Madame Florence Parly,
ministre des Armées
Naval Group
Lorient, le 29 mars 2018
– Seul le prononcé fait foi –
Monsieur le Préfet,
Mesdames et messieurs les élus,
Monsieur le chef d’état-major de la marine,
Monsieur le Président-directeur général,
Mesdames et messieurs les officiers généraux,
Mesdames et messieurs, chers amis,
La défense commencerait donc au large. Cette devise, nous le connaissons tous. Nous l’avons vu sur nos murs, dans nos gares, sur internet.
Cette devise, surtout, est vrai. La défense, notre défense, commence au large. Des côtes de la Méditerranée à la Corne de l’Afrique, pour surveiller nos rivages ou pour assurer notre dissuasion nucléaire, notre défense porte cette teinte de bleu marine, si nécessaire à la protection de notre pays.
Parler de la marine, c’est parler de ces équipages qui, parfois pour un jour, parfois pour des mois, partent avec la même force, avec la même unité, défient les flots, domptent les embruns et font flotter au vent du large le drapeau français. Ils portent secours, assurent le coeur de notre souveraineté ou frappent nos ennemis.
La France, vous le savez, a le deuxième plus vaste espace maritime au monde. Ces océans regorgent de richesses, d’espoir de développement. Ils sont autant de routes qui façonnent notre commerce et nos échanges. Ils sont aussi ces espaces, où les confrontations sont rudes, les convoitises nombreuses et les erreurs impossibles.
La France est portée vers la mer. Ici, à Lorient, comme dans toute la Bretagne, elle se donne à l’océan. C’est la géographie même qui fait de la France, la France de métropole, comme des outremers, une nation maritime. C’est le fil de l’histoire, qui nous montre l’exigence d’y être forts et présents.
Aujourd’hui, la mer est au centre de tous les enjeux. Elle est le théâtre des démonstrations de puissance des grandes nations, la scène des drames de la violence et de la pauvreté, la voie d’accès vers tous les continents.
Notre marine nationale doit être forte. C’est la condition de notre souveraineté. C’est la condition de notre dissuasion. C’est la condition de la protection de notre territoire national, de la projection de nos forces, de leurs ravitaillements.
La loi de programmation militaire 2019-2025 tire donc toutes les conséquences de cette exigence stratégique. La Marine nationale est au coeur de cette loi. Son modèle est préservé, augmenté, renouvelé. Elle sera prête à agir contre toutes les menaces, à intervenir en toutes circonstances.
La LPM qui a été votée à l’Assemblée nationale cette semaine consacre des moyens exceptionnels. C’est une LPM de renouveau, qui met fin à des années de coupes cinglantes, de programmes d’armements retardés, encore retardés et enfin annulés. Une LPM qui inverse résolument la courbe des effectifs et rend à la défense de la France tous les moyens dont elle a besoin et l’objectif fixé par le Président de la République de consacrer 2% du PIB à la défense nationale d’ici 2025 sera respecté.
Dans ce vaste renouveau de nos armées, comme je vous le disais, la marine nationale prend toute sa place.
Le texte que j’ai porté et que l’Assemblée nationale a voté en première lecture mardi va permettre des livraisons de matériels conséquentes, d’accélérer les programmes et de préparer l’avenir de la marine.
Derrière moi se trouve une FREMM, j’en ai visité le chantier tout à l’heure, les frégates feront évidemment partis des équipements renouvelés. Les trois dernières FREMM seront livrées d’ici 2022. J’ai vu tout à l’heure le bureau d’étude des FTI, les deux premières seront livrées pendant la LPM et les quatre suivantes commandées. Ces livraisons seront complétées par celles des trois frégates légères de type La Fayette, objets d’un programme de rénovation permettant d’en optimiser et d’en prolonger l’emploi opérationnel.
Les quatre premiers sous-marins nucléaires d’attaque de type Barracuda, qui remplaceront les SNA de type Rubis, seront livrés. Les deux derniers seront commandés dans la période : cette composante sous-marine aux meilleurs standards mondiaux permettra d’élargir les possibilités de mise en oeuvre du missile de croisière naval et de déployer des forces spéciales en immersion.
Cette LPM accélère les programmes, je vous le disais, elle augmente aussi les cibles les plus stratégiques, les cibles pour les bâtiments dont les besoins se faisaient les plus criants pour notre défense nationale.
La LPM a rehaussé la cible du programme « Flotte logistique » avec quatre bâtiments à double coque.
