Mon cher camarade,
Où que vous serviez, vous appartenez à une unité militaire. Je vous propose, aujourd’hui, de réfléchir au sens du mot « unité ».
Vous le savez, à l’opposé de l’unité, on trouve la dissociation, la discorde et la division. Autant de chemins qui, tous, conduisent à la dispersion et à la défaite. L’unité, seule, conduit à la victoire.
Vous connaissez cette maxime : « l’union fait la force ». Elle résonne, pour nous, militaires, comme une évidence. Une évidence systématiquement confortée par l’expérience de l’engagement. Ainsi, malgré tous vos efforts pour repousser vos limites, vous avez été – j’en suis certain – obligés de reconnaître, très tôt, que vos propres forces individuelles ne suffisaient pas. Mais vous avez, également, compris que tout devenait possible par l’addition de vos talents au sein d’un même creuset. Tel est, peut-être, l’un des tout premiers enseignements que vous avez tiré de vos débuts militaires en unité.
L’unité naît, effectivement, avec la mise en commun de trois atouts-maîtres : l’esprit de corps, le respect de l’autre et le sens du bien commun.
S’unir, c’est – d’abord – chercher à « faire corps ». Derrière cette ambition, il y a la volonté, non seulement, de renforcer les liens qui nous relient les uns aux autres mais, également, d’en créer de nouveaux. Ces liens densifient la fraternité qui existe entre nous ; celle qui doit « unir les membres d’une même famille » ; celle qui fait que nous sommes « frères d’armes », et non « collègues » ; celle qui rend inconcevable l’abandon du camarade à son sort. Cette fraternité, nous lui avons donné un nom : esprit de corps ou d’équipage.
S’unir, c’est – ensuite – cultiver le respect de l’autre. Il s’agit d’une ambition bien différente de la recherche de l’unanimité et du consensus. Chez nous, contrairement à ce que pourraient penser ceux qui ne nous connaissent pas, l’uniformité se limite à la tenue. Pour le reste, point d’uniformité de conscience ou d’opinion. Chacun est unique et respecté pour ce qu’il est. En revanche, nous nous retrouvons autour de ce qui fait notre identité et notre spécificité : l’amour de la patrie, le sens du service, la camaraderie, la disponibilité, l’esprit de sacrifice, la discipline, le respect de la parole donnée… Unité et diversité, voilà notre richesse.
S’unir, c’est – enfin – faire toute sa place au bien commun. Happé par la spirale du conformisme et tenté de reconnaître la primauté des droits sur les devoirs, notre monde a besoin d’un antidote. Cet antidote, c’est l’unité. S’unir, c’est dépasser l’individualisme standardisé pour se retrouver, avec ceux qui nous entourent, en un même point élevé : le bien commun. Nous avons le privilège de vivre de cette unité, au quotidien. C’est notre trésor. Il nous appartient de l’entretenir.
Je terminerai cette lettre sur la conviction que les unités ne s’opposent pas, mais qu’elles s’additionnent. Les « unités » font l’unité, au service de ce qui nous dépasse, toutes et tous : la France. Continuons, sur ce plan, à suivre l’exemple de nos anciens. L’exemplarité qui sera – justement – le thème de ma prochaine lettre.
Fraternellement,
Général d’armée Pierre de Villiers
Sources : État-major des armées
Droits : Ministère des Armées