Rompre une miche de pain à pleines mains, sentir la farine sur ses doigts, croquer dans une croûte croustillante, savourer le moelleux de la mie encore tiède, aérée, élastique, presque fondante...
Symbole de notre pays et base de l’alimentation française, le pain joue également un rôle clé sur les théâtres d’opération. Parce qu’en OPEX, le moral des troupes est un élément central et que la nourriture en est un paramètre primordial, ce 16 octobre, « journée mondiale du pain »[1], est l’occasion de faire un point sur la place de ce symbole du made in France en temps de guerre.
Militaire en opération, dégustant une ration avec du pain fabriqué par l’UMBC en complément ©État-major des Armées
Dans un environnement hostile et difficile, chaque gain en confort permet au soldat d’être plus efficace sur le terrain. Comme le souligne le CRP David[2], « le pain, c’est un peu du pays ». Alors comment accéder à ce « petit bout de France » à l’importance non négligeable lorsqu’on est loin de chez soi ? Sur le terrain, plusieurs modes d’approvisionnement existent :
Ils servent de complément aux rations de combat individuelles réchauffables (RCIR) et aux rations de fête. Empaquetés sous atmosphère modifiée (gaz carbonique et acide propénoïque) dans un emballage étanche, leur date de durabilité minimale (DDM) est de neuf mois. Communément appelés « pains Boulangère », ils remplacent leur ancêtre, le « pain de guerre ». Peu distribués (environ 50 000 sachets par an), leur consommation reste exceptionnelle.
Pain de campagne « Boulangère » ©Service du commissariat des armées (CIEC)
Des pains complets au chocolat (DDM de 3 ans) de 60 grammes sont également intégrés aux rations lyophilisées (RIL). 80 000 sachets sont distribués par an au profit de l’OPEX.
La boulangerie de campagne de Gao et les boulangers militaires ©État-major des Armées
Le pain fait donc pleinement partie du quotidien en opération. Afin d’en assurer l’approvisionnement sur le terrain, différents moyens sont mis en œuvre et des personnels spécifiques sont mobilisés. Ces spécialistes opèrent sur les matériels du Commissariat des armées, en particulier des électromécaniciens frigoristes (pour la partie maintenance du matériel) et des spécialistes gestionnaires d’approvisionnement. Enfin, certains personnels ont une double spécialité : ils sont gestionnaires d’approvisionnement et boulangers... Comment sont-ils formés ?
L’École des Fourriers de Querqueville (EFQ), l’une des écoles du Commissariat des armées, propose plusieurs stages afin de former les boulangers qui œuvreront sur le terrain. Les stagiaires s’exercent en conditions opérationnelles sur UMBC (unité mobile de boulangerie de campagne) présents à Querqueville.
Formation des futurs boulangers de l’armée française à l’École des Fourriers de Querqueville ©EFQ
Côté Marine Nationale, la majeure partie du personnel formé vient d’unités embarquées sur sous-marin ou bâtiment de surface. De ce fait, ils se retrouvent rapidement en situation de production, dès que le bâtiment prend la mer. Trois sessions de stages d’initiation à la boulangerie sont proposées par an, pour six stagiaires à chaque fois, soit dix-huit personnels formés. Trois sessions de stages de perfectionnement en boulangerie sont également proposées, pour quatre stagiaires, soit douze personnels formés par an. Enfin, le stage « BAT GECOLL » option production (brevet d’aptitude technique gestionnaire de collectivité) met en place deux sessions de formation pour neuf stagiaires en moyenne (dix-huit personnels par an).
Côté armée de Terre, les personnels viennent uniquement du 14ème RISLP[3] et appartiennent tous au domaine de spécialité « Gestionnaire des Approvisionnements » (GAP). Trois stages « boulangerie de campagne » sont proposés à quatre personnels. Douze personnels sont ainsi formés par an.
La formation à l’EFQ et celle au 14ème RISLP (uniquement pour le personnel de l’armée de Terre) sont différentes : la formation initiale à l’EFQ vise les personnels n’ayant aucune expérience en boulangerie ou métiers de bouche. La formation débute par une semaine de théorie, puis est suivie d’une semaine dite « de structure » en atelier boulangerie pour finir par une semaine sur UMBC en montant jour après jour en quantité de pain à réaliser (au quatrième jour, la production doit être maximale, soit 1 000 pains). Le 14ème RISLP prend la suite de cette formation afin de les mettre en situation de production maximale durant deux semaines.
En janvier 2018, le président de la République, M. Emmanuel Macron, a déclaré vouloir inscrire la baguette de pain au patrimoine mondial immatériel de l’UNESCO. Ce serait sanctifier cette spécialité française et affirmer son caractère indispensable dans l’assiette des français, civils comme militaires...
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[1] La fédération internationale des boulangers (UIB) a déclaré la journée du 16 octobre « jour du pain » (The World Bread Day). À noter que cette date est parallèlement celle retenue pour la Journée Mondiale de l'alimentation. Sûrement car, historiquement, le pain est une part essentielle de la nourriture.
[2] CRP David, adjoint à l’officier responsable de la filière soutien de l’homme à la DC SCA
[3] Le régiment de soutien du combattant (RSC) est créé le 28 juillet 2011 à Toulouse à partir du regroupement des 1er et 4ème groupements de soutien du Commissariat de l'armée de terre (GLCAT) dissous. Il fait partie du commandement de la logistique. Ce régiment de plus de 1 000 personnes est basé à Toulouse. Le 1er juillet 2018, il est transformé en régiment parachutiste et prend l'appellation de 14ème régiment d'infanterie et de soutien logistique parachutiste (14ème RISLP).
Sources : SCA
Droits : sca