Les avions de patrouille maritime Atlantique 2 seront plus opérationnels et plus nombreux, puisque nous en rénoverons 18 au lieu de 15 prévus à l’origine et que tous seront livrés au cours de la LPM.
Quant au nombre de patrouilleurs de la Marine nationale, il est porté de 17 à 19, dont 11 patrouilleurs de nouvelle génération qui seront livrés d’ici 2025 contre 4 prévus initialement.
Cette LPM laisse une grande part à l’innovation. Les moyens consacrés aux études et à l’innovation sont ainsi portés à 1 milliard d’euros par an dès 2022. En plus de crédits majeurs engagés pour le renouvellement de la dissuasion, l’effort technologique en faveur de la composante océanique va perdurer pour assurer l’invulnérabilité de nos SNLE. Nous allons lancer le développement du SNLE de troisième génération et de la future version du missile balistique M51.
Ce tournant de l’innovation, pris par la LPM, cela signifie que nous allons lancer les grands programmes d’armement structurants du futur. Pour la Marine nationale, il s’agit notamment des études pour le successeur du Charles de Gaulle. Ce porte-avions devra assurer la continuité de notre modèle, maintenir nos savoir-faire, améliorer nos outils, notamment en matière de propulsion, et surtout, surtout, donner une place pleine et entière aux nouvelles technologies dont nous disposons pour faire face non pas au combats d’hier, ni même d’aujourd’hui, mais ceux de demain.
Bien d’autres équipements seront renouvelés, bien d’autres innovations seront lancées et je ne vais pas me lancer dans un inventaire à la Prévert, qui risquerait d’être fastidieux. Mais sachez que le renouvellement des matériels de la marine sera mené vite, qu’il sera mené en profondeur. Sachez que cette LPM permettra à chacun de naviguer sur les navires ou les sous-marins des plus hauts standards.
Ce renouvellement commence dès maintenant et je suis fière de vous annoncer que le ministère des Armées a réceptionné il y a quelque jour à peine, la Loire, le premier de quatre bâtiments de soutien et d’assistance hauturiers. Ces bâtiments sont issus d’une collaboration réussie, celle de Naval Group et des chantiers PIRIOU, au sein du groupement Kership.
Il y a justement un autre message que je voulais vous transmettre ici. Une marine forte, c’est une industrie forte. C’est une industrie qui croît, qui crée des emplois et construit navires et sous-marins.
Et pour parler de cette industrie, quel meilleur endroit que Lorient ? Quelle meilleure place que ce chantier pour comprendre que la Marine nationale porte le poids de notre histoire et les espoirs de notre modernité ?
Sur ce chantier, depuis plus de 300 ans, sont bâtis les navires qui font le succès des armes de la France ou font briller notre pays à l’export. Sur ce chantier, vous avez su évoluer sans cesse ; vous adapter, sans cesse. Vous avez montré et vous montrez la force de notre industrie navale : la maîtrise parfaite des techniques et l’oeil rivé vers l’avenir.
Sur ce site de Naval Group à Lorient, plus de 2000 personnes travaillent au quotidien. Vous êtes liés au Morbihan, liés à cette Bretagne qui connaît si bien la défense, vous en êtes un des poumons économiques, un des coeurs technologiques. Sur ce site, toutes les activités d’architecture des navires armés sont présentes en matière de plateformes comme de systèmes de combat. Ici, tous les savoir-faire de Naval Group s’allient et résonnent ensemble d’une même harmonie.
Cette semaine est la semaine de l’industrie. Je suis donc ravie de voir l’un des fleurons de notre industrie de défense ici à Lorient. Cela tombe bien, car nous allons avoir besoin de vous. La LPM 2019-2025 porte la remontée en puissance de notre Marine, elle porte donc aussi des ambitions fortes pour Naval Group.
Dans quelques semaines la 5e FREMM, la Bretagne, sera transférée à la marine nationale et la FREMM Normandie, comme j’ai pu le voir, est en cours d’achèvement. Mais vous l’aurez compris, vous allez encore avoir du pain sur la planche ensuite ! Deux FREMM nouvelles à construire, deux FREMM d’un nouveau type, avec des capacités de défense aérienne renforcées.
Je parle des FREMM, mais je pourrais aussi vous parler des FTI. Elles sont déterminantes pour notre marine nationale et je sais combien elles comptent pour vous à Lorient. Le programme FTI a été préparé avec la plus grande qualité dans des délais très restreints et c’est grâce à cela que pour vous, ici, à Lorient, l’activité sera garantie, continue. C’est pour ça que dès que la dernière FREMM sera livrée en 2022, la première FTI pourra sortir de ce chantier dès 2023.
