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Moyens

Mise à jour  : 10/04/2017

Mon cher camarade,

La semaine dernière, le caporal-chef Julien Barbé est mort dans l’accomplissement de sa mission contre les groupes armés terroristes, sur la zone frontalière entre le Mali et le Burkina-Faso. Je n’oublie pas, non plus, ses trois camarades blessés dans l’explosion d’un IED, au passage de leur véhicule blindé.

Son sacrifice de soldat justifie l’hommage qui lui sera rendu et la reconnaissance de la Nation. Il appelle, de notre part, une détermination redoublée. La devise de son régiment nous y engage : « Je continuerai ».

Tel est notre devoir, en effet : continuer à protéger la France et les Français en restant forts. Je pense à la force morale, bien sûr ! D’autant que la liberté mérite d’être servie avec davantage de passion et de détermination que toutes les formes de tyrannie. Mais je pense, aussi, à la force concrète, technique, mécanique, physique. Celle qui repose sur des moyens, adaptés et cohérents. Les moyens dont j’ai choisi de vous parler aujourd’hui.

Dans la guerre, vous le savez, il faut accepter que certains paramètres puissent nous échapper. Ainsi, par exemple, nous n’avons pas toujours le choix du terrain, ni celui du moment. Et c’est, d’ailleurs, pourquoi la faculté d’adaptation de nos armées est, à ce point, essentielle ! En revanche, s’il y a bien un paramètre sur lequel le pays dispose d’une liberté souveraine pour agir, c’est celui du choix des moyens pour assurer sa défense.

Dans ce domaine, il s’agit, avant tout, d’une question de lucidité et de volonté. Lucidité pour évaluer la menace à son juste niveau et comprendre le danger, avant qu’il ne soit trop tard. Volonté pour consentir, à temps, les efforts nécessaires et suffisants à la régénération de la force. Car, dans le brouillard de la guerre, il y a, au moins, une chose de sûre : la logique du « toujours plus avec moins », poussée au-delà de toute mesure, expose les soldats et conduit, tôt ou tard, à la défaite.

C’est pourquoi, en réponse à l’élévation du niveau de la menace et pour gommer les fragilités consécutives au sur-engagement actuel de nos forces, il y a, désormais, consensus sur la nécessité d’augmenter, sans tarder, l’effort de défense. Une partie importante de cet effort sera, de facto, consacrée à la régénération des capacités et des équipements.

Cet « effort de guerre » est de la responsabilité du pays. En retour, comme nos anciens, nous nous devons d’entretenir et d’employer nos moyens à bon escient. Nous ne sommes pas ignorants des difficultés budgétaires du pays. Nous sommes, tout simplement des soldats, des marins et des aviateurs qui avons besoin d’équipements pour protéger, de munitions pour combattre, de soutien logistique pour durer, de personnels formés, entraînés et motivés pour gagner. Nous ne nous plaignons pas. Nous demandons seulement à avoir les moyens de nos responsabilités, au quotidien, bien sûr et, encore plus, au combat.

Pour résumer, il revient à la Nation d’assurer la cohérence entre les ambitions, les menaces, les missions et les moyens. Les armées ont, quant à elles, un devoir d’excellence pour tout ce qui relève de l’entretien et de l’emploi de ces moyens, au service de la protection de la France et des Français.

Continuons donc, avec persévérance, à cultiver cet état d’esprit. La persévérance qui sera, justement, le thème de ma prochaine lettre.

Fraternellement,

Général d’armée Pierre de Villiers


Sources : État-major des armées
Droits : Ministère des Armées