Arrivé en juillet 2020 sur le théâtre syro-irakien, le général de brigade aérienne Dominique Tardif a assuré pendant 1 an la fonction de SNR-O dans le cadre de l’opération CHAMMAL, participation française à la coalition internationale INHERENT RESOLVE (OIR). L’intitulé du poste implique plusieurs responsabilités : commander les Français engagés dans l’opération CHAMMAL, garantir le bon emploi des moyens français au Levant et assurer la fonction de directeur du Directorate of interagency and civilian environment (DICE), structure en charge de coordonner les opérations militaires avec les activités civiles. Avant d'être relevé par un autre aviateur, le général Vincent Coste, le général Tardif revient sur son mandat et les leçons qu’il en tire.
Quelles ont été vos missions en tant que SNR-O et directeur du DICE ?
En tant que représentant national, je commandais les militaires français présents en Irak et au Koweït et je devais garantir le bon emploi des moyens français. Concrètement, cela signifie s’assurer que l’utilisation des avions Rafale et de l'arme aérienne respecte un processus précis pour éviter tout dommage collatéral. Cela signifie également proposer des adaptations de notre dispositif pour répondre à la mutation de la menace, aux évolutions de notre coalition interalliée et in fine aux intérêts de la France.
En tant que directeur du DICE, je faisais partie du groupe de commandement constitué autour du général américain commandant OIR. Grâce à trois équipes dédiées respectivement à l’Irak fédéral, à la région du Kurdistan d’Irak et à la Syrie, nous avons évalué l’impact de l’environnement social, économique mais aussi politique sur les mutations de Daech. Nous avons également travaillé sur les camps de déplacés en Irak et en Syrie, à la fois pour évaluer la situation humanitaire et sécuritaire sur place, mais aussi pour appuyer les autorités locales et les acteurs humanitaires engagés pour apporter des solutions durables.
Que retenez-vous de vos 12 mois sur le théâtre ?
J’ai été marqué par la complexité de la région. Fruit d’une riche histoire multimillénaire, l’Irak se compose de plusieurs ethnies (arabe, kurde, turkmène…) traversées par différents courants religieux (chiisme, sunnisme, christianisme, yézidisme…). J’ai pu observer des évolutions favorables qui permettent de conserver un certain optimisme. Le chemin est encore long et tant que le gouvernement irakien demande notre soutien, nous poursuivrons notre mission afin de participer à l'amélioration de la sécurité du pays. Je retiens également la qualité des officiers généraux irakiens qui, au quotidien, et depuis 7 années, planifient et conduisent des opérations militaires pour poursuivre la neutralisation des cellules insurrectionnelles de Daech.
Quel est le premier conseil que vous allez donner à votre successeur ?
En arrivant sur ce théâtre, il me semble important de prendre le temps de saisir la complexité des grandes dynamiques du moment. Il est également nécessaire de construire des relations au sein de la Coalition, mais aussi avec les partenaires civils des ambassades, des grandes organisations internationales et des organisations non gouvernementales.
Quelles sont les principales difficultés qui restent à aplanir selon vous ?
L’Irak est confronté à une fragmentation de la société qui est le fruit de très nombreuses années de conflits. La plus grande difficulté consiste à progresser vers une réconciliation des Irakiens. Aujourd’hui, on peut constater que malgré les affres de la guerre, le sentiment national existe toujours. Ce sera un effort de longue haleine qui devra encore souffrir d’accès de tension.
Un mot de la fin ?
Après une année passée en Irak, je mesure à quel point les dynamiques de fragmentation peuvent être d’une puissance incommensurable. J’apprécie mieux le caractère précieux et fragile d'une société humaine.
Lancée le 19 septembre 2014, l’opération CHAMMAL représente le volet français de l’opération internationale INHERENT RESOLVE (OIR) rassemblant 80 pays et organisations. En coordination avec le gouvernement irakien et les alliés de la France présents dans la zone, l’opération CHAMMAL apporte un soutien militaire aux forces locales engagées dans la lutte contre Daech sur leur territoire. La Coalition internationale adapte en permanence son dispositif au Levant et la France poursuit son effort dans la région car le combat contre le terrorisme continue. L’opération CHAMMAL se concentre désormais sur son pilier « appui » et compte 600 soldats insérés au sein des états-majors d’OIR ou sur les déploiements aériens et maritimes.
Sources : État-major des armées
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