Ces commandes, ce sont évidemment des opportunités pour Naval Group, pour Lorient, pour vous. C’est l’assurance de l’emploi et de la vitalité pour toute une région.
Mais ces commandes, ce sont aussi autant d’exigences. Naval Group, comme tous les industriels de la défense, doivent être la hauteur des enjeux, accompagner et appuyer cette remontée en puissance exceptionnelle de nos armées. Il faudra donc rester compétitif, maîtriser les coûts, garantir la plus haute qualité dans la fabrication comme dans le soutien, respecter les délais. J’y serai extrêmement attentive. Mais quand je viens à Lorient, je suis sans crainte car je sais qu’ici, on a réussi à battre des records et à concevoir, réaliser et livrer une GOWIND en 36 mois à peine.
Il y a cette exigence de résultats, il y a aussi cette exigence d’innovation. Pour tous ces chantiers, comme pour ceux à l’export, vous devrez pouvoir fédérer le meilleur de la technologie française en embarquant sur les navires les succès de vos partenaires, Thalès, MBDA, Safran. Et les grands groupes ne sont pas les seuls qui devront affronter les flots. Les PME, les start-up, tout un écosystème vous attend, bouillonnant d’initiatives et d’idées. Saisissez-les ! Faites-les monter à bord ! Embrassez cette énergie formidable venue de nos entrepreneurs !
Votre capacité à dépasser le possible, à choisir la voie de l’innovation plutôt que celle de la facilité, à maîtriser les savoir-faire et manier les technologies, c’est aussi celle qui fait de Naval Group, qui fait de vous, les ambassadeurs de notre industrie.
De l’Inde à l’Australie, du Maroc au Brésil, Naval Group exporte. La France est choisie, reconnue, écoutée. Par votre qualité et votre capacité d’innovation, vous êtes des acteurs de notre rayonnement, des symboles de l’excellence française.
Mais ces succès à l’export en appellent de nouveaux. C’est une nécessité pour Naval Group, pour son équilibre, pour Lorient. La demande de la marine nationale est forte mais Naval Group doit marcher sur ces deux jambes. La croissance se trouve dans le renouveau de nos armées, mais elle se trouve aussi à l’extérieur de nos frontières. C’est le sens de la stratégie que vous avez initié, cher Hervé Guillou. Et vous ne vous êtes pas trompé : Naval Group doit continuer à s’exporter, à tourner le regard vers l’international. Et dans tous les prospects, vous pourrez compter sur moi pour être votre meilleure avocate.
Mais pour être fort, pour emporter les contrats, pour croitre encore et assurer la vitalité de notre industrie navale, il ne s’agit pas d’être seul. Mettons fin à cette guerre intra-européenne insensée. Quand la Chine, la Russie ou la Corée émergent comme de nouveaux géants navals, réfléchissons un instant à qui sont nos concurrents. Demandons-nous si nous préférons perdre des contrats seuls ou les gagner ensemble.
L’industrie navale européenne a tout à gagner à se consolider. Nous pouvons devenir un géant à part entière, aux compétences préservées et à la taille critique. Nous pouvons faire éclore des synergies, faire naître des nouvelles solidarités dont nous sortirons plus forts, plus innovants, plus compétitifs.
L’Italie, Fincantieri, est un partenaire naturel pour Naval Group. Les échanges sont intenses, c’est normal, c’est même heureux. Et le 1er février à Rome, j’ai surtout constaté, de part et d’autre de la table des négociations, une indéfectible envie de réussir.
Une première phase s’achève. Elle a permis d’identifier les opportunités concrètes de coopération entre les deux groupes. Ce dialogue doit maintenant perdurer, se développer, s’élargir à tous vos partenaires industriels clés. C’est par ce dialogue libre et ouvert, que nous jetterons les ponts pour des coopérations ambitieuses tout en protégeant, et j’y serai vigilante, nos intérêts souverains.
Venir à Lorient, c’est venir voir comment plus de trois siècles d’histoire ont façonné notre défense, nos navires, nos habitudes. Venir à Lorient, c’est comprendre le savoir-faire de Naval Group, voir l’enthousiasme et la qualité de ceux qui y travaillent, c’est saisir pleinement les enjeux de notre défense au large et pouvoir vous annoncer, que notre marine comme notre industrie navale, voguent à nouveau vers un soleil éclatant.
Vive la République ! Vive la France !