourd’hui, si je suis devant vous, c’est parce que vous avez pris vos destins en main. C’est parce que les armées ont pu, par des cours, par l’apprentissage et par la pratique, sans cesse la pratique, faire de vous des marins experts, courageux et précis.

Dans vos classes, vous apprenez les théories et sur le pont, vous apprenez la rigueur et la liberté. C’est par cette alliance, par cet équilibre si difficile à trouver que vous devenez prêts à affronter les flots et vous battre pour le succès des armes de la France.

L’apprentissage, c’est un engagement de nos armées mais c’est d’abord l’engagement de toute une nation. C’est la voie vers l’emploi, vers la maîtrise des savoir-faire. C’est surtout la porte d’entrée vers l’égalité de tous, quel que soit son niveau d’étude, quelle que soit son origine sociale.

Et je suis fière de participer aujourd’hui à l’action d’un gouvernement qui a décidé de s’emparer de l’apprentissage, qui en a compris l’intérêt, l’importance et l’avenir.

Le Premier ministre a annoncé il y a quelques semaines une réforme majeure de l’apprentissage en France. Le Président de la République l’a répété lors de ses voeux aux Français. Ce gouvernement rendra à l’apprentissage ces lettres de noblesse et cette réforme ouvrira les portes de l’excellence et de l’emploi à des milliers de jeunes.

Quand le gouvernement s’engage, les armées agissent.

Si je suis venue ici avec Jean-Marc Borello, que la ministre du travail a chargé d’une mission sur l’insertion, sur les exclusions dans le marché du travail, sur une nouvelle politique de l’emploi, c’est justement pour lui montrer le meilleur de ce que font nos armées. J’irai même encore un peu plus loin, c’est pour montrer à Jean-Marc Borello sans doute parmi le meilleur de ce que fait la France.

A l’école des mousses, à l’école de maistrance, au lycée naval : chacun a sa chance. Seuls comptent la volonté, le désir de s’engager et de prendre le large.

Je crois que notre Nation toute entière peut s’inspirer de la rade de Brest. Et en me tenant devant vous, je suis fière, fière de me tenir devant des femmes et des hommes libres.

Devant des femmes et des hommes affranchis de la fatalité, maîtres de leurs destins, prêts à servir, prêts à se donner pour la France, pour sa Marine, pour ses embruns comme pour ses vaisseaux.

« La mer est un espace de rigueur et de liberté » écrivait Hugo. Je le crois. Ici, vous apprendrez la rigueur, le sens du travail et la force de l’engagement. Et, devant moi, je vous vois prêts à l’aventure, prêts à dompter les flots, à trimer parfois mais à célébrer, toujours, la liberté, votre liberté.

Vive le centre d’instruction naval de Brest !

Vive la République ! Vive la